Partager cet article

Europe : politique

Rétrospective 2006 (5) : l’Union européenne entre idéologie et scepticisme

Ue Après l’échec du Traité Constitutionnel européen en 2005, l’année 2006 a vu le scepticisme croître au sein de l’Union Européenne. Si les partisans du TCE usent de procédés peu démocratiques pour imposer le traité contre la souveraineté des peuples, ces manoeuvres se font de plus en plus clairement. Parallèlement, le combat pour la reconnaissance des racines chrétiennes de l’Europe semble loin d’être perdu puisque 2006 a vu bon nombre de politiques se rallier à la position à la tête de laquelle nous retrouvons le Pape, premier défenseur de l’identité de l’Europe. En outre, la politique antinationale des instances européennes fait de plus en plus l’objet de critiques. Enfin, les négociations d’adhésion de la Turquie ont vu l’UE céder devant l’extrême fermeté du gouvernement turc.

1. Institutions : le spectre de la Constitution européenne

Malgré le rejet du Traité Constitutionnel par la France et les Pays-Bas, traité qui ne peut être adopté qu’à l’unanimité des Etats de l’UE, les européfédéralistesau premier rang desquels Valéry Giscard d’Estaing et José Manuel Barroso– sont revenus à la charge en 2006 pour imposer le monstre institutionnel. Néanmoins, quelques pays (dont la Pologne, la République Tchèque et les Pays-Bas) ont pris acte de l’échec du TCE.

  • Selon des sondages, si de nouveaux référendums avaient eu lieu en 2006 en France et aux Pays-Bas, le pourcentage de "non" aurait été plus important qu’en 2005. Néanmoins les idéologues du Traité constitutionnel espèrent que le temps joue pour eux. C’est pourquoi la période de réflexion d’un an a été prolongée.
  • En décembre, l’Espagne et le Luxembourg, les 2 seuls pays qui ont approuvé la Constitution européenne par référendum, ont invité les 16 autres Etats membres de l’Union l’ayant ratifiée à se réunir, fin janvier, pour relancer le processus constitutionnel. Une seconde réunion aura lieu fin février à Luxembourg, élargie aux sept pays qui n’ont pas encore ratifié le texte, et aux deux qui l’ont rejeté par référendum.
  • Fin septembre, l’Italie a constitué un comité composé de personnalités provenant de l’ensemble de l’UE afin de relancer le projet, lequel serait adaptable sans passer par un référendum.
  • En Allemagne, Angela Merkel a insisté sur la nécessité, en préservant «la substance du traité constitutionnel», de parvenir à un nouveau texte avant les élections européennes de 2009. A noter que l’Allemagne prend la présidence tournante de l’UE au cours du premier semestre 2007.
  • En France, Nicolas Sarkozy a proposé un mini-traité dont le caractère principal serait d’abandonner la règle de l’unanimité (et donc la souveraineté nationale) pour adopter toute décision prise par l’UE. Quant à Jacques Chirac, il n’a retiré ni sa signature au bas du TCE ni l’article 88-1 de la Constitution de la Ve République qui mentionne le TCE et a plaidé pour une relance du TCE.
  • Le chancelier autrichien n’a souhaité ni une correction ni un abandon du TCE.
  • Le Portugal exercera la présidence de l’UE lors du second semestre 2007. Or José Socrates, le président portugais, a annoncé en 2006 que son pays poursuivra la relance du TCE.
  • En revanche, le président Tchèque, qui considère l’Europe politique comme une erreur intellectuelle, s’est opposé aux "eurofanatiques".
  • Le président polonais s’est prononcé contre toute reprise du TCE et a demandé l’élaboration d’une nouvelle Constitution pour l’Union européenne, laquelle serait au service des Etats de l’UE et non l’inverse.
  • Le chef de la diplomatie néerlandaise a affirmé que la Constitution était bien morte et qu’il n’est pas question d’évoquer un nouveau référendum aux Pays-Bas.

