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France : Société / L'Eglise : L'Eglise en France

“Un des facteurs majeurs de cette identité, c’est bien le christianisme”

Voici un long extrait de la contribution au débat sur l'identité nationale de Mgr Bagnard, évêque de Belley-Ars : 

Mgr bagnard "(…) Si l’on s’in­ter­roge sur l’iden­ti­té na­tio­nale, c’est que l’on ne sait plus ce que l’ex­pres­sion re­cou­vre exac­te­ment. La cause en est due d’abord à l’im­pact de l’Eu­rope sur no­tre pays ! En de­ve­nant mem­bres de l’Union Eu­ro­péenne, les fran­çais voient plus ou moins s’ef­fa­cer le sen­ti­ment de leur ap­par­te­nance à la Na­tion. De ce fait, la no­tion de na­tio­na­li­té, sans vrai­ment dis­pa­raî­tre, passe au se­cond plan. On se dit fa­ci­le­ment ci­toyen de l’Eu­rope et même par­fois, plus ra­di­ca­le­ment en­core, "ci­toyen du monde." Que de­vient alors le lien qui unit à son pro­pre pays ?
L’une des au­tres cau­ses qui en­toure d’un brouillard l’iden­ti­té na­tio­nale, c’est l’ar­ri­vée dans note pays d’un grand nom­bre d’ « étran­gers ». Un seul exem­ple : quand l’équipe de foot­ball qui dé­fend les cou­leurs de la France, se pré­sente avec une ma­jo­ri­té de joueurs d’ori­gine afri­caine dans ses rangs – ce qui n’est en rien cri­ti­qua­ble, bien en­ten­du ! – on se pose la ques­tion :"Que veut dire exac­te­ment l’ex­pres­sion : "équipe de France" ?
Or, c’est au mo­ment où se brouille la con­science de ce que l’on croyait être jus­qu’alors, que l’on s’in­ter­roge sur la réa­li­té de ce que l’on était vrai­ment ! Qu’est-ce qui fait que l’on est fran­çais ?

A n’en pas dou­ter, l’un des che­mins qui ou­vre à l’iden­ti­té na­tio­nale passe par l’his­toire. C’est dans l’hé­ri­tage reçu des siè­cles que se re­flète le vi­sage d’une na­tion (…)
Ain­si, comme évê­que de Bel­ley-Ars, je ne peux pas igno­rer que la pré­sence d’un évê­que, iden­ti­fiée avec cer­ti­tude par l’his­toire dans la Ville de Bel­ley, re­monte à l’an 412. Il s’ap­pe­lait Au­dax. L’Evê­que ac­tuel est le cen­tième d’une li­gnée qui en comp­te qua­tre-vingt-dis neuf avant lui. Ain­si, de­puis seize siè­cles, le chris­tia­nisme est pré­sent – de fa­çon or­ga­ni­sée – sur no­tre ré­gion. Com­ment, sur une aus­si lon­gue du­rée, l’Évan­gile n’au­rait-il pas fa­çon­né le com­por­te­ment de ses ha­bi­tants, leur mode de pen­sée, leur cul­ture, leur vi­sion de l’exis­tence ?
On peut dis­cu­ter sur le bien fon­dé de cet im­pact, mais on ne peut con­tes­ter les don­nées ob­jec­ti­ves de l’his­toire. Les tra­ces de cet hé­ri­tage sont là sous nos yeux. Il suf­fit de voir "ce long man­teau d’égli­ses et de ca­thé­dra­les qui re­cou­vre no­tre pays pour com­pren­dre que les va­leurs chré­tien­nes ont dû quand même y jouer un rôle", dé­cla­rait Ni­co­las Sar­ko­zy, le 13 dé­cem­bre 2007. Pour­quoi s’en ex­cu­ser ? Pour­quoi s’en dé­fen­dre puis­que nous som­mes tout sim­ple­ment de­vant une don­née de fait ?
La cul­ture is­sue de cette im­pré­gna­tion des siè­cles est si pro­fon­dé­ment en­ra­ci­née qu’elle est de­ve­nue comme une se­conde na­ture
 ; elle fait si bien corps avec cha­cun d’en­tre nous qu’elle a ce grave in­con­vé­nient de ne plus s’in­ter­ro­ger sur les ori­gi­nes où elle a pui­sé sa sève.
Jean-Paul II avait jus­te­ment osé dire au Bour­get, le 1er juin 1980 : "On sait la place que l’idée de li­ber­té, d’éga­li­té et de fra­ter­ni­té tient dans vo­tre cul­ture, dans vo­tre his­toire. Au fond, ce sont là des idées chré­tien­nes." S’in­ter­ro­ger sur l’iden­ti­té na­tio­nale, c’est donc re­trou­ver le che­min des ori­gi­nes et les as­su­mer comme un creu­set qui, au fil des siè­cles, a for­gé l’iden­ti­té de no­tre pays.
Cette in­ter­ro­ga­tion con­duit à re­con­naî­tre que l’un des fac­teurs ma­jeurs de cette iden­ti­té, c’est bien le chris­tia­nisme. Ni­co­las Sar­ko­zy avait dit au La­tran : "Les ra­ci­nes de la France sont es­sen­tiel­le­ment chré­tien­nes… Une na­tion qui ignore l’hé­ri­tage éthi­que, spi­ri­tuel, re­li­gieux, de son histoire com­met in crime con­tre sa cul­ture.. Ar­ra­cher la ra­cine, c’est per­dre la si­gni­fi­ca­tion, c’est af­fai­blir le ci­ment de l’iden­ti­té na­tio­nale et des­sé­cher da­van­tage en­core les rap­ports so­ciaux qui ont tant be­soin de sym­bo­les de mé­moire."
Il est vrai que le siè­cle des Lu­miè­res a con­tes­té cet hé­ri­tage, mais il en est res­té, mal­gré lui, pro­fon­dé­ment im­pré­gné. Le ca­dre men­tal dans le­quel il ex­pri­mait ses "idées nou­vel­les" con­ti­nuait à s’ali­men­ter sou­ter­rai­ne­ment à la Source qu’en sur­face il re­je­tait !
Sans ce ré­fé­ren­tiel fon­da­men­tal, il n’au­rait pas pu éla­bo­rer la Dé­cla­ra­tion uni­ver­selle des Droits de l’homme, dont l’un des prin­ci­pes fon­da­men­taux est le res­pect dû à tout être hu­main. Car tous les hom­mes sont égaux en di­gni­té. Cha­cun a donc le droit d’être re­con­nu pour lui-même, qu’il soit croyant, non croyant, li­bre pen­seur, etc…
Et jus­te­ment, l’es­prit de la laï­ci­té s’en­gage à ré­unir les con­di­tions per­met­tant aux croyants et aux in­croyants de vi­vre ensem­ble, la base de cette con­vi­via­li­té étant le res­pect de la con­science de cha­cun. Nous som­mes ty­pi­que­ment de­vant la ver­sion sé­cu­lière du mes­sage évan­gé­li­que !


