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L'Eglise : Benoît XVI

Une morale sans Dieu est-elle possible ?

Non, selon Jean-Baptiste Donnier, professeur à la Faculté de Droit d’Aix-en-Provence, qui reprend les propos de Benoît XVI :

"Dans un discours prononcé devant le clergé du diocèse d’Aoste le 25 juillet 2005, le pape Benoît XVI s’est livré à une réflexion d’une importance capitale. Après avoir rappelé qu’à ‘l’époque où la foi était divisé entre catholiques et protestants, on pensa qu’il fallait conserver les valeurs morales communes en leur donnant un fondement suffisant (…) de façon à ce qu’elles existent “etsi Deus non daretur”, le pape constante qu’aujourd’hui “la situation est inversée”, car les valeurs morales ne sont plus évidentes”; elles “ne deviennent évidentes que si Dieu existe”.
La tentative de fonder des droits naturels de l’homme sur l’hypothèse de l’inexistence de Dieu a échoué. D’où la suggestion du Saint-Père, adressée aux représentants de l’agnosticisme contemporain, de réfléchir sur le point de savoir si, “pour eux”, ce n’est pas le contraire de l’hypothèse de Grotius [fonder les droits de l’homme et les valeurs communes aux croyants et aux non croyants sur hypothèse de l’inexistence de Dieu] qui devient valable aujourd’hui pour fonder une morale commune et des droits naturels de l’homme dotés d’une véritable consistance.
Et Benoît XVI de conclure : “nous devons vivre ‘quasi Deus daretur’, même si nous n’avons pas la force de croire, nous devons vivre sur cette hypothèse, autrement, le monde ne fonctionne pas”.