Lors du sommet européen de juin 2006, les 25 sont tombés d’accord sur le fait qu’on ne pouvait rien entreprendre sur le plan institutionnel avant la présidentielle française et les législatives néerlandaises. Les dirigeants européens ont estimé que les démarches nécessaires pour poursuivre le processus de réforme institutionnelle de l’Union seront faites au second semestre 2008 au plus tard, à savoir pendant la présidence française de l’Union. La présidentielle française pourrait donc avoir une importance capitale sur l’avenir institutionnel de l’Union européenne.

2. La reconnaissance des racines chrétiennes de l’Europe

Saint_benoit Sur ce point fondamental de l’identité chrétienne de l’Europe -identité rappelée de nombreuses fois par le Pape-, les européistes sont clairement divisés. Et on constate qu’en 2006, un certain nombre de voix, même parmi ceux désirant relancer le processus de ratification du TCE, se sont montrées favorables aux racines chrétiennes de l’Europe.

  • En Allemagne, Angela Merkel s’est prononcée pour une référence explicite aux racines chrétiennes de l’Europe. On verra si cette position sera confirmée au cours de la présidence de l’UE début 2007.
  • Le président polonais a dit au pape que la Pologne chercherait à "promouvoir par tous les moyens les racines chrétiennes de l’Union européenne", et à combattre certaines tendances contraires, comme par exemple "l’idée de sanctionner ceux qui n’acceptent pas la culture homosexuelle".
  • Marqué par l’insistance du Pape, Franco Frattini, vice-président de la Commission européenne, a déclaré que ce thème revient aujourd’hui à lancer un triple défi : "celui de notre identité européenne, celui d’un univers religieux qui s’affirme, celui d’un christianisme qui n’est pas seulement mémoire du passé mais, en posant le thème de la liberté comme voie du dialogue, ­une partie de notre avenir".
  • La présidence finlandaise a ouvert en juillet 2006 son semestre de présidence de l’UE en mettant à l’honneur le latin.

3. La politique de l’UE : de l’uniformisation au scepticisme

Malgré l’échec du TCE et la bataille pour la reconnaissance de l’identité de l’Europe, on s’aperçoit que la politique générale de l’UE suit son cours vers toujours plus d’uniformisation (de l’anglais à la vodka en passant par les couches-culottes…), d’homogénéisation, à l’encontre des souverainetés nationales (bien souvent en multipliant des procédures d’infraction contre les Etats, voire contre des eurodéputés). Toutefois, on remarque que l’hostilité à l’égard de cette uniformisation se fait de plus en plus grande au sein de l’UE, les Etats se rendant progressivement compte du degré d’intégration déjà atteint.

  • Le Parlement européen a adopté son budget de financement de la recherche et du développement pour les 7 ans à venir. Aux termes d’un compromis, l’UE s’abstiendra de financer tout clonage et toute recherche sur des cellules souches embryonnaires obtenues à partir d’une nouvelle destruction d’embryon, mais pourra allouer des fonds à la recherche sur des lignées de cellules souches déjà obtenues en fonction notamment de la législation de l’État membre impliqué.
  • En septembre, une résolution du Parlement européen a insisté sur la non-discrimination à l’égard des homosexuels et des immigrés, favorisant ainsi les revendications de ces deux catégories de populations.
  • Par un arrêt rendu en mai, la Cour de Justice avance vers un régime européen d’assurance-maladie. Le même mois, la même Cour a empêché l’Irlande d’avoir recours à l’ONU pour un litige international.
  • Fin juin, la France a adopté la Charte européenne de l’autonomie locale qui supprime les barrières politiques dans l’UE – et par conséquent supprime les Etats-nations – et promeut "une forme d’approche écologique de la société humaine".
  • Néanmoins, l’euro fait de moins en moins l’unanimité. Le constat de l’échec de la monnaie unique devient flagrant, quand cette dernière n’est pas ouvertement remise en cause.
  • Les groupes eurosceptiques et souverainistes croissent au sein du Parlement européen, de 2 ils pourraient passer à 3 en 2007. 2006 a vu le groupe Union pour l’Europe des Nations (UEN, comprenant notamment le PiS polonais et l’Alliance nationale italienne) passer du 6e groupe du parlement au 4e. Sans oublier que les conservateurs britanniques se sont engagés à quitter le PPE en 2009.
  • En juin 2006, la Lettonie a refusé de ratifier les lois européennes donnant des droits spéciaux aux homosexuels.
  • La Pologne souhaite que la politique de l’UE ne soit pas contraire à ses intérêts nationaux et agit en ce sens.

