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France : Politique en France

S’engager en politique, un devoir pour les catholiques

Un lecteur nous propose ce compte-rendu de l'université d'été du diocèse de Fréjus-Toulon, sous le thème, "s'engager en politique". Extraits :

"[C]ette première université nous a permis, à l'ombre de Sainte Marie Madeleine, apôtre des apôtres, d'approfondir le sens et l'enjeu d'une action politique spécifiquement catholique, dans le respect de la distinction du temporel et du spirituel. Les interventions nombreuses de personnalités engagées à divers titres (juriste, religieux, conseiller en communication, président d'association, écrivain, maire, député, etc.) nous ont ouvert des perspectives sur le sens et les enjeux de la mission historique des laïcs chrétiens dans nos sociétés sécularisées : « animer chrétiennement l'ordre temporel », en promouvant l'enseignement social de l'Eglise. […]

Le diagnostic est sévère : malgré quelques initiatives encourageantes, les catholiques n'existent pas encore en politique, dans la mesure où ils manquent gravement de visibilité et d'efficacité. A force de ne pas savoir où ils sont (à gauche ? à droite ?  au centre ?), ils ne sont nulle part, incapables de se penser au-delà des clivages qu'on leur impose. Sans volonté politique, les catholiques sont aussi évanescents que les sondages qui les parquent dans telle ou telle cage. Le problème n'est pas nouveau, Montalembert s'écriait déjà en 1846 : « Soyez seulement un fait, au lieu d'être une ombre, un bruit ou une ruine ! ». Trop longtemps les laïcs catholiques en France ont renoncé à assumer leur charge, à être le sel de la terre et la lumière du monde, déléguant frileusement leurs responsabilités temporelles à de bien médiocres alliés (au nom d'un illusoire moindre mal), parfois même à leurs adversaires les plus directs (que la pente est douce du compromis à la compromission…). Or,  c'est bien connu : quand les dégoûtés s'en vont, ne reste que les dégoûtants ! C'est ainsi que, faute d'opposants solides, faute de structures catholiques opératoires, crédibles, organisées en réseaux efficaces, l'anti-culture de mort a pu progresser insidieusement dans les consciences et dans les lois, imposant en douce sa violence transgressive. […] les minorités agissantes sont plus efficaces que les majorités silencieuses dans notre démocratie d'influence. Or, les catholiques français sont encore aujourd'hui une minorité silencieuse, persuadée de n'avoir pas le droit, parce que catholique, de prendre la parole publiquement dans notre république laïque. […]

Urgence de la professionnalisation des mouvements qui promeuvent la pensée sociale de l’Église, notamment dans le domaine de la communication : si tout engagement catholique doit être vécu dans la prière et se faire dans la conscience de nos propres limites, si on ne changera rien sans le secours de la sainte Providence, on ne peut se contenter d'attendre et d'espérer qu'elle supplée à nos défaillances ! A cet égard, le happening de l'ADV contre l'euthanasie de janvier 2011 est sans doute un bel exemple d'action politique réussie. Il s'agit d'abord de viser non pas la masse mais l'efficacité : faire apparaître aux responsables un problème politique, c'est-à-dire une contradiction à résoudre de toute urgence. Pour cela, il faut proposer une analyse précise (plutôt que geindre ou crier), apporter des solutions efficaces et réalistes, et enfin, trouver des points d'appui dans l'opinion à travers un réseau dense et varié, capable de fédérer des alliés utiles. […]

Réalisme face à la réalité médiatique : si la politique est un lieu de combat, parfois violent, il ne faut pas fantasmer la malveillance des médias et des responsables politiques qui pour la plupart sont plus indifférents qu'hostiles. Nous sommes les premiers, sinon les seuls, responsables de notre impuissance politique. Dans la mesure où les médias cherchent de plus en plus le clash, la radicalité paie : c'est pourquoi on gagne à assumer sa foi catholique de manière décomplexée – et intelligente.

Investissement de l'ensemble de la communauté politique pour la refonder sur des bases plus saines : "Les fidèles laïcs ne peuvent absolument pas renoncer à la participation à la ‘politique’, à savoir à l’action multiforme, économique, sociale, législative, administrative, culturelle, qui a pour but de promouvoir, organiquement et par les institutions, le bien commun" (JP II, Christifideles laici, 1988). L'engagement politique ne se résume en effet pas aux échéances électorales : outre la pratique quotidienne de la vie chrétienne, l'engagement associatif et intellectuel, la création artistique, de nombreuses sphères d'influence et de décision restent insuffisamment investies par les catholiques : mandats locaux, évidemment, mais aussi postes de conseillers ou d'assistants parlementaires, etc. […] Laissons le bon vieux Montalembert nous exhorter encore :

Volontiers les catholiques blâment le pouvoir et critiquent le Gouvernement. Mais pour avoir le droit de blâmer et de critiquer, il faut être soi-même à l'abri de tout reproche. […] Trois ou quatre d'entre vous ont combattu pour tous ; vous les avez regardés faire, comme si ce n'était pas de vous qu'il s'agissait ; et vous avez recommencé à blâmer, à censurer, à critiquer, en ayant soin de vous dérober, je ne dis pas seulement à tout danger, mais à toute peine, à toute gêne, à tout sacrifice. (« Du devoir des catholiques dans les élections », 1846)."

