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France : L'Islam en France

Michel Onfray nous aide-t-il vraiment à « penser l’islam » ?

Michel Onfray nous aide-t-il vraiment à « penser l’islam » ?

Michel Onfray, philosophe, professeur, poète, homme de plume abondante et de parole incisive voire féroce, lit, écrit (plus de 100 ouvrages ! ) et se lance avec générosité dans beaucoup de combats.

Il a publié en 2016 un petit livre Penser l’islam, qui associe des textes écrits à l’occasion des différents attentats de l’année 2015 (en particulier Charlie Hebdo le 7 janvier et le Bataclan le 13 novembre) et un entretien qu’il a accordé sur la question de l’islam à un journaliste algérien, Asma Kouar.

La pensée d’un philosophe athée, revendiqué de gauche (la gauche d’avant les trahisons de François Mitterrand, sociale et pacifiste), nous aide-t-elle à penser cet islam dont les numéros concomitants du Point et de Valeurs actuelles cette semaine rappellent encore la place de plus en plus prégnante à travers l’application progressive de la charia dans les services publics français ; phénomène bien connu de tous ceux qui refusent d’être aveugles ? Et ce en particulier au long de cet entretien aux questions un peu hétéroclites et parfois carrément stupéfiantes (page 80 « Qu’est-ce qui vous autorise à voir le prophète Mahomet comme un homme de guerre alors qu’il ne voulait inscrire que l’humilité et la bonté dans le cœur des hommes » ; page 82 : « N’avez-vous pas l’impression de vous servir de textes secondaires pour jeter l’opprobre sur le Prophète, dont chacun reconnaît l’infinie sagesse ? »).

Tout d’abord, M.Onfray explicite son ambition, citant Spinoza : « ni rire, ni pleurer mais comprendre » ; et aussi être pragmatique et non idéologue (p. 58).

Il apporte sa lecture attentive de tous les textes relatifs à l’islam et abonde en citations, dont trois pages pleines de commandements chariatiques (pp. 87-89) : depuis le « Tout juif qui vous tombe sous la main, tuez-le » jusqu’au « Quant à vos enfants, Dieu vous ordonne d’attribuer au garçon une part égale à celle de deux filles ».

Il dénonce, à l’opposé de tant d’autres, le refus du réel : il rappelle que la communauté musulmane, la oumma, « fait fi des frontières et des nations. L’islam est une religion déterritorialisée dont le message emprunte les voies d’internet et réunit en temps réel ceux qui sont séparés dans le temps et dans l’espace sur la totalité du globe ». Il rappelle qu’entre l’islam pacifique du croyant intégré dans la République et l’islam de ceux qui tuent au nom du coran, il n’y a pas de différence de nature, mais une différence de degré. Il moque tous les adeptes (si nombreux en cette année 2015… et au-delà) de la dissimulation organisée, du padamalgam, et de la litanie du çanarienavoiraveclislam.Il rappelle les liens étroits entre le régime nazi et le grand Mufti de Jérusalem, Hadj Amin al-Husseini (« Les principes de l’islam et ceux du nazisme présentent de remarquables ressemblances en particulier dans l’affirmation de la valeur du combat de de la fraternité des armes, dans la prééminence du chef, dans l’idéal de l’ordre ») et valide le diagnostic d’une guerre de civilisations(p.155).

Au-delà, penser, c’est se demander pourquoi on en est arrivé là. M.Onfray introduit trois facteurs explicatifs majeurs pour comprendre ces attaques terroristes.

Le premier est l’attaque récente de pays musulmans par l’Occident et en particulier par la France (Irak, Syrie, Afghanistan, Libye, Mali). 

« Depuis la seconde trahison de Mitterrand en 1991, qui a emboîté le pas au bellicisme de la famille Bush, la France a été de tous les bombardements des pays décrétés voyous. Il se fait qu’il s’agissait de pays musulmans et que la France a contribué à la mort de 4 millions de musulmans » (page 13).

Et ce dans le prolongement d’une politique coloniale ancienne. Ce serait un retour de bâton :

« si danger de terrorisme islamique il y a sur le territoire français, et il y a désormais, c’est parce que ceux que nous avons agressés riposteront à nos agressions ».

