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France : L'Islam en France / France : Société

L’islam dans les « quartiers » a son eunuque : le Conseil national des villes

L’islam dans les « quartiers » a son eunuque : le Conseil national des villes

Le Conseil national des villes est un organisme certainement essentiel pour la société française. Jugez-en : placé sous l’autorité du Premier ministre, il

« concourt à la conception, à l’élaboration et à la mise en œuvre de la politique de la ville (en particulier les QPV, quartiers prioritaires de la politique de la ville). Il intervient dans les domaines de l’habitat, du cadre de vie, de l’éducation, de la santé, ou encore de la prévention de la délinquance ».

Instance « rénovée », il est chargé du suivi des mesures prises en matière de lutte contre les discriminations depuis 2015.

Il est bien évidemment mobilisé pour la grande cause nationale de l’égalité femme-homme décrétée par le Président de la République et produit avec gravité des éléments de langage entièrement conformes pour accompagner un Droit à la ville (sic) :

« Construire les indicateurs pour analyser les politiques sportives sous l’angle de la budgétisation sensible au genre (gender budgeting) »

(un peu d’anglais, ça hausse le niveau) ;

« Proposer des espaces de pratique sportive entre femmes (idée d’un sas) pour une prise de confiance en soi »

(de l’infantilisation ? pensez donc !) ;

« Organiser la réappropriation des espaces sportifs d’accès libre par les femmes, y compris en les définissant lors de marches exploratoires »

(une traduction eût été utile, mais elle n’a pas été fournie…) ;

« Enseigner l’histoire du sport à l’école / en collège afin de mettre en avant le combat de femmes pour l’accès à des disciplines sportives (marathon, boxe …) »

(on sait que toute grande cause nationale se traduit immédiatement par une demande d’intégration du sujet dans les programmes scolaires, au détriment des connaissances disciplinaires) ; tout ça dans un Communiqué de presse du 5 mars 2019 sur « Mettre le sport au féminin ».

Le CNV, qui travaille, a aussi publié le 21 juin 2018 un Avis intitulé : « La place des femmes et des jeunes filles dans les espaces publics dans les quartiers prioritaires de la politique de la ville », sous l’égide du ministère de la cohésion des territoires. Au-delà du même verbiage techno-genré, il a paru intéressant de s’intéresser à la façon dont l’islam, dont on connaît l’efficacité en terme de ségrégation homme/femme dans l’espace public, était analysé comme facteur spécifique. Le constat est limpide : auto-aveuglement total.

Cet auto-aveuglement est revendiqué dans un « principe liminaire » par le groupe de travail :

« au vu des diatribes, polémiques et anathèmes se focalisant sur la situation des femmes et des jeunes filles dans les quartiers, tant réelle que supposée, il ne nous revenait pas d’alimenter les stéréotypes, essentialisations et amalgames, et d’être vigilants sur les glissements sémantiques trop souvent à l’œuvre, notamment ceux, trop courants, entre QPV/ culture musulmane/ pratique de l’Islam/ islamisme, sans pour autant nier la réalité des dérives communautaristes que renforce un Islam politique ».

Il a donc été décidé, sans pour autant nier la réalité, de n’en pas parler. Le mot « islam » n’apparaît donc plus dans le rapport (seulement dans ses annexes).

A propos d’annexes, trois sont intéressantes.

1) Géraldine Santrot, professeur de philosophie au lycée de la Plaine de Neauphle à Trappes, puis de Plaisir (78), constate dans un témoignage :

« L’importation et l’expansion d’autres modèles culturels (traditionnels, religieux ou se prétendant tels) a plusieurs conséquences néfastes sur la liberté de choix et de comportements des jeunes filles : une plus difficile accessibilité à la parole publique qui se conjugue à l’intégration d’une prédisposition à ne pas s’affirmer, un accès plus rare à certains espaces accaparés par les garçons, une autocensure vestimentaire et comportementale, dont il est difficile de les faire parler ».

Quels autres modèles culturels ? Chut, silence. Il est défendu d’essentialiser.

