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Valeurs chrétiennes : Famille

Ludovine de la Rochère: “S’il y a une chose que je regrette, c’est de ne pas avoir fondé la Manif pour tous beaucoup plus tôt !”

Ludovine de la Rochère: “S’il y a une chose que je regrette, c’est de ne pas avoir fondé la Manif pour tous beaucoup plus tôt !”

A l’approche des 10 ans de la première manifestation contre le projet de loi dénaturant le mariage, la présidente de La Manif pour tous, Ludovine de La Rochère, déclare dans Valeurs Actuelles :

[…] La Manif pour tous “fêtera” à l’automne ses dix ans d’existence ; quel regard portez-vous sur cette décennie de lutte ?

Les associations LGBT militent depuis plusieurs dizaines d’années. Lorsque nous avons fondé La Manif pour tous, elles avaient déjà bien avancé leurs idées dans l’opinion publique. Leur stratégie repose sur la définition d’un agenda avec des revendications en chaîne : Pacs, mariage, adoption, PMA sans père, GPA, transidentité, multiparentalité… Or leurs avancées ont été favorisées par la faiblesse de l’opposition. Notre arrivée en force en 2013, avec des manifestations immenses, a surpris l’opinion, les élus, les journalistes, nos opposants. Ils ont été dans la sidération, puis ils ont repris leur rhétorique habituelle, nous qualifiant de “violents”, d’“homophobes”, de “réactionnaires”… Au terme d’un bras de fer militant et politique, la loi Taubira a néanmoins fini par passer, amputée de la PMA sans père prévue à l’origine. Nous avons poursuivi notre mobilisation et obtenu en 2014, au lendemain d’une autre manifestation nationale, le retrait du projet de loi “famille” porté par la ministre Dominique Bertinotti, lequel incluait à nouveau la PMA sans père. La loi a fini par être votée à la fin du premier quinquennat d’Emmanuel Macron, mais ses promoteurs ont donc mis plus de huit ans à l’obtenir.

Dans notre histoire sociétale, une telle opposition dans la durée est inédite. Et ce n’est pas fini : nous continuons à agir, non seulement pour protéger la famille d’autres lois sociétales, mais aussi pour revenir au respect de la différence et de la complémentarité homme-femme et de tout ce que cela implique. Nous avons nous aussi un agenda ! Par ailleurs, ces mobilisations ont eu un impact incroyable, à commencer par une prise de conscience large et aiguë de la logique idéologique et politique du progressisme. Les ralliements ont été très nombreux et, parmi tous ceux qui nous ont rejoints, beaucoup ont compris aussi que la persévérance serait une arme essentielle pour l’avenir. C’est pourquoi La Manif pour tous s’appuie toujours sur des milliers de bénévoles, dont beaucoup de jeunes, à Paris et partout en France.

Je retiens aussi de ces années la joie intense d’avoir rencontré des personnes d’une générosité et d’un courage extraordinaires et celle d’avoir pu bâtir tous ensemble un mouvement exceptionnel qui a beaucoup appris de son expérience, qui agit de multiples manières, qui forme beaucoup de jeunes et prépare ainsi l’avenir. Si nous sommes d’abord connus pour nos manifestations, cela ne représente en fait qu’une infime partie de notre activité. Veille parlementaire, législative et médiatique, argumentaires, notes blanches, sondages, campagnes, rendez-vous avec les politiques et les journalistes, interventions dans les médias, conférences sont autant d’actions qui sont assurées tous les jours par nos équipes centrales et notre réseau.

[…]

Y a-t-il des choses que vous regrettez, des choses que vous voudriez changer, si c’était à refaire ?

S’il y a une chose que je regrette, c’est de ne pas avoir fondé La Manif pour tous beaucoup plus tôt ! Lorsque nous avons fondé le mouvement, en octobre 2012, l’agenda progressiste était déjà bien avancé. Ce retard est la première source de nos difficultés. Il aurait fallu mener, tout de suite après Mai 68, de grandes campagnes pour valoriser la famille, la maternité et la paternité. Au lieu de penser que l’Éducation nationale pourrait éduquer les enfants à la place des parents, il fallait lancer des initiatives pour accompagner les parents dans leur mission et obtenir le déploiement de politiques publiques ambitieuses et innovantes en faveur de la famille.

Hélas, les politiques en sont restés aux allocations familiales (qui, en plus, ont été réduites à peau de chagrin) et au quotient familial (largement rogné lui aussi au fil du temps). En fait, depuis 1945, ils n’ont eu aucune initiative, aucune volonté, aucun programme en faveur de la famille. Tout cela est d’une pauvreté consternante sachant que la famille structure toute la société et assure son avenir.

La France, pourtant, n’a cessé de s’enorgueillir de sa politique familiale et du supposé dynamisme de sa démographie. En vérité, si sa natalité était plus élevée que celle des autres pays d’Europe, elle est sous le seuil de renouvellement des générations depuis longtemps et elle a décroché encore davantage depuis 2015. Nous ne sommes plus, aujourd’hui, qu’à 1,83 enfant par femme. Mais Emmanuel Macron, qui prétend pourtant régler le problème du financement des retraites, n’en a cure !

Pire, la gauche, puis le macronisme mènent une politique anti-famille, de démolition des repères et de fracturation de la société depuis des années. Hélas, de son côté, la droite n’a pas fait le lien entre la bioéthique, les sujets dits “de société” et la famille. Ils ne perçoivent ces enjeux qu’en silos parce qu’ils n’ont pas de vision d’ensemble.

