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France : Société

Pour s’ouvrir aux autres, il faut savoir qui l’on est

Le Spectacle du Monde consacre un dossier aux mensonges de l'Histoire. Jean Sévillia revient pour l'occasion sur l'« historiquement correct », auquel il a consacré un ouvrage :

S "Défiant sciemment les lois de la science historique, cette tendance manie allègrement l’anachronisme en jugeant le passé selon les critères du présent : l’Inquisition ou les guerres de Religion, par exemple, sont analysées au nom de la liberté religieuse et de la liberté de conscience, concepts inconnus au Moyen Age comme au XVIe siècle. L’« historiquement correct » pratique ensuite le mensonge par omission : les Croisades sont ainsi vilipendées comme une agression contre le monde musulman, sans que soit rappelé que le but de la première d’entre elles était de rétablir la liberté pour les chrétiens de se rendre sur les Lieux saints, liberté qui leur avait été confisquée par les Turcs.

L’« historiquement correct » se caractérise donc par le manichéisme. Alors que l’historien doit normalement tout situer dans un contexte et mesurer le poids subtil des nuances et des circonstances, la complexité de l’Histoire se trouve ainsi gommée, réduite à l’affrontement binaire du bien et du mal et, qui plus est, un bien et un mal réinterprétés selon les codes contemporains : l’analyse de la colonisation ou des années d’Occupation en fournissent les exemples les plus patents. Dès lors, l’Histoire constitue un champ d’exorcisme permanent : plus les forces obscures du passé sont « anathématisées », plus il faut se justifier de n’entretenir avec elles aucune solidarité. Au nom de l’« historiquement correct », des personnages, des sociétés et des périodes entières sont ainsi diabolisés. […]

Un citoyen est l’héritier d’un passé plus ou moins mythifié, mais qu’il fait sien. Jusqu’aux années 1960, on apprenait aux Français l’histoire de la France et des civilisations qui avaient marqué sa culture. Sous l’influence des évolutions évoquées plus haut, le rapport au passé revêt désormais d’autres contours. […] Il n’est nullement étonnant, dès lors, que les programmes scolaires, au collège, passent Clovis et Louis XIV à la trappe, tout en préconisant, au nom de l’« ouverture aux autres cultures », des cours sur la Chine des Han, l’Inde des Gupta ou l’empire africain du Monomotapa. Ce qui est tout simplement occulté, c’est que la première condition pour s’ouvrir aux autres est de se bien connaître soi-même, de savoir qui l’on est et d’où l’on vient.

Or, c’est précisément ce que demandent les Français, qui plébiscitent ce qui a trait au passé français. Il n’est qu’à voir le succès des spectacles historiques, la passion pour les musées d’histoire, l’engouement pour la généalogie, ou le triomphe des Journées du patrimoine. L’Histoire va mal, mais tout prouve que nos contemporains aiment savoir de qui ils descendent. Pour soigner la crise de l’Histoire, il ne faudra donc pas seulement des circulaires ministérielles, mais aller au fond du problème. Qui sommes-nous ? D’où venons-nous ? Où voulons-nous aller ? Ce sont des questions éminemment politiques : l’Histoire n’appartient pas aux seuls spécialistes."

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1 commentaire

  1. Très bon livre à lire en priorité comme les autres et “Quand les catholiques étaient hors la loi” bien entendu … édifiant de la bêtise humaine.

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