Mme Santrot de continuer :

« Ce retour du passé se couple à l’arrivée d’une contre-culture selon laquelle le corps et la destinée des femmes ne leur appartiennent pas mais appartiennent au groupe. Ce type de régulation sociale relève de la structure tribale, dans laquelle le social, le politique et le religieux sont confondus : la société y exerce un contrôle complet et permanent sur chacun de ses membres. En cela, ce type de fonctionnement est par définition hors du champ républicain, lequel suppose que si j’ai fait tout ce que la loi exige et rien de ce que la loi interdit, le reste est à ma libre appréciation et ne regarde que moi ».

Là encore, quelle contre-culture ? Nous n’en saurons rien.

Elle continue :

« Comment cette prétendue « pudeur » vestimentaire peut-elle si aisément se présenter comme une valeur, et même une valeur féministe ? Pourquoi une femme serait-elle respectable à la condition que son corps soit couvert (il ne s’agit pas seulement du foulard de tête mais bien de la peau, des poignets et chevilles souvent) ? Hypothèse 1 : les religions récupèrent des réactions identitaires de gens qui ne maîtrisent pas les codes sociaux environnants ».

Vous aurez noté le « les religions ». On refuse les amalgames mais, en même temps, il ne faudrait pas stigmatiser.

On parle donc quand même des religions (on est bien obligé), mais surtout sans discriminer. Ainsi, le rapport un peu avant explique que

« les premières auditions ont porté sur la place symbolique des femmes dans la société hier et aujourd’hui : dès l’Antiquité la place des jeunes filles et des femmes et leur rôle économique et social avaient été codifiés, et que toutes les religions, notamment celles du Livre, et toutes les cultures avaient durablement ancré dans l’inconscient collectif – auquel les femmes elles-mêmes n’échappent pas – leur rôle social de dominées, d’objets assujettis et non de sujets ».

Pour des personnes qui refusent « d’alimenter les stéréotypes, essentialisations et amalgames », on peut difficilement faire mieux qu’avec les religions du Livre ! Tout est faux d’un point de vue historique et théologique. Mais il faut surtout ne pas nommer l’indicible.

Même quand, après avoir rappelé que

« dans notre pays républicain et démocratique, une norme supérieure et tacite issue de l’histoire et de l’héritage patriarcal s’impose à nous, celle du système du genre, agit comme une véritable symbolique du quotidien : comportements, codes vestimentaires, norme comportementale et norme identitaire », on constate que « cette norme est aujourd’hui plus prégnante dans les QPV. Culturelle, elle impose de façon accrue un contrôle social qui entrave les libertés des jeunes filles et des femmes, et se place au-dessus des valeurs et lois de la République… De nombreuses normes culturelles rendent aujourd’hui la présence des femmes illégitimes dans les espaces publics  ».

Normes culturelles ? Lesquelles ? Comment ? Mais, mon bon monsieur, on a dit qu’on ne nommait pas. Donc, on ne le saura pas.

2) Pourtant, et c’est la partie plutôt gag du rapport, s’il n’est pas question d’essentialiser l’islam, avec l’Eglise catholique, on peut y aller franco dans l’exégèse. La présentation de type académique d’Agnès de Préville, journaliste, et de Sabine Sauret, présentée comme bibliste, et auteurs de Le Déni, ils sont au pouvoir, elles sont au service, enquête sur l’église et l’égalité des sexes, comporte 8 pages (sur les 67 du rapport). Elle commence par le diagnostic suivant :

« Déconstruire les stéréotypes, c’est ce que nous avons été amenées à faire en écrivant notre livre, à partir des questions : pourquoi les femmes n’ont ni la parole ni le pouvoir dans l’Église catholique, pourquoi les hommes sont au pouvoir quand les femmes sont à leur service. En travaillant les textes de l’institution, nous avons mis au jour la cohérence d’un système homme-femme bien différencié et inégalitaire, qui ritualise la domination masculine, héritée de la société patriarcale dans laquelle l’Église était née, et qu’elle a sacralisée. En effet, l’Église a construit des archétypes féminins et masculins qui fondent et légitiment la division sexuée des rôles. Notre recherche nous a permis de comprendre comment fonctionnent les stéréotypes sexistes dans la société et pourquoi et comment l’Eglise se bat pour les maintenir. Son arme est le différentialisme qui rejoint de nombreux réflexes sociétaux. C’est pourquoi nous avons intitulé notre intervention, l’Église catholique, matrice des stéréotypes sexistes ».

