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Europe : politique

UE : divergences entre eurosceptiques

Jean-Yves Camus analyse les différences entre "eurosceptiques" :

"l'euroscepticisme s'il est omniprésent en Europe est loin d'être homogène: il y a ceux qui veulent sortir de l'UE (UKIP et FN), ceux qui veulent des coopérations bilatérales ou une Europe des Nations. Il y a un camp eurosceptique à l'intérieur même des grands partis qui composent le PPE: à l'UMP (avec les positions exprimées par Guaino et Wauquiez) ou dans la CSU en Allemagne. Il y a aussi un certain nombre d'eurosceptiques de gauche (notamment en France et en Grèce).

Qu'y a-t-il de commun entre une Marine Le Pen, un Nigel Farage (chef du Parti pour l'indépendance du Royaume-Uni UKIP ) un Geert Wilders (fondateur du PVV néerlandais) ou un Viktor Orbán (Premier ministre hongrois)? Quelles sont les principales caractéristiques des différents populisme européen?

On ne peut pas dire qu'il y ait beaucoup de points communs entre l'autocrate Viktor Orban et le libéral Nigel Farage. A part peut être une certaine conception de l'Etat-nation et le refus de la primauté d'instances supranationales quelles qu'elles soient. A ce titre, le point commun des populismes européens c'est justement l'euroscepticisme (l'inverse n'étant pas vrai).

Le populisme est un style de gouvernement indistinctement de droite ou de gauche qui repose sur l'idée qu'il existerait un bon sens naturel du peuple qui s'opposerait au gouvernement des élites/élus, nécessairement dévoyées et corrompues, appartenant à une «caste» ou à un «système». Le populisme consiste à partir du principe que le peuple a toujours raison, qu'il a la prescience absolue de ses intérêts. Le populisme c'est le refus de la médiation, l'idée que l'élite mondialisée complexifie à dessein une réalité pourtant simple. Que les institutions et la démocratie représentative sont des obstacles à un «décisionnisme» qui reposerait sur le bon sens populaire. Que tous les problèmes ont une seule et même origine: l'Europe, l'élite, la mondialisation, et qu'il est très simple d'y remédier. Le populisme essaie de faire passer pour simples des solutions en réalité complexes, comme la sortie de l'euro par exemple.

Le mot «populisme» a aussi pris une connotation péjorative et est utilisé pour discréditer toute politique alternative…

Oui, le mot «populisme» est utilisé abusivement de manière péjorative par ceux qui pensent que le peuple doit être maintenu à distance, et que les grandes décisions doivent être prises par la technostructure qui connaitrait mieux l'intérêt général qu'un peuple soit-disant peu éduqué et volatile. Ces deux usages du populisme sont également dangereux: le peuple n'est ni intrinsèquement bon, ni intrinsèquement mauvais, il faut trouver un équilibre.

La montée des populismes est-elle simplement le revers de la crise ou bien traduit-elle selon vous une angoisse identitaire plus profonde?

La crise est un facteur aggravant mais pas déterminant. Il y a des pays peu touchés par la crise où les partis populistes sont très présents comme la Norvège (Parti du Progrès) ou la Suisse (UDC). A l'inverse il y a des pays où la crise est très forte qui ne connaissent pas de montée du populisme, comme le Portugal ou l'Irlande.

On peut dégager deux facteurs principaux de la montée des populismes. D'abord, un aspect culturel: la question identitaire, devenue préoccupante en Europe pour ceux qui s'inquiètent de l'élargissement infini d'une part et de l'immigration d'autre part. L'Islam, la possible entrée de la Turquie, l'absence de frontières et la société multiculturelle sont autant de phénomènes contribuant à un sentiment d'insécurité culturelle.

Ensuite, il existe aussi un sentiment d'insécurité sociale, qui ne se manifeste pas forcément à travers la crise récente, mais à travers le sentiment plus général d'une forme de déclassement, de révision à la baisse du modèle social européen depuis la fin des Trente Glorieuses. Certes, les «perdants de la mondialisation» alimentent le populisme, mais aussi une certaine classe moyenne qui se sent dans une forme d'insécurité économique: précarité de l'emploi, instabilité, obsolescence trop rapide des compétences professionnelles, etc…

Ne pourrait-on pas voir dans cette montée des populismes une forme de chance pour l'Europe, une manière pour les peuples de se réapproprier l'espace démocratique?