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10 commentaires

  1. [Commentaire typique : “c’est la faute des autres, aux papes, aux évêques, aux chefs, aux Français…” Nous ne sommes pas rendus avec des réflexion de ce genre. MJ]

  2. Un premier pas serait que les catholiques soutiennent les associations qui participent à tout ce qui touche à la vie quotidienne, premier niveau de la vie politique, comme les Associations Familiales Catholiques, et qui se font entendre au sein de l’UDAF dans chaque département. Ce n’est peut être pas grand chose mais c’est un premier pas car l’UDAF est un lieu d’échanges où les catholiques, nommés ou élus, siègent et parlent en tant que tels ! Pour en avoir fait l’expérience dans plusieurs départements les prises de positions, si elles doivent toujours être bien argumentées, sont dans la plupart des cas écoutées avec bienveillance (même s’il faut parfois accepter avec un peu d’humour quelques remarques plus ironiques que méchantes) et les discussions permettent souvent de faire avancer la bonne cause. Voilà, me semble-t-il, une première et modeste réponse à ce que souhaite le Pape Jean-Paul II dans Christifideles laici que vous citez.

  3. Merveilleuse coïncidence – ce jour est le dies natalis ( jour anniversaire de sa mort le 4 septembre 1963 ) de Robert Schuman. Et j’incluais précisément dans le courriel destiné à ceux qui prient pour sa béatification exactement le même extrait de ‘Christi fideles laici’.
    Que les lecteurs se penchent donc sur la vie de Robert Schuman et ils découvriront un politique catholique moderne, à la fois professionnel dans sa communication et pêtri de l’Evangile et de la prière d’oraison.
    Dans certains milieux ( même catholiques ) il ne fait pas l’unanimité.. Mais c’est là que réside également le gros problème des catholiques français : ils ne peuvent s’unir sur l’essentiel. Ils ne cessent de juger ou dénigrer son frère/soeur dans la Foi si ce dernier ne pense ou n’agit pas exactement comme soi.
    Si l’Union Européenne n’est plus fidèle à ses racines chrétiennes et à l’esprit de ses fondateurs .. Ce n’est certes pas à cause du Christ, des papes ou des pères fondateurs .. C’est bien à cause de la faiblesse des catholiques ( notamment français ) en politique depuis 50 ans.

  4. Qu’il soit permis à l’auteur de cet article d’inviter les jeunes catholiques lyonnais désireux de se former pour agir à entrer en contact avec nous : [email protected].
    Nous lançons en effet à Lyon ALTERNATIVE CATHOLIQUE – « Catholique d’abord, catholique partout » – association qui se donne pour vocation l’évangélisation politique : “pour que la politique ne se fasse plus sans les catholiques” et “pour que les catholiques ne fassent plus sans la politique”.
    Formation prévue au sein du Collège supérieur de JN Dumont.
    Projet soutenu notamment par Mgr Rey !

  5. S’engager en politique? Mais c’est déjà fait!

  6. @ MJ
    Je ne sais ce qu’a écrit @ Cadoudal.
    Mais votre remarque me semble frappée au coin du bon sens : inutile d’accuser les ”autres”, car nous catholiques nous ne ”franchissons le pas” de l’engagement politique que très rarement .
    Le grand problème de beaucoup de catholiques cadres de la vie sociale et professionnelle, est qu’ils refusent tout risque et donc tout engagement, parce que l’esprit de sacrifice ne va pas ”jusque là”. Quand le prochain s’engage en politique, on le regarde souvent avec une certaine commisération : il n’est pas dans le ”bon” parti (notion variable selon les moments et milieux catholiques), il se ”marginalise”, devient ”compromettant” à fréquenter, il se ”flingue socialement” ….
    A certains cathos qui condamnent tout et tous en permanence et qui rejettent tout ce qui vient du FN, ou d’autres partis (MPF ou C. BOUTIN), pour ”manque de catholicisme” ou incomplétude programmatique sur certains points secondaires je dis : adhérez, et défendez dans les partis, FN, MPF, C. BOUTIN ou autres si vous le préférez, les PNN, la loi naturelle, aillez au feu, participez aux instances locales et autres de ces partis, voyez vos noms et photos sur des affiches électorales et professions de foi au coin de votre rue, acceptez d’être connus pour VOS idées (celles dont vous faites le fondement de vos condamnations et excommunications privés) et assumez TOUS les risques, dont celui le plus à craindre, qui touche à la réputation, position sociale, etc….. “Si par malheur, j’étais dans le camp qui perd, ou celui qui est diabolisé (oh paradoxes pour un catholique!), de quoi aurais-je l’air ?”. Je vous réponds : ”Sous ces deux angles là, un peu à Notre Seigneur, peut-être ?”
    Déjà MONTALEMBERT fut rejeté par les monarchistes cathos (les ”super cathos super purs ” d’alors) parce que dans son discours de NAMUR au tournant des années 1860-70, il avait oser dire qu’on ne supprimerait 60 ans d’histoire post 1789.
    Les mêmes catholiques monarchistes dès les débuts de la 3 ème échouèrent pitoyablement, alors qu’ils étaient majoritaires à la Chambre, enfermant le Comte de Chambord dans une impasse tactique, se divisant sur la couleur du drapeau, et autres billevisées, au lieu de regarder la réalité et d’aimer plus les Français que leurs opinions, finissant par livrer la France aux anti catholiques, avec 15 ans plus tard les premières lois contre les congrégations.
    En 2011, j’ai souvent le sentiment que la querelle du drapeau entre catholiques continue sous d’autres formes, sauf que ce ne sont plus les catholiques les parlementaires les plus nombreux mais les membres de la Fraternelle maçonnique parlementaire.
    ”Dis Seigneur, c’est demain que tu rétabliras le Royaume d’Israël ?” demandaient déjà ses disciples au Christ. Il fallut plus de 3 siècles pour convertir l’empire païen le plus puissant de toute l’histoire. Nous avons donc le temps pour nous.
    A défaut d’être martyrs par le sang, nous pouvons être témoins par la politique.