On y apprend donc que les archétypes féminins catholiques sont coupable, pure, consentante, servante, muette et punie. Pendant que les archétypes masculins catholiques sont légitime, misogyne, divinisé, tout-puissant, chef, parlant et sachant.

On y apprend aussi par exemple que

« Oui est la seule parole autorisée pour les femmes. L’Annonciation est un texte clé qui a contribué à faire de l’obéissance, une vertu et un idéal pour elles. Ce récit établit le mythe du consentement, que la réflexion philosophique et politique déconstruit aujourd’hui. Cette notion est en effet ambiguë car elle suppose des rapports de pouvoir et une asymétrie et, elle cache le plus souvent l’emprise. La réponse de Marie à l’ange Gabriel (le fiat) « Je suis la servante du Seigneur ; qu’il me soit fait selon ta parole (Luc 1,38) », résume l’attitude attendue des femmes. Car Marie est donnée en modèle à toutes les femmes et ces paroles de l’Annonciation ont structuré l’inconscient collectif. C’est pourquoi, apprendre à dire non est un long chemin pour les femmes, car elles transgressent alors la norme sociale ».

D’où l’on comprend que Nathalie Loiseau, tête de liste de LaREM pour les élections européennes, ne soit pas plus dérangée par le foulard islamique que par le voile de Mère Térésa (qu’elle orthographie Theresa…) ou de sœur Emmanuelle. Tout s’explique.

On y apprend enfin avec quand même une certaine surprise que« l’invention de«la théorie du genre » a été le résultat d’un travail du Vatican, de l’Opus Dei et d’un certain nombre d’acteurs catholiques. Forgée par le Vatican, l’expression est passée dans le langage et elle est devenue l’idéologie à démasquer ».

3) Le réel finit pourtant par s’imposer : toujours en annexe, avec précision et sans équivoque dans le témoignage poignant de Fatiha Agag-Boudjahlat, auteur du livre Le grand détournement : féminisme, tolérance, racisme, culture. Ce n’est plus une présentation académique, une réflexion philosophique ni politique. C’est la vraie vie.

« Je vais commencer par un témoignage : Petite, j’ai grandi dans une ZUP qui a tardé à prendre un nom : Petite Hollande. Sans mixité ethnique et sociale, mais avec de l’emploi. Il suffisait qu’un garçon participe à une activité pour que nous, les filles, ne puissions pas en profiter. C’était quelque fois dit clairement par nos frères. Mais très vite, nous l’avions intégré. La contrainte est intégrée. Les choses se sont aggravées avec le développement d’une hyper-orthodoxie religieuse qui fait que les femmes n’ont pas leur place dans l’espace public, qu’elles n’y sont pas à leur place, qu’elles le traversent, que leurs trajets sont des routines qui répondent à des besoins impérieux : les courses, amener et ramener les enfants de l’école. Mais comme l’Arabie Saoudite qui oblige les femmes qui voyagent à être accompagnées par un parent masculin, les femmes et les filles doivent se doter de tuteurs: le caddie de course, l’enfant à chercher de l’école…. Je n’ai pas voulu faire une biographie mais réfléchir aux mots. Au détournement en bande organisée de termes qui pour moi appartenaient à notre patrimoine politique commun : tolérance (excision, avec l’appel à dépénaliser l’excision porté par la revue du Mauss par des intellectuels de gauche en 1989, en disant que nous ne pouvions, par intolérance, réprouver une pratique culturelle non mutilante), féminisme (qui prend les habits du racialisme pour combattre le patriarcat blanc mais défendre le patriarcat oriental), laïcité qui est présentée comme un œcuménisme et un levier de religiosité ostensible… Nous sommes dans une régression anthropologique, et le culturalisme empiète dangereusement sur le politique et l’égalité en droits et en dignité ».

Mme Agag-Boudjahlat poursuit :

« Liberté. C’est le terme le plus détourné et le plus mis en avant. On l’invoque pour défendre le droit des femmes à se voiler.Personne ne pointe une arme sur la tempe pour commander aux femmes de se