Partager cet article

France : Société

Sécurité Sociale : la machinerie étatiste doit se désintoxiquer

De Jean Rouvière dans Présent :

"Le déficit du régime général de la Sécurité sociale ne cesse de s’aggraver : 9,7 milliards d’euros en 2007 ; 10,2 milliards en 2008 ; 20,3 milliards en 2009 ; 23,9 milliards en 2010. Si l’on prend en compte les régimes spéciaux de protection sociale et le Fonds de solidarité vieillesse, on a atteint, en 2010, un déficit de près de 30 milliards d’euros.  Comme pour le budget de l’Etat, il faut mettre en parallèle les déficits qui se répètent d’année en année, depuis trente ans presque sans interruption. et la dette qui enfle. Car, comme l’Etat, la Sécurité sociale emprunte de l’argent, année après année, pour faire face aux dépenses qui ne sont pas couvertes par les recettes (cotisations sociales et patronales et taxes diverses). Cette dette sociale – distincte de la dette publique – atteignait 136 milliards d’euros fin 2010.

Quelque temps avant que le gouvernement ne présente la nouvelle PLFSS, la Cour des Comptes, dans son Rapport annuel, a alerté sur les déficits élevés qui se répètent chaque année et sur le montant grandissant de la dette sociale. Didier Migaud, président de la Cour des comptes, lors de la présentation du Rapport, a estimé que le recours à l’emprunt pour financer la Sécurité sociale est un « poison », une « drogue », dont elle doit se « désintoxiquer ». A juste titre, le président Migaud fait remarquer que la crise économique ne suffit pas à expliquer les déficits grandissants du système de protection sociale. Bien sûr, le taux de chômage élevé et persistant fait perdre des cotisations, donc des recettes, à la Sécurité sociale. Mais ce manque à gagner « n’explique qu’un peu de moins de la moitié du déficit global ».

La Cour des comptes préconise que le déficit soit transféré chaque année à la CADES (Caisse d’amortissement de la dette sociale). Pour l’instant, ce n’est qu’une partie de la dette sociale qui est prise en charge par la CADES. La CADES a été créée lorsque la Contribution pour le remboursement de la dette sociale (CRDS) a été instituée, en 1996. La CRDS n’est pas une cotisation sociale de plus, mais un véritable impôt qui est appliqué sur tous les types de revenus : revenu d’activité, du patrimoine, de placement, droits d’auteur, mais aussi ventes de métaux précieux, de bijoux, d’objets d’art et gains des jeux de hasard. Le taux de la CRDS est, depuis sa création, de 0,5 %. La Cour des Comptes préconise que ce taux soit augmenté pour procurer des ressources supplémentaires à la CADES et lui permettre d’absorber, chaque année, le déficit de la Sécurité Sociale. En 2010, les ressources de la CADES ont été de 8 milliards d’euros, provenant de la CRDS et d’une petite partie de la CSG (0,2 point de la CSG). Si la CADES devait absorber le déficit 2010 de la Sécurité Sociale – 30 milliards d’euros –, il faudrait multiplier par cinq ses ressources, donc augmenter de plusieurs points la CRDS. Depuis la création de la CRDS, les gouvernements ont toujours refusé d’augmenter le taux de son prélèvement. Sauront-ils résister longtemps à cette solution de facilité ? Il y a plus. La CADES ne peut assurer sa mission avec ses seules ressources. Elle doit elle-même emprunter de l’argent et a la faculté d’émettre des obligations. En 2010, elle a dû emprunter 11 milliards d’euros sur les marchés financiers et elle a dû verser 3 milliards d’euros d’intérêts aux porteurs des obligations qu’elle avait émises les années précédentes. En somme, la CADES emprunte pour soulager la dette de la Sécurité Sociale. Elle crée de la dette pour en réduire une autre !

Cette préconisation de la Cour des Comptes pour faire disparaître le déficit de la Sécurité Sociale est absurde, même si, en même temps, l’honorable institution préconise différentes mesures pour réduire les dépenses de protection sociale. La Sécurité sociale est une grosse machine administrative. Elle ne décide pas de ses recettes, fixées par le gouvernement, et n’a guère de maîtrise sur les dépenses. Son fonctionnement interne est lui aussi très lourd et coûteux. Ses dirigeants font valoir que les frais de gestion de la Sécu ne représentent que 3 % de ses dépenses. Le chiffre semble faible, mais en valeur absolue il est énorme : 10 milliards d’euros. Les quelque 160 000 agents du régime général de la Sécurité sociale ne sont pas des fonctionnaires, mais des salariés de droit privé, pourtant leur statut est plus rigide encore que celui des fonctionnaires publics. Ils ne peuvent pas être changés d’emploi ou de lieu d’affection. On relève aussi un taux d’absentéisme (5 %) plus élevé que dans d’autres secteurs et des dépenses, hors contrôle, qui ne sont pas minces. Le statut des agents de la Sécurité sociale devrait être révisé en 2013, c’est-à-dire après les élections présidentielles. Quel gouvernement aura le courage de remettre en cause les « avantages acquis » et d’affronter les syndicats puissants à la Sécu ?

Mais au-delà des personnels et des frais de gestion, c’est toute l’organisation de la protection sociale en France qui serait à réformer. Des caisses de protection sociale organisées au niveau local, une par profession ou secteur professionnel, des caisses véritablement autonomes, seraient sans doute mieux gérées, et efficaces, que la grande machinerie, presque étatiste, qui existe actuellement."

Partager cet article

2 commentaires

  1. Il en est de la sécu comme de l’enseignement là aussi il faut dégraisser le mamouth, ensuite arrêter l’appel d’air pour des populations qui viennent d’ailleurs. Nouvelle trouvaille de notre gouvernement bien-aimé: ceux qui arrivent en France à l’âge de 65 ans ont automatiquement droit à 745€. Ensuite les Delon ,Noah et autres ploutocrates qui vivent à l’étranger et qui ne payent pas un radis au pays, qu’ils aillent se faire soigner ailleurs, et qu’ils arrêtent de nous donner des leçons. Enfin je le redis encore une fois on met la sécu en concurrence et on verra qui est le meilleur. Enfin on arrête de distribuer à gogo des médicaments dont les gens n’ont pas besoin et en plus qui leur sont néfastes, On dégraisse l’administration des hôpitaux et on donne à la place du personnel soignant etc etc etc

  2. “Enfin je le redis encore une fois on met la sécu en concurrence et on verra qui est le meilleur.”
    Il est évident que la sécurité sociale en régime capitaliste est moins rentable qu’une mutuelle privée.
    Cela ne veut pas dire que le système des mutuelles privées est le meilleur, et le plus chrétien.
    Sinon, le système de protection sociale des département concordaires (Alsace -Lorraine) n’est pas en déficit. Pourquoi ?

Publier une réponse

Nous utilisons des cookies pour vous offrir la meilleure expérience en ligne. En acceptant, vous acceptez l'utilisation de cookies conformément à notre politique de confidentialité des cookies.

Paramètres de confidentialité sauvegardés !
Paramètres de confidentialité

Lorsque vous visitez un site Web, il peut stocker ou récupérer des informations sur votre navigateur, principalement sous la forme de cookies. Contrôlez vos services de cookies personnels ici.


Le Salon Beige a choisi de n'afficher uniquement de la publicité à des sites partenaires !

Refuser tous les services
Accepter tous les services