La montée des populismes a le mérite de mettre l'Europe au pied du mur. Elle traduit une forme de révolte des peuples contre le fameux slogan de Thatcher «There Is No Alternative» (TINA). La question véritable que doivent se poser tous les leaders européens et celle-ci: quelle alternative possible en Europe? Je crois que de nombreuses pistes de réformes sont possibles: fédéralisme fondé sur le principe de subsidiarité ; projet culturel qui précède le projet économique, contrôle des instances non élues par le Parlement, instauration de règles de mieux-disant social. C'est une question de volonté."

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6 commentaires

  1. Charabia pontifiant d’un soi disant “spécialiste” qui s’écoute parler !
    Le but recherché est de brouiller les esprits et de tenter de faire passer pour complexes des choses qui ne le sont pas tout en faisant croire que ce serait des simplets qui pensent le contraire.
    Même procédé pour laisser croire que “l’élite” (qui n’en est pas une…) ne serait pas totalement corrompue…
    Une démarche pour semer le doute qui ne vient en AUCUN CAS d’un enfant de chœur !
    Rien qu’à cet article vous pouvez lui refuser la communion et l’absolution… Notez que cela tombe bien puisqu’il n’est plus catholique…

  2. J’en ai assez de me faire traiter d’eurosceptique par des eurofanatiques : je suis euro-lucide.

  3. Personnellement, je trouve cet article intéressant, car l’auteur nous montre qu’il y a deux camps pour les prochaines élections, même si ceux-ci sont traversés de “courants” :
    -Le camp des “plus d’UE”
    Ceux-ci ne sont pas satisfaits de l’UE actuelle et prônent toute sorte de “solutions” destinées à juguler l’insatisfaction croissante :
    -le fédéralisme : des instances européennes démocratiques. Un Président de l’UE élu par ex, un PE ayant l’initiative législative, etc. EELV, Modem sont dans une telle voie.
    -le centralisme : l’UE centralise les pouvoirs au détriment des “pouvoirs féodaux” des Etats membres…Mais avec leur consentement. (Car cela permet un discours d’impuissance (la “contrainte européenne”) et d’irresponsabilité. UMP et Nouveau Centre sont partisans d’une telle chose.
    -le cul entre deux chaises : ils ont l’espoir d’une UE fédérale ou centralisatrice et pense que tout pas “européen” peut permettre d’y accéder. PS et NPA sont dans cette optique.
    Tous se retrouvent sur l’idée qu’il faut “plus d’UE” pour arriver à quelque chose.
    -Le camp des “moins d’UE”
    La sortie de l’euro mais le maintien dans l’UE : ils souhaitent pouvoir changer l’UE de l’intérieur, notamment en renégociant les traités et en faisant sortir la France de l’euro. Plutôt NDA ou FN.
    L’isolationnisme : ils entendent mettre fin à tout relation avec l’UE et prônent un recentrage vers les pays francophones et des traités bilatéraux. Du genre UPR.
    Le bilatéralisme : ils souhaitent négocier la sortie de l’UE de la France, tout en signant des bilatérales avec l’UE. Bref, faire un accord style traité TAFTA avec l’UE. Plutôt genre Philippe de Villiers.
    Bref, les “solutions” sont multiples et (de toute évidence) pas encore très solides, que ce soit du coté des “plus d’UE” ou des “moins d’UE”.

  4. Je ne sais pourquoi on utilise la phrase de Thatcher “There is no alternative” comme représentant une position inconditionnellement pro-Européenne car la dame de fer savait y faire avec l’Europe et on ferait mieux de se rappeler de cette autre phrase de Thatcher “I want my money back”, ce qu’elle a obtenu par divers remboursements de l’Europe.

  5. Que l’auteur de cet article soit ou non catholique, ne l’empêche pas d’effectuer une analyse pertinente sur le sujet. Oui, objectivement, les “eurosceptiques” constituent une nébuleuse .Oui, objectivement, cette UE actuelle est illisible, donc inquiétante pour la plupart des citoyens qui y vivent.Oui, les populismes ont un sens et les politiciens de Bruxelles ne devraient pas les balayer d’un revers de main méprisant….

  6. Il y a aussi l’UPR qui veut sortir de l’U. E. ! Pourquoi ne pas le dire ?

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