Parlementeuropeenstrasbourg22_1 La machine européenne semble avancer comme par automatisme, au mépris des cultures et des souverainetés nationales, engendrant par là un sentiment de rejet de plus en plus fort, propice au rétablissement des Etats-nations et à la reconnaissance de l’identité chrétienne de l’Europe. Si cette bataille est loin d’être gagnée, on remarque toutefois que ce sont les hommes qui font l’histoire et que leur détermination est capable de faire échouer les entreprises idéologiques.

4. Les négociations d’adhésion avec la Turquie

Turkue_1 Les partisans de l’adhésion de la Turquie à l’UE ont poursuivi en 2006 les négociations avec ce pays, refusant d’accorder un quelconque crédit à l’hostilité des peuples de l’UE, majoritairement opposés à cette intégration, en contournant l’opposition constante de Chypre dont la partie nord est toujours occupée et en négligeant la politique autoritaire et l’antichristianisme avéré de l’Etat turc (lire ici, ici, ici, ici, ici, ici, ici) :

  • Fin juin 2006, le premier chapître des négociations était déjà clos avec une capitulation des instances européennes devant la volonté turque.
  • Istanbul a été désignée capitale européenne de la culture pour 2010 par Bruxelles, qui verse pour l’occasion des subventions à cette ville.
  • Tout au long de l’année, les vagues menaces de suspension des négociations de la part des autorités européennes, sont restées lettres mortes, la Turquie restant extrêmement ferme dans son opposition à l’ouverture de ses ports et aéroports à Chypre (refusant même une délégation de l’UE et annulant une réunion au motif que l’un des membres était chypriote !).
  • En France, si Ségolène Royal a déclaré qu’avant toute intégration de la Turquie à l’UE elle consulterait le peuple français, comme le lui oblige la Constitution, elle a ajouté aussitôt, laissant présager une vaste campagne de matraquage : "Je crois que le référendum ne sera pas facile. Il n’y a aucune raison de le stopper, mais il va falloir beaucoup de travail, d’évolution, pour que le peuple français se prononce positivement." De son côté, Sarkozy a estimé que ce pays n’a pas sa place dans l’UE.
  • En décembre, l’UE s’est prononcée pour un gel partiel des négociations, malgré l’insatisfaction de Chypre. De fait, le gel de 8 des 35 chapîtres a permis d’ouvrir la négociation sur les 26 autres chapîtres, négociation qui était auparavant gelée.
  • Néanmoins, 2006 a vu le peuple turc devenir moins enthousiaste à cette future intégration.
  • Lors de son voyage en Turquie, Benoît XVI a longuement appelé l’Etat turc a garantir la liberté religieuse des minorités chrétiennes.

Michel Janva

Partager cet article

1 commentaire

  1. excellent article ! continuez !

Publier une réponse

Nous utilisons des cookies pour vous offrir la meilleure expérience en ligne. En acceptant, vous acceptez l'utilisation de cookies conformément à notre politique de confidentialité des cookies.

Paramètres de confidentialité sauvegardés !
Paramètres de confidentialité

Lorsque vous visitez un site Web, il peut stocker ou récupérer des informations sur votre navigateur, principalement sous la forme de cookies. Contrôlez vos services de cookies personnels ici.


Le Salon Beige a choisi de n'afficher uniquement de la publicité à des sites partenaires !

Refuser tous les services
Accepter tous les services