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L'Eglise : L'Eglise en France

Mgr Ravel encourage les militaires à manifester

Voici le communiqué de Mgr Ravel, évêque aux armées :

R"Face aux actuelles propositions de lois
sociétales sur le mariage et la filiation, certains d’entre vous
s’interrogent sur l’attitude de l’Eglise et du diocèse aux armées. Que
devons-nous faire ? Nous, institution officielle, et nous, citoyens et
fidèles catholiques, membres du diocèse aux armées. Ainsi certains s’étonnent-ils qu’il n’y
ait pas eu de prise de parole nette et concertée de la part des évêques
pour inviter à descendre dans la rue dimanche 13 janvier à Paris.
D’autres regrettent qu’un appel vigoureux n’ait pas été lancé en faveur
d’un référendum sur ce thème.

1. Concernant l’attitude personnelle des fidèles catholiques :

La voix de l’Eglise nous aide à nous
déterminer personnellement. C’est dire, d’une part, qu’il faut écouter
la parole de l’Eglise, qui est mère d’humanité, pour éclairer sa
conscience. Mais c’est dire, d’autre part, qu’il est de notre vocation
propre de faire le choix personnel (ou familial) des moyens à mettre en
œuvre pour orienter les options politiques de nos représentants.

L’appartenance à la communauté militaire
ne modifie rien à ce niveau puisqu’au militaire il n’est pas dénié un
devoir de conscience. Bien au contraire, la formation militaire renforce
ce niveau du choix éthique, niveau absolument indispensable pour porter
les armes au nom de la France.

Une étrange interprétation du devoir de
réserve circule dans nos rangs : elle voudrait que le militaire
s’abstienne de penser, surtout en matière politique
. Rappelons que le
devoir de réserve des agents de l’Etat porte sur l’expression des
orientations de la politique militaire ou étrangère. Rappelons que ce
devoir n’abolit pas mais renforce le devoir de conscience. Aujourd’hui,
en France, le militaire possède le droit de vote qui constitue
l’expression majeure de la responsabilité citoyenne. Il est donc tout à
fait curieux que certains contestent au militaire un droit d’expression
comme celui de manifester pacifiquement dans le respect du droit
français
. Il est clair toutefois, que le militaire n’agira pas alors au
titre de son métier, militaire ou fonctionnaire de la Défense, mais à
titre de citoyen. Le cas vaut identiquement s’il est membre d’un autre
ministère, comme celui de la Justice ou des Affaires Sociales,
directement concernés par les réformes proposées.

2. Concernant l’attitude collective de l’Eglise par la voix de ses pasteurs :  

L’Eglise invite ses fidèles à « se manifester ». Quelle interprétation donner à cet appel ?

Une distinction essentielle doit être
opérée ici mais on la trouve rarement dans les discours : l’autorité de
l’Eglise est prophétique et non politique.
Le pape Benoît XVI nous le redit souvent : « La
mission de l’Eglise n’est pas d’ordre politique. Sa fonction est
d’éduquer le monde au sens religieux en proclamant le Christ. L’Eglise
désire être le signe et la sauvegarde de la transcendance de la personne
humaine. Elle doit aussi éduquer les hommes à rechercher la vérité
suprême face à ce qu’ils sont et à leur interrogations pour trouver des
solutions justes à leurs problèmes. »
(Africae munus § 23).

L’autorité politique commande,
l’autorité prophétique parle
 : la confrontation entre Jean Baptiste et
Hérode Antipas symbolise merveilleusement ce rapport entre le prophète
et le roi, entre le discours prophétique et le décideur politique. Le
prophète s’exprime sur la voie publique. Il ne s’agit donc pas de se
laisser enfermer dans la fameuse et douteuse « sphère privée » devenue
aujourd’hui le lieu de toutes les relégations des sujets trop compliqués
à gérer.

« Professer par la bouche indique que
la foi implique un témoignage et un engagement publics. Le chrétien ne
peut jamais penser que croire est un fait privé. La foi, c’est décider
d’être avec le Seigneur pour vivre avec lui… la foi, parce qu’elle est
vraiment un acte de liberté, exige aussi la responsabilité sociale de ce
qui
est cru. L’Eglise, au jour de la Pentecôte, montre avec toute évidence cette dimension publique du croire. » (Benoît XVI, Porta fidei § 10) 

Par nécessité le prophète entre en
rapport, voire en conflit, avec les intérêts du politique sans jamais
entrer dans le jeu politique qui lui ferait contester l’autorité des « rois et des gouvernants ».
Manifester dans la rue est un acte politique. C’est aussi un moyen
démocratique légitime d’entrer dans le jeu où le peuple reste souverain
et exerce son autorité propre : soit indirectement grâce à ses
représentants, soit directement par des manifestations ou des élections
dont le référendum fait partie. 

Il ne revient donc pas à l’épiscopat
français de proposer une option politique particulière mais d’exercer
son charisme prophétique. Il l’a déjà fait et le fera encore.