Ensuite, le retour de bâton serait accentué par la faiblesse d’une France qui « n’a pas donné envie qu’on l’aime… puisque la République n’est plus capable de proposer l’aventure, l’idéal, l’action, l’engagement et qu’elle érige en modèles des comédiens de série B, des animateurs télé, des footballeurs décérébrés, des chanteurs de radio-crochets télévisés ». Et dans cette France,

« les politiciens de droite et de gauche libérale qui se sont succédés au pouvoir ont créé la misère, la pauvreté, le chômage, l’illettrisme, l’inculture, célébré le culte de l’argent et de la réussite comme horizon indépassable, qui ont fait le deuil de toute morale et de toute spiritualités au profit du Veau d’or ».

Enfin, c’est toute la civilisation occidentale qui est en fait concernée :

« L’Occident est en bout de course, l’Europe est moribonde, elle ne revivra pas et comme toutes les civilisations en phase d’effondrement, elle montre des signes de décadence : l’argent roi, la perte de tous les repères éthiques et moraux, l’impunité des puissants, l’impuissance des politiciens, le sexe dépourvu de sens, le marché qui fait partout la loi, l’analphabétisme de masse, l’illettrisme de ceux qui nous gouvernent, la disparition des communautés familiales ou nationales au profit des tribus égotistes et locales, la superficialité devenue règle générale, la passion pour les jeux du cirque, la déréalisation et le triomphe de la dénégation, le règne du sarcasme, le chacun pour soir »,

n’en jetez plus, la cour est pleine. Face à cette désolation, la dynamique musulmane apparaît en réalité comme l’ancien faible devenu fort. 

Les facteurs cités par M.Onfray seraient donc essentiellement exogènes à l’islam. Et cela paraît un peu court.

Il constate :

« Comment a-t-on pu imaginer qu’un demi-siècle d’ingérence occidentale dans les affaires de nombreux pays arabes ne génèrerait à aucun moment une réponse selon les mêmes logiques : les bombes judéo-chrétiennes ici, les kalachnikovs islamiques là, la technologie de guerre occidentale ici contre la guérilla urbaine des terroristes là ? ».

Un demi-siècle ? C’est-à-dire un point de départ vers 1960/1970. Mais c’est en 1928 qu’a été fondé le mouvement des Frères musulmans, soutien de tous les terrorismes et qui veut rétablir le cadre du califat ; structure califale qui existe depuis la période de la succession de Mahomet, soit le VIIème siècle !

Mouvement des Frères musulmans dont le drapeau représente deux sabres croisés et un mot en arabe qui signifie « tenez-vous prêts » ; premier mot du verset 29 de la sourate dite de la rédemption : « mobilisez toute votre force militaire, votre fureur, vos chevaux, jusqu’à ce qu’ils (NDLR : les juifs et les chrétiens) donnent la djizîa (NDLR : l’impôt des dhimmis, des soumis, payé pour avoir le droit de vivre en paix et en sécurité en pays musulman) ».

Comment passer sous silence aussi cette structure majeure de la pensée musulmane divisant l’ensemble du monde entre deux demeures : la maison de l’islam (Dar al Islam) pour les musulmans et ceux qui acceptent d’être des soumis d’un côtéet la maison de la guerre (Dar al Harbde l’autre ?

Comment passer sous silence enfin que tout ne passe pas par des attentats.  Alexandre Del Valle a déjà décrit la stratégie de l’intimidation utilisant tantôt les coupeurs de tête (les terroristes), tantôt les coupeurs de langue. Comment ne pas voir l’islamisation à bas bruit, comme décrite dans les hebdomadaires cités, tous les soutiens des Frères Musulmans, provoquant des renoncements, des accommodements de lâcheté ou de lassitude ou d’adhésion ?  Dans un podcast du 12 juin 2019, la journaliste Zineb El Rhazoui (ayant appartenu à la rédaction de Charlie Hebdo mais par chance absente le jour de l’attentat),  qui vient de publier Combattre le fascisme islamiste, déclare notamment :

« Je suis extrêmement inquiète de ce qui se passe en France. L’UOIF, qui s’appelle maintenant Musulmans de France, dépend directement des Frères musulmans. On y trouve des interlocuteurs des pouvoirs publics, beaucoup ont la Légion d’honneur, reçoivent des subventions. Les dégâts sont déjà bien profonds ».

La constatation et la compréhension de cette islamisation ne sont-elles pas nécessaires aussi pour penser l’islam et proposer des solutions ?