  7. Tout à fait d’accord; mais posez-vous tout de suite la question (que j’ai eu à traiter autrefois au sein d’une liste d’opposition à des élections municipales) en tant que catholique: un chrétien peut-il être franc-maçon ?
    Bien entendu, les francs-maçons locaux voulaient nous le faire croire.

  8. @ PG,
    L’entrisme a toujours échoué depuis 2 siècles : pourquoi vouloir s’acharner ?
    Il y a 2 solutions : soit repartir de zéro, créer un nouveau (et n-ième) parti et croire que l’on peut changer les choses dans le système républicain français en jouant avec les règles (anti-catholiques puisque franc-maçonnes). Toutes les tentatives de ce genre ont pour le moment échoué (celle qui est allée le plus loin est l’Action Française…)
    Soit on fait de l’entrisme à notre niveau : purement localement. D’abord dans la famille : il faut être logique. Sans exemplarité familiale, aucune chance de se projeter ailleurs. Puis de proche en proche ensuite (travail, amis, social, sport, etc.). J’ai personnellement choisi cette voie, qui n’est pas la plus simple (car contrairement à votre solution, elle nous implique bien davantage…).
    AMHA, la seule solution est la deuxième voix : les catholiques deviendraient visibles.

  9. Il faudrait que les catholiques aient la foi, et croient que les lois et la société doivent s’inspirer et au moins ne pas contredire l’enseignement du Christ.
    Des catholiques qui collaborent avec le Système païen immoral, on en connaît que trop.
    Résultat de cet aveuglement, le système prospère avec les voix et la collaboration des chrétiens naïfs, même le système totalement païen étend son emprise à chaque élection.
    Pour marcher en politique, il faut une presse, comme le vent dans les voiles. Famille Chrétienne ou La Croix sont très insuffisants et ne vont pas se transformer en Monde et Vie et en Présent qui eux au moins sont clairs.
    Militer pour modifier les lois piétinant nos convictions, pour exiger 10% de programmes chrétiens à la TV, cela est impensable … A moins de prendre au sérieux le “Allez enseigner toutes les nations, leur apprenant à mettre en pratique tout ce que je vous ai enseigné”
    Tant que la majorité des catholiques ne saisira pas “que votre Volonté soit faite sur la terre comme au Ciel” est une demande pressante à réaliser vraiment, elle ne servira que de supplétifs à la contre Eglise qu a tout en mains.

  10. @ PK
    Je respecte votre choix : chacun est maître de ce que sa conscience ou sa réalité personnelle lui dicte.
    Je crois simplement que depuis 25 ans, qq partis, et hommes malgré des échelles de valeurs croisées différentes, ont gêné l’idéologie du système (Mariage homo, Europe fédéraliste, immigration, etc….) : FN et Le Pen, MPF et Villiers et C. Boutin en son temps.
    Vous ne pouvez pas juger de leur action en la rejetant comme inutile ; car le fait qu’ils n’aient pas triomphé se juge à la même aune que celle utilisable contre votre militantisme plus”discret” qui est un entrisme qui ne veut pas s’admettre : lui aussi quels résultats a t il permis ? Très délicat à dire sans doute.
    Ils ont draîné juqu’à quasiment 20 % des voix et cela pourrait se représenter : ils constituent un ensemble de contestation populiste, une force dans laquelle l’engagement de nombreux catholiques seraient utile par la permanence de leurs convictions et leur sens du dévouement, quand ils s’engagent…
    Le témoin est rarement un homme caché

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