3. Concernant le cas particulier du diocèse aux armées.

Les aumôniers militaires français sont à
la fois des « ministres » de l’Eglise, dont ils portent la voix
officielle, et membres de l’armée française. Peuvent-ils se prononcer en
matière politique et de manière prophétique ? D’aucuns trouvent
scandaleux qu’ils le fassent au motif qu’ils «crachent sur leur
employeur » quand ils expriment des opinions contraires à celle des
représentants de l’Etat.

Quelques remarques simples s’imposent que je crois devoir rappeler, même si elles paraissent enfoncer des portes ouvertes…

Les aumôniers militaires catholiques sont embauchés par le ministère de la Défense en tant que ministres du culte catholique,
qualité validée par les pouvoirs religieux accordés par l’aumônier en
chef du culte catholique, nommé lui-même par le ministre de la Défense.
En n’exprimant pas la doctrine catholique en matière de foi et de mœurs
ils trahiraient forcément la mission confiée par la République elle-même
et seraient donc en contradiction flagrante avec leur contrat de
travail.
La nation française reconnaît l’existence de quatre cultes au
sein de ses armées et admet leur diversité et leur originalité en
matière d’enseignement et de croyance.

Notre employeur, à travers le ministère
de la Défense, est l’Etat français. Cet Etat est celui d’un régime
démocratique qui ne s’identifie pas au gouvernement en place et encore
moins à de simples propositions de lois
. C’est au gouvernement de
proposer, à nos représentants de voter et au peuple français
d’approuver. Ce qui se passe en Egypte, en ces mois difficiles pour le
peuple égyptien, montre à l’évidence l’urgence de distinguer très
soigneusement les différents niveaux d’exercice de la démocratie, sauf à
vouloir confisquer le pouvoir.

Notre République est laïque, ce qui
autorise tous les cultes légalement reconnus à s’exprimer librement.
C’est aussi un régime démocratique qui laisse toujours au peuple la
décision ultime.

Nous sommes heureux de vivre en France,
notre patrie terrestre, et selon les appels présents de saint Pierre et
de saint Paul, nous prions pour nos autorités politiques : elles peuvent
compter sur notre soutien et notre respect. […]"

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6 commentaires

  1. Inclinons nous respectueusement devant l’évêque aux Armées qui ne se cache ni derrière sa mitre ni derrière sa crosse(sans jeu de mot!)
    Je salue par ailleurs tous les autres excellences qui,elles aussi, ont réagi en gardiens de la foi catholique!

  2. Parfait, Monseigneur.
    Depuis quelques mois, on nous explique que les religieux n’ont pas à s’exprimer sur le projet de loi sur la dénaturation du mariage.
    Or, à ma connaissance, les religieux sont aussi des citoyens, qui, en tant que tels, devraient avoir le droit de s’exprimer.
    A moins qu’en réalité, il y ait deux catégories de personnes :
    * les non-religieux, c’est-à-dire athées, agnostiques, laïcards de tous poils, etc…, qui sont les vrais citoyens : ils ont le droit de s’exprimer, surtout s’ils sont en faveur de la dénaturation du mariage ;
    * les religieux, c’est-à-dire les clercs mais aussi tous ceux qui se réclame d’une religion, qui sont des sortes de “sous-citoyens”, n’ayant pas le droit de s’exprimer (car, forcément, c’est au nom de leur Foi et, donc, ne doit pas entrer dans la discussion).
    Cela rappelle furieusement une conception du monde assez effroyable dans laquelle il existe deux catégories d’hommes :
    les citoyens et les autres (sous-hommes, races inférieures, etc.), avec -comme application concrète- la possibilité de l’esclavage, des pogroms, de l’apartheid, de la dhimmitude, etc… (ou -pour commencer- l’impossibilité d’accéder à certaines fonctions publiques : ex : maire, si la clause de conscience n’existe pas ?)
    La phrase de Binet aux représentants des cultes est, d’ailleurs, significative : “pouvez-vous faire l’effort intellectuel…”,
    autrement dit “vous les religieux, êtes-vous capables de comprendre la problématique des vrais citoyens, de ceux de la race supérieure, de ceux à l’intelligence supérieure,…”.
    Si ces gens (ceux de la subversion du mariage) gagnent, attendons-nous aux prochaines étapes : la marginalisation sociale (interdiction de rappeler les principes de la loi naturelle), puis l’exclusion sociale (interdiction de participer ou être élu à certaines fonctions), puis l’exécution sociale (condamnations pour tout récalcitrant).

  3. Bientôt le gouvernement socialo-maçonnique va se lancer dans une opération de fichage politique et religieux dans l’armée française ! Nous allons revivre les années calamiteuses du début du XXe siècle.
    Rappelons que ce fichage avait été réalisé par des loges maçonniques du Grand Orient de France à l’initiative du général André, ministre de la Guerre.

  4. Exceptionnel !
    Merci monseigneur.
    Jamais entendu ça comme ça de la part d un évêque aux armées.
    Il mérite un titre dans l armée céleste !

  5. bravo, tout ce qui est à dire, est dit, sans fioriture ni faux semblant
    rien d’autre à rajouter

  6. Merci de porter à notre connaissance ce texte très éclairant.
    Donc acte !

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