Aus­si quand, sur l’ho­ri­zon qui nous est fa­mi­lier, sur­gis­sent d’au­tres cul­tu­res – is­sues d’au­tres re­li­gions – nous nous in­ter­ro­geons lé­gi­ti­me­ment sur leur com­pa­ti­bi­li­té avec no­tre pro­pre iden­ti­té na­tio­nale. Et c’est aus­si l’oc­ca­sion d’avoir une plus claire con­science de ce que veut dire être fran­çais. Au nom de cette iden­ti­té, nous in­ter­ro­geons l’Is­lam. Ac­cepte-t-il, dans les faits, la li­ber­té de con­science ? In­tè­gre-t-il, dans le champ so­cial, l’éga­li­té en­tre l’homme et la femme ? Le res­pect des con­scien­ces va-t-il jus­qu’à ac­cueillir le chan­ge­ment de re­li­gion sans crainte de re­pré­sailles ? Peut-on être tran­quil­le­ment adepte d’une au­tre re­li­gion dans un pays mu­sul­man ? Si la ré­ponse est "oui" pour tel pays, et "non" pour tel au­tre, alors y a-t-il un or­ga­nisme of­fi­ciel qui dé­fi­nit la juste pen­sée de l’Is­lam ? Où se trouve la vé­ri­ta­ble in­ter­pré­ta­tion ? Le Fran­çais a be­soin de le sa­voir au mo­ment où son pays ac­cueille cette cul­ture sur son ter­ri­toire et cela au nom de l’iden­ti­té na­tio­nale.
Car voi­ci, par exem­ple, ce que je lis sous la plume d’un Père Jé­suite égyp­tien, le Père Bou­lad, bon con­nais­seur de l’is­lam : "Quand un mu­sul­man me dit : l’is­lam est la re­li­gion de la to­lé­rance, je lui ré­ponds : par­mi les 57 pays mu­sul­mans de la pla­nète, cite m’en un seul où la li­ber­té re­li­gieuse existe. Si bien que le non-mu­sul­man n’a pas sa place. Il est to­lé­ré, tout juste, comme dhim­mi, mais à part ça, non. La to­lé­rance, pour l’is­lam, c’est que vous êtes to­lé­ré comme ci­toyen de deuxième zone en tant que chré­tien ou juif. Mais en de­hors de ça, si vous êtes boud­dhiste ou hin­douiste, vous n’êtes plus to­lé­ré. Vous êtes un ka­fir, c’est-à-dire car­ré­ment un apos­tat, un im­pie. […]"

N’est-ce pas le rap­pel de l’exi­gence d’un dia­lo­gue en vé­ri­té, au mo­ment où l’on s’in­ter­roge sur l’iden­ti­té na­tio­nale ? Et cette exi­gence dé­passe lar­ge­ment la dis­cus­sion sur la hau­teur des mi­na­rets, même si celle-ci est à pren­dre aus­si en con­si­dé­ra­tion."