Les propositions de solution présentées par M.Onfray ne convainquent, pour tout dire, pas plus.

Pour ce qui concerne la politique extérieure, il plaide pour une neutralité française.

Pour ce qui concerne la politique intérieure, il propose assez curieusement un « contrat social avec l’islam ». Pourquoi « curieusement » ? Parce que d’abord, à la question « Où en est la gauche vis-à-vis de l’islam », M.Onfray commence par répondre « Il faut d’abord s’entendre sur islam : lequel ? ». Et d’en décliner ensuite toutes les interprétations théologico-politiques pour finir par « Il y aura toujours un islam pour donner tort à l’autre » (pp 104-105). Alors, s’attacher à un islam planétaire qui est celui de l’oumma(p.132) ? Mais comment passer un contrat social avec un islam planétaire ? Comment, comme le fait encore M.Onfray, l’inviter à un travail de réflexion ? Comment le presser de construire un islam républicain ? Aucune chance en fait d’y arriver comme il l’expliquait lui-même avant.

Et à quoi servirait alors d’aménager la loi de 1905 comme suggéré encore pour composer avec le réel ? D’autant plus que M.Onfray n’y va pas avec le dos de la cuillère : en fait d’aménagement, ce serait une refonte.  Dans le fameux contrat social qui serait proposé à un islam de France qui aurait accepté de « prélever » dans le Coran et dans l’islam ce qui serait « clairement compatible avec les valeurs de la République », alors, « la République donne ce qu’elle doit donner : elle fournit une formation aux imams, elle les salarie, elle surveille les prêches pour qu’ils soient républicains, elle finance les lieux de prière, elle assure la protection des musulmans (NDLR : mais qui les a menacés ?) ». Et il ajoute : « Tout ceci serait assuré par un denier du culte prélevé en fonction des confessions » !  Rappelons quand même le titre de cette loi du 9 décembre 1905 : « concernant la séparation des Eglises et de l’Etat ».

N’est-il pas temps de rappeler qu’à l’égard des juifs et des catholiques, la loi fut une loi de contrainte et non pas d’accommodements : depuis le célèbre « tous les individus, quelle que soit leur profession ou leur religion, sont des citoyens égaux. Mais rien ne doit faire écran entre les individus et la Nation. Aucune nation particulière ne peut se constituer au sein de la grande Nation : ce serait mettre à mort la volonté générale, donc la souveraineté…. Les Juifs doivent avoir tous les droits en tant qu’individus, ils ne doivent avoir aucun droit particulier en tant que fidèles d’une religion » déclaré par Stanislas de Clermont-Tonnerre le 23 décembre 1789 jusqu’aux déchirements et conflits de 1905 pourtant surmontés par la République ?

La pensée philosophique de M.Onfray ne nous apporte donc guère d’éléments ni de compréhension, ni d’action à l’égard de l’islam. Sauf cette idée d’une composition avec le réeldont on frémit déjà.

Sur le voile, il déclare : « je le dis depuis longtemps, le problème n’est pas le voile. Je ne crois pas que dans la configuration d’un voyage scolaire avec d’autres parents, il y ait péril en la demeure avec une femme voilée. Une femme voilée qui se réclame des sourates pacifiques est moins problématique qu’une autre qui, tête nue, se réclamerait des sourates belliqueuses » (p.77). Il a été exaucé : la commission mixte paritaire du Parlement à propos du projet de loi sur l’école a finalement rejeté un amendement adopté en mai 2019 par les sénateurs interdisant le port de signes religieux ostentatoires pour les accompagnants lors des sorties scolaires. Fatiha Agag-Boudjahlat, auteur de Combattre le voilement, s’est élevée contre ce choix : « Que l’on dise que les mamans voilées tirent profit des sorties scolaires pour ouvrir leurs horizons est ignoble : c’est leur choix de conformité orthodoxe qui réduit cet horizon à des sorties utilitaires sous surveillance » (Valeurs Actuelles, 20/06/2019).

Comment comprendre, dans la pensée du philosophe, cet écart entre le courage de regarder la réalité de l’islam en face et la faiblesse des remèdes proposés ? Cette façon finalement d’endosser ce qu’il dénonce aussi dans son livre : islamophobie à l’extérieur, islamophilie à l’intérieur ?

