Partager cet article

Pays : International

Mali et Burkina Faso : l’affirmation d’un islamisme radical est d’abord le paravent d’intérêts économiques ou politiques à base ethnique

Mali et Burkina Faso : l’affirmation d’un islamisme radical est d’abord le paravent d’intérêts économiques ou politiques à base ethnique

De Bernard Lugan :

Dans le sud du Mali, dans le nord et dans l’est du Burkina Faso, les massacres se multiplient depuis plusieurs semaines. Vouloir les expliquer par le jihadisme contemporain est une vue de l’esprit car leur arrière-plan est à la fois ethno-historique et inscrit dans la longue durée.

Nous sommes en réalité en présence de la résurgence de conflits datant de la fin du XVIIIe et de la première moitié du XIXe siècle. La région fut alors dévastée et conquise par des éleveurs peul dont l’impérialisme s’abritait derrière le paravent religieux. Il y eut alors trois jihad peul. Celui d’Ousmane dan Fodio débuta en 1804 et il dévasta le pays Haoussa ; celui de Seku Ahmadou ravagea le Macina à partir de 1818. Quant à celui d’El-Hadj Omar, il s’étendit à toute la région de la boucle du Niger ainsi qu’au Macina à partir de 1852. Partout les sédentaires furent razziés pour être réduits en esclavage. Au Mali, les principales victimes furent les Bambara et les Dogon. Au Burkina Faso, dans le Gourma, la constitution de l’émirat peul du Liptako se fit par l’ethnocide des Gourmantché et des Kurumba (le numéro de juillet 2019 de l’Afrique Réelle contiendra un dossier consacré à la question du Gourma-Liptako et à la région dite des « Trois frontières »

Les actuels affrontements, notamment ceux opposant Peul et Dogon, tirent directement leur origine de ces épisodes ignorés ou lointains pour les Européens, mais totalement présents dans la mémoire locale.

A partir de 1893, la colonisation établit la paix et les Dogon redescendirent peu à peu des falaises dans lesquelles ils s’étaient réfugiés pour se réinstaller dans la plaine occupée par les Peul. Or, depuis deux ou trois décennies, en raison, de l’essor démographique et de la péjoration climatique, la cohabitation entre les deux peuples est de plus en plus difficile. D’où de très nombreux affrontements avec constitution de milices ethniques d’auto-défense. Avec opportunisme, les jihadistes ont infiltré les milices peul. Résultat, les Dogon pensent revivre le retour du jihad qui, au XIXe siècle les chassa de leur terre.

Dans les immensités sahéliennes, domaine du temps long, l’affirmation d’un islamisme radical est d’abord le paravent d’intérêts économiques ou politiques à base ethnique. Mais, pour le comprendre, encore faut-il connaître l’ethno-histoire régionale. C’est pourquoi j’ai écrit « Les Guerres du Sahel des origines à nos jours », un livre spécialement consacré à cette question.

Partager cet article

2 commentaires

  1. J’ai bien peur que Bernard Lugan ne fasse qu’enfoncer une porte ouverte. L’islam ou l’islamisme, car les deux ne font qu’un, n’a jamais été autre chose que le ” paravent d’intérêts économiques et politiques ” si l’on accepte d’appeler tels la volonté de puissance d’une force brutale.
    Mais c’est avoir une bien piètre idée et de l’économie et plus encore de la politique.

  2. qu’on les laisse faire ce qu’ils veulent chez eux!
    respect de s souverainismes locaux, rapatrier les centaines de nos jeunes soldats qui risquent leurs vie là bas!

Publier une réponse

Nous utilisons des cookies pour vous offrir la meilleure expérience en ligne. En acceptant, vous acceptez l'utilisation de cookies conformément à notre politique de confidentialité des cookies.

Paramètres de confidentialité sauvegardés !
Paramètres de confidentialité

Lorsque vous visitez un site Web, il peut stocker ou récupérer des informations sur votre navigateur, principalement sous la forme de cookies. Contrôlez vos services de cookies personnels ici.


Le Salon Beige a choisi de n'afficher uniquement de la publicité à des sites partenaires !

Refuser tous les services
Accepter tous les services