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11 commentaires

  1. Merci, Mgr Bagnard, votre démonstration est exemplaire et courageuse dans la société actuelle.

  2. Magnifique texte – Excellente chose d’avoir fait parler le père Boulad – Dommage que le texte du Latran prononcé par le président Sarkozy, pourtant très inspiré et très prometteur, n’ait été qu’un beau texte!
    Espérons que les laïcistes pourront s’imprégner de ces éléments qui nous semblent si évident comme dit le père évêque que nous avons oublié de les défendre.
    Encore merci Msg Bagnard pour une si belle contribution au débat sur l’identité nationale

  3. Enfin un discours cohérent de la part d’un évêque qui ne mâche pas ses mots…

  4. Oui, mais sur l’équipe de France, je ne suis pas d’accord.
    Les chrétiens de Gaule ne se sont pas posés tant de questions quand ils ont vu débarquer en Gaule des évêques nord-africains, d’Europe de l’Est, des évêques d’origine juives, comme Saint Lazare, etc.

  5. Merci Mgr!!! Si seulement tous les évêques étaient comme lui……

  6. Ce qui fait problème, ce n’est pas l’immigration: il y a toujours eu des immigrés en France. Ce qui fait problème, c’est l’immigration issue du monde musulman. Et la racine de ce problème, c’est un livre: le Coran. En se référant au Coran, en effet, on peut justifier tout et le contraire de tout: le respect et l’amour, mais aussi la haine et la violence. Or jusqu’à présent on n’a pas entendu un seul homme politique s’interroger sur le bien-fondé du Coran; on n’a pas davantage entendu une autorité musulmane prôner une exégèse du Coran. Et pour cause: l’islam ne reconnaît aucune autorité pouvant parler au nom de tous les musulmans et interdit l’exégèse du texte coranique. On n’est donc pas sortis de l’auberge et toutes les discussions sur le voile ou le minaret demeurent en marge du vrai problème qui est celui de l’acceptation ou du rejet de certaines sourates.

  7. Bravo et meci Monseigneur

  8. Pour Pol
    Si vous faites référence aux premiers temps du Christianisme je crois que nous étions tous d’Est en Ouest et du Nord au Sud dans l’empire romain. Et le message évangélique des évêques n’étaient pas exactement celui actuel des jeux du stade!
    Ces évêques d’ailleurs ont été à l’origine de bien des questions de la part de ceux qui les entendirent pour la première fois, bien plus de questions que n’en pourra faire jamais poser une équipe de France de foot. Raison gardons même aux niveaux des comparaisons!
    Mais je ne voudrais pas insister pour ne pas susciter une polémique. Ce serait dommage par rapport au texte juste et beau de msg Bagnard.

  9. Très beau texte, sera-t-il entendu ?

  10. M. D. CROUAN :
    le coran? Certes. Mais les valeurs essentielles qui font notre pays et notre cullture sont ingnorées, baffouées, niées, ridiculisées, contestées par de farouches adversaires depuis bien longtemps. Voltaire déjà et tous ses compagnons “lumineux” et leurs nombreux héritiers jusqu’à certains de nos dirigeants d’aujourd’hui…
    Or la perte de ces valeurs remplacées par de non-valeurs est aussi la cause interne de notre déchéance par perte des anticorps naturels que nous donnait collectivement le christianisme et le culte du père.
    Oh, certes aussi, ce ne sont pas 250 ans de turpitudes qui changent l’âme d’un peuple et il en est, me direz-vous, qui n’ont toujours pas consenti à dipsaraître comme les Chinois, les Japonnais ou les Russes.
    Et puis le petit coups de semonce du référundum suisse a fait ressurgir les limites de fracture naturelle entre ce qui est autre et ce qui est nôtre. Nous le voyons trop dans cette arnaque de “débat” sur l’identité nationale.
    Mais l’immigration dans l’histoire est un mythe sinon un mensonge tel qu’on voudrait nous le faire avaler.
    La réalité, c’est que désormais la France est littéralement en voie d’être dévisagée par le fait même d’une immigration qui ne voudra jamais avoir le visage que la France lui propose, chose indédite dans notre histoire malgré les 7 grandes “familles” qui la fondent.
    Et ça, les ennemis de la France le savent mieux que semblent le
    Cordialement
    Ethos

  11. Il faut dire aussi que lorsque l’on a cessé de clamer haut et fort et ce depuis Vatican II qu’il n’y a qu’une seule Vérité , un seul vrai Dieu c’est Jésus Christ et que nous chrétiens nous ne sommes pas dignes de défaire la laniére de ses sandales, la confusion dans les esprits régnera.
    On a cru beatement, et l’on continue encore pour certains, que toutes les religions se valent.Pourtant dans l’evangile il nous est demandé d’annoncer la bonne nouvelle .A l’époque des apotres la confrontation avec d’autres religions existait déjà et les conséquences etaient toutes autres car elles pouvaient mettre la vie en jeu dans le meilleur des cas ou alors avec tortures si vous tombiez sur un procureur intraitable.
    Aussi tant que le chrétien ne retrouvera pas le sentiment d’appartenir à l’ Eglise qui est la Voie la Verité et la Vie ,ce désordre permanent dans la société perdurera et l’on ne pourra pas avoir assez de recul pour la rencontre avec d’autres religions.

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