Comment comprendre aussi, sinon par une rancune vieille et tenace, quasi-psychanalytique, à l’encontre de l’apôtre Paul, le renvoi dos-à-dos des « trois monothéismes », tous considérés comme également violents ? En particulier, le christianisme auquel il reproche par deux fois la citation du Christ dans Mt X 34 : « Je ne suis pas venu apporter la paix, mais le glaive ». M.Onfray,  une vulgaire Schiappa soulignant une convergence idéologique entre la Manif pour tous et les terroristes islamistes ? Franchement décevant.

Et rien non plus, mais ce n’était pas le sujet, sur les conditions d’un redressement français, voire occidental à partir du tableau apocalyptique qu’il a dressé.

Tout ceci n’empêche pas de retrouver dans ce livre certains aspects qui rendent l’auteur rare et attachant :

  • Il ne s’excuse pas de ses positions, même quand est convoqué le mot ultime d’islamophobie. Il salue les analyses et expressions d’un Finkielkraut, d’un Zemmour et d’une Marine Le Pen (« Le succès de Marine Le Pen vient beaucoup du fait qu’elle est en matière de constats l’une des rares à dire que le réel a bien eu lieu» p.34). Ce n’est pas rien. Cette capacité à se fonder sur le réel est précieuse.
  • Il donne de Hollande un portrait plausible : le jour de l’attentat de Charlie Hebdo, « sur iTélé, une journaliste nous dit que François Hollande a précipitamment quitté l’Elysée et qu’on l’a vu dévaler les escaliers en compagnie de son conseiller en communication. Je me frotte les yeux. Non pas le ministre de l’Intérieur ou le chef d’état-major des armées, non, mais Gaspard Gantzer, son conseiller en communication ! Hollande arrive sur place, il enfile des perles de rhétorique. Il repart» (p.30) ; et « ce qui a eu lieu ce mercredi 7 janvier illustre parfaitement que notre Etat s’évertue à penser contre vents de guérilla et marées terroristes en termes de grande guerre : voilà pourquoi le chef de l’Etat qui est aussi chef des armées, entre l’annonce du film à venir de Trierweiler et le prochain dîner avec Julie Gayet à soustraire au regard des paparazzi, a décidé d’envoyer porte-avions et sous-marins en direction de la Syrie. Pour quoi faire dans un conflit fait de combats dans les rues ? » (p.40/41).
  • Il décrit la nouvelle gauche islamophile qui « s’est faite antisémite et antisioniste, phallocrate, homophobe, puis, ce qui n’est pas le moindre paradoxe, théocratique. Elle abolit tous les combats qui furent ceux de la gauche issue de la Révolution française (p.118) ».

Dans le monde médiatico-politique des soumis, des faux-culs et des incohérents face au risque musulman (« l’islam qui ne cache pas sa nature belliqueuse et conquérante » p. 23), c’est déjà beaucoup. Mais on attendait plus.

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7 commentaires

  1. Mutatis mutandi:
    “la République donne ce qu’elle doit donner : elle fournit une formation aux prêtres, elle les salarie, elle surveille les prêches pour qu’ils soient républicains, elle finance les lieux de prière, elle assure la protection des catholiques”.
    Ça rappelle furieusement un régime connu du temps de la “révolution française”; on connait la suite. Je doute que les musulmans se laissent berner comme l’ont accepté les catholiques. Ils prendront ce qui est à prendre (salariat -pour quelque temps- des imamns, financement des lieux de prières-, mais refuseront clairement ce qui ne leur convient pas, et ce qui viendrait ensuite à changer (nouvelle loi de 1905 où l’on ne salarie aucun culte… par exemple).

  2. Onfray est un philosophe bidon et un faux opposant. 100% imposture.

  3. Sur l’Islam, Eric Zemmour me paraît plus percutant, en tout cas plus cohérent…

  4. L’islam étant une secte satanique, il ne peut rien en sortir de bon.

  5. E. Zemmour disait “l’islam, c’est le communisme avec Dieu”. C’est donc la religion du diable.

  6. Même si Onfray dit parfois des choses intéressantes qui rompent avec le politiquement correct, il manque sérieusement de rigueur. Je ne connais pas assez l’islam pour le contredire, mais sur le christianisme il dit souvent n’importe quoi, son “Traité d’athéologie” n’est qu’un pamphlet antireligieux bourré d’approximations et d’amalgames.

  7. Il serait plus crédible s’il nous apportait sa lecture attentive de tous les textes relatifs à la religion juive…

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