Nous nous sommes bien sûr attelés à la tâche, et c’est une autre dimension de notre travail. Pour la présidentielle 2022, nous avons proposé aux candidats de changer de paradigme, avec une vision globale et 80 propositions pour soutenir les familles. Ce travail est une clé pour l’avenir.

Comment donneriez-vous à voir la fertilité, la postérité de ce mouvement ?

Il me semble que La Manif pour tous est la source d’une détermination à agir, avec un état d’esprit nouveau : seuls comptent le résultat et le fond. C’est assez unique dans le paysage politique et associatif. Nos militants et nos soutiens, notamment les donateurs, sont conscients que nous devons tantôt agir sous la bannière de La Manif pour tous, tantôt lancer des labels autonomes, mais dont nous assurons la conception et le pilotage. C’est possible grâce à la fiabilité de nos équipes. On peut être engagé à La Manif pour tous et conduire une action où le mouvement n’est pas lui-même visible. Cet état d’esprit est un trésor. Il fait notre ADN et nous y sommes très attachés parce qu’il est essentiel pour notre combat.

Cela explique sans doute que tant de personnes et d’organisations nous demandent conseils et appuis. Nous sommes heureux de partager notre expérience, de favoriser et multiplier l’essor d’initiatives pertinentes. Je pense aussi à la mobilisation de la jeunesse. Nous avons aujourd’hui dans nos équipes les petits frères et sœurs des premiers bénévoles d’il y a dix ans. Il y a un renouvellement régulier, très encourageant. Il permet de concilier la transmission et la stabilité nécessaires à notre action. Du fait de leur implication à La Manif pour tous, beaucoup de jeunes ont repensé leurs projets d’avenir. Ils sont nombreux à s’être engagés dans l’enseignement, le journalisme, la politique, l’associatif, la culture…

Du point de vue culturel, justement, je note que les prises de position et les publications d’intellectuels, d’universitaires, de juristes et de scientifiques dénonçant le “wokisme”, dont le gender est l’un des piliers, sont de plus en plus nombreuses depuis dix ans.

À l’international aussi, la fertilité de La Manif pour tous me paraît importante. Je pense aux manifestations monstres à Rome en 2015. Organisées par La Manif pour tous Italia, elles s’opposaient à un projet législatif d’union civile et d’adoption pour les couples de même sexe. Finalement, l’adoption n’est pas passée. L’élan français a ainsi encouragé bien des pays à agir : l’Autriche, la Croatie, la République tchèque, la Finlande, Taiwan…

Par ailleurs, La Manif pour tous, qui est organisme consultatif à l’Onu depuis 2015, travaille avec des associations de nombreux pays dans le cadre du combat à mener auprès des institutions internationales. Les pays occidentaux utilisent en effet ces organismes — Onu, Union européenne, Conférence de La Haye… — pour imposer leur idéologie, les décisions prises (conventions internationales, résolutions européennes…) s’imposant de plus en plus aux États membres. Ce faisant, ils suscitent leur rejet du reste du monde. Face à cela, l’action à l’international est cruciale.

Comment avez-vous vu évoluer vos adversaires, tout au long de ces dix ans de lutte ? Comment définiriez-vous aujourd’hui leur stratégie, leur comportement ? Quelle lumière cela jette-t-il sur leurs “revendications” ?

Nos adversaires se sont révélés ces dernières années comme ils ne l’avaient jamais fait auparavant. Pendant longtemps, ils ont avancé à petits pas : ils ont voulu le Pacs, mais ils prétendaient qu’ils ne voulaient pas le mariage. Puis ils ont voulu le mariage, ce qui signifiait de facto l’adoption aussi, mais ils ne l’évoquaient jamais…

Dès 2012, nous avons dénoncé le projet de mariage et d’adoption pour les couples de même sexe, mais aussi la PMA sans père, la GPA et, plus largement, l’idéologie du genre. N’ayant aucun argument valable, nos opposants n’ont cessé de nous prétendre homophobes, de dire que « la théorie du genre n’existe pas », que nous fantasmions… Finalement, en 2018, une tribune parue dans Libération avait pour titre : « Oui, La Manif pour tous avait raison (sur tout) » !

Ils sont encore plus agressifs aujourd’hui, sans doute parce que La Manif pour tous perturbe leurs projets. Leur radicalisation les a conduits à se révéler et ce, dans leurs méthodes aussi. L’affaire Cayeux en est l’exemple type : ils veulent interdire, purement et simplement, tout propos qui ne va pas dans leur sens. Ils s’en prennent aussi à toutes les institutions, comme l’Église catholique.

Mais je suis convaincue que ces méthodes totalitaires se retourneront contre eux : nous ferons tout pour cela, ils peuvent compter sur nous ! Il faudra du temps, mais nous gagnerons, cela ne fait aucun doute.

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2 commentaires

  1. Ne vous en faites pas, le mariage est bien et reste l’union entre un homme et une femme. Sinon, c’est une union et non un mariage.

    On peut unir en mairie une personne à une autre du même sexe, à sa chaise ou à son chien (si, si, cela existe outre Atlantique) mais cela ne constitue pas un mariage même si on en usurpe le nom.

    Quand aux imbéciles qui prétendent qu’un homme peut avoir ses règles et porter un enfant, ils ne connaissent pas le sens des mots et ajoutent au malheur du monde.

  2. J’admire beaucoup le courage de cette femme mais je trouve qu’elle aurait dû citer Virginie Tellenne qui a initié ce mouvement et ne pas oublier qu’elle fût à l’origine de cette immense prise de conscience. Cela aurait été la moindre des gratitudes.

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