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France : Société

Tu ne gagneras plus ton pain à la sueur de ton front

Tu ne gagneras plus ton pain à la sueur de ton front

De Benoît Dumoulin dans L’Incorrect :

Avant d’être une question matérielle de pouvoir d’achat, pouvoir vivre du fruit de son travail est une question de dignité. Qu’est-ce qui l’en empêche aujourd’hui ? Trois choses, à notre avis.

La première, c’est l’éclatement de la famille et la multiplication des mères célibataires peu qualifiées. Avec deux SMIC, il est possible de faire vivre une famille même modestement. Mais lorsqu’une femme, qui a fait peu d’études et a eu rapidement des enfants, se retrouve célibataire quelques années plus tard avec plusieurs enfants à charge, elle est dans une situation de précarité objective qui lui interdit souvent de faire face aux difficultés de la vie.

La deuxième cause réside dans une politique d’écrasement des prix au bénéfice du consommateur mais au détriment du producteur. Un agriculteur, contraint par les grandes surfaces de vendre à perte, se voit subventionné en retour par le contribuable. Cette situation est doublement injuste : pour le contribuable qui finance ce qu’on ne veut pas faire payer au consommateur (sachant qu’un Français sur deux ne paie pas d’impôt sur le revenu), et pour l’agriculteur qui se retrouve indignement stipendié par l’État.

Contre une telle logique liée à la mondialisation et au principe de libre-concurrence posé par l’Union européenne, il faudrait instaurer un protectionnisme éthique à l’encontre des produits réalisés par des pays qui ne respectent pas la dignité de leurs travailleurs. Cela est vrai pour l’alimentation mais aussi pour l’industrie textile. Toutes les enquêtes d’opinion le montrent, nos concitoyens sont prêts à payer un peu plus cher pour acheter français, surtout si on leur explique qu’ils favorisent ainsi le maintien d’une industrie et d’un savoir-faire artisanal dans notre pays.

On peut étendre le raisonnement aux industries de pointe et instaurer alors un protectionnisme stratégique. Pendant des décennies, l’innovation technologique était le monopole des Occidentaux, qui bénéficiaient ainsi d’un avantage concurrentiel irremplaçable sur les pays émergents. Mais, depuis que ceux-ci ont conditionné l’achat de nos produits à des transferts massifs de technologie, nous ne pouvons plus nous permettre de ne pas protéger nos marchés. Si, par exemple, on continue à vouloir empêcher la fusion entre Alstom et Siemens au nom de la dogme de la libre-concurrence, comme l’a récemment fait la Commission européenne, on se prive de toute possibilité de pouvoir rivaliser, à terme, avec nos concurrents chinois ou indiens sur qui nous n’avons plus d’avantage concurrentiel. Nous n’aurons alors plus aucun moyen d’enrayer le spectre des délocalisations qui paupérisent nos territoires sinon en comprimant les coûts de telle sorte que la dignité des travailleurs en pâtira.

La troisième cause, c’est la taxation disproportionnée du travail. Avec un niveau de prélèvements obligatoires représentant 48,4% du PIB en 2017 selon Eurostat, la France est en tête du palmarès européen, devant le Danemark, pourtant connu pour son haut niveau d’imposition. C’est 8 points de plus que la moyenne européenne, ce qui veut dire que nos entreprises, sur qui repose en grande partie cet effort, pâtissent d’un handicap structurel à rapport à leurs voisines européennes. Les travailleurs indépendants le savent, qui voient souvent confisquée en impôts ou taxes plus de la moitié de la richesse produite. Si l’on ajoute à cela la multiplication des normes en tout genre qui renchérissent le coût du travail, les taxes sur la consommation (TVA, essence) et celles sur les successions en ligne directe – pour lesquelles la France détient aussi le triste record européen, il devient impossible de vivre dignement du fruit de son travail.

S’il voulait réellement résoudre la crise des Gilets jaunes, le gouvernement devrait protéger la famille, instaurer un protectionnisme éthique et stratégique ainsi que baisser le niveau général d’imposition tout en maintenant un niveau élevé de protection sociale, ce qui suppose d’améliorer la productivité de nos services publics par la chasse aux gaspillages publics.

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2 commentaires

  1. Mais le gouvernement n’a pas l’intention de résoudre la crise qu’il provoque sciemment.

    Si on ne peut pas imposer les méthodes communistes du collectivisme on le fait sournoisement en supprimant l’indépendance financière et en faisant de chaque citoyen un assisté qui vit par l’argent de l’état.

    Les agriculteurs vivent des aides de l’état et les médecins aussi, ils rejoignent donc avec les chômeurs les rangs de la fonction publique.

  2. “baisser le niveau général d’imposition”: mais vous n’y pensez pas! ce serait bien trop injuste … ceuux qui ne paient pas d’impôts n’en bénéficieraient pas.

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