Michel Janva

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4 commentaires

  1. Sur le même sujet, voici quelques paragraphes de “Mit Brennender Sorge”, encyclique vieille de 70 ans mais toujours très actuelle :
    “Morale et ordre moral
    Sur la foi en Dieu, gardée intacte et sans tache, repose la moralité de l’humanité. Toutes les tentatives pour ôter à la morale et à l’ordre moral le fondement, solide comme le roc, de la foi et pour les établir sur le sable mouvant des règles humaines, conduisent tôt ou tard individus et sociétés à la ruine morale. L’insensé qui dit dans son coeur : Il n’y a pas de Dieu, marchera dans les voies de la corruption morale (Ps., XIII, 1 sq.). Le nombre de ces insensés, qui aujourd’hui entreprennent de séparer Moralité et Religion, est devenu légion. Ils ne voient pas ou ne veulent pas
    voir que bannir le Christianisme confessionnel, c’est-à-dire la conception claire et précise du Christianisme, de l’enseignement et de l’éducation, de l’organisation de la vie sociale et publique, c’est aller à l’appauvrissement spirituel et à la décadence. Aucune puissance coercitive de l’État, aucun idéal purement humain, si noble et si élevé soit-il en lui-même, ne sera jamais capable de remplacer en fin de compte les suprêmes et décisives impulsions que donne la foi en Dieu et au Christ. Si, à celui qui est appelé à faire les plus grands sacrifices, à immoler son « moi » au bien commun, on ôte l’appui de l’éternel et du divin, la foi réconfortante et consolante au Dieu qui récompense tout bien et punit tout mal, alors, pour un grand nombre, le résultat final sera, non pas l’acceptation du devoir, mais la fuite devant lui. La consciencieuse observation des dix commandements de Dieu et des préceptes de l’Église (qui ne sont, eux, que des déterminations pratiques des règles de l’Évangile) est pour chaque individu une incomparable école de discipline individuelle, d’éducation morale et de formation du caractère, une école qui exige beaucoup, mais pas trop. Le Dieu plein de bonté, qui, comme législateur, dit : « Tu dois », donne aussi par Sa grâce « le pouvoir et le faire ». Laisser inutilisées des forces de formation morale d’une efficacité aussi profonde, les exclure même positivement de l’éducation du peuple, c’est contribuer d’une façon injustifiable à la sous-alimentation religieuse de la nation. Livrer la morale à l’opinion subjective des hommes, qui change suivant les fluctuations des temps, au lieu de l’ancrer dans la sainte volonté du Dieu éternel et dans ses commandements, c’est ouvrir la porte toute grande aux forces destructrices. L’abandon, qui en résulte, des éternels principes d’une morale objective, pour l’éducation des consciences, pour l’ennoblissement de tous les domaines et de toutes les organisations de la vie, c’est un péché contre l’avenir du peuple, un péché dont les générations futures devront goûter les fruits amers.
    Reconnaissance du droit naturel
    Tel est le fatal entraînement de nos temps, qu’il détache du fondement divin de la Révélation, non seulement la morale, mais aussi le droit théorique et pratique. Nous pensons ici en particulier à ce qu’on appelle le droit naturel, inscrit de la main même du Créateur sur les tables du coeur humain (Rom., II, 14 sq) et que la saine raison peut y lire quand elle n’est pas aveuglée par le péché et la passion. C’est d’après les commandements de ce droit de nature, que tout droit positif, de quelque législateur qu’il vienne, peut être apprécié dans son contenu moral et, par là même, dans l’autorité qu’il a d’obliger en conscience. Des lois humaines qui sont en contradiction insoluble avec le droit naturel sont marquées d’un vice originel qu’aucune contrainte, aucun déploiement extérieur de puissance ne peut guérir. C’est à la lumière de ce principe qu’il faut juger l’axiome : « Le droit, c’est l’utilité du peuple. » On peut, certes, donner à cette proposition un sens correct, si on lui fait dire que ce qui est moralement défendu ne peut jamais servir au véritable bien du peuple. Cependant, le paganisme ancien reconnaissait déjà que l’axiome, pour être pleinement exact, doit être, en réalité, retourné, et s’exprimer ainsi : « Il est impossible qu’une chose soit utile si elle n’est pas en même temps moralement bonne. Et ce n’est point parce qu’elle est utile qu’elle est moralement bonne, mais parce qu’elle est moralement bonne elle est utile. » (Cicéron, De officiis, III, 30.) Affranchi de cette règle morale, ce principe signifierait, dans la vie internationale, l’état de guerre perpétuel entre les différentes nations. Dans la vie nationale, il méconnaît, par l’amalgame qu’il fait des considérations de droit et d’utilité, le fait fondamental, que l’homme, en tant que personne, possède des droits qu’il tient de Dieu et qui doivent demeurer vis-à-vis de la collectivité hors de toute atteinte qui tendrait à les nier, à les abolir ou à les négliger.
    Mépriser cette vérité, c’est oublier que le véritable bien commun est déterminé et reconnu, en dernière analyse, par la nature de l’homme, qui équilibre harmonieusement droits personnels et obligations sociales, et par le but de la société, déterminé aussi par cette même nature humaine. La société est voulue par le Créateur comme le moyen d’amener à leur plein développement les dispositions individuelles et les avantages sociaux que chacun, donnant et recevant tour à tour, doit faire valoir pour son bien et celui des autres. Quant aux valeurs plus générales et plus hautes, que seule la collectivité, et non plus les individuels isolés, peut réaliser, elles aussi en définitive sont, par le Créateur, voulues pour l’homme, pour son plein épanouissement naturel et surnaturel et l’achèvement de sa perfection. S’écarter de cet ordre, c’est ébranler les colonnes sur lesquelles repose la société, et donc compromettre la tranquillité, la sécurité et l’existence même de la société.
    Le croyant a un droit inaliénable à professer sa foi et à la vivre comme elle veut être vécue. Des lois qui étouffent ou rendent difficile la profession et la pratique de cette foi sont en contradiction avec le droit naturel.
    Des parents sérieux, conscients de leur devoir d’éducateurs, ont un droit primordial à régler l’éducation des enfants que Dieu leur a donnés, dans l’esprit de leur foi, en accord avec ses principes et ses prescriptions. Des lois ou d’autres mesures qui éliminent dans les questions scolaires cette libre volonté des parents, fondée sur le Droit Naturel ou qui la rendent inefficace par la menace ou la contrainte, sont en contradiction avec le Droit Naturel et sont foncièrement immorales. ”

  2. je serai plus court que marie la bretonne. C’est impossible !

  3. La conclusion de Sa Sainteté est intéressante, mais est biaisée par sa mauvaise perception de l’athéisme. Dès lors que Dieu n’existe pas, quelle importance y a-t-il à ce que le monde fonctionne ou non ?
    [C’est bien là le problème : depuis Grotius, les tenants du respect des droits de l’homme sans Dieu ont échoué à faire fonctionner un monde respectueux des droits de l’homme -ce qui était pourtant ouvertement leur but. C’est pourquoi il faut changer de base et admettre comme Pascal, l’hypothèse que Dieu existe, même sans y croire, pour fonder les droits de l’homme. MJ]

  4. Merci et bravo à Marie de nous remettre sous les yeux ces passages de Pie XI, si profonds.
    A athéé de passage, vous avez raison, mais cela prouve que l’athéisme est folie, car il importe évidemment que le monde “fonctionne”. “Si Dieu n’existe pas, tout est permis”, puis-je ajouter, “cela prouve qu’Il existe”.
    Il paraît que dans l’entre-deux-guerre un individu avait écrit un livre pour exprimer sa croyance en la nécessité de l’enfer. Son raisonnement était : on voit de la basse crapule coomblées d’honneur finir ses jours paisiblement dans son lit, toujours comblée d’honneur. Il est donc nécessaire qu’il y ait un Dieu, une vie éternelle et un chatiment proportionné, donc un enfer. Cela vaut, ce que cela vaut ; a mon avis cependant, c’est un des aspects sous lequel on peut voir la vie et la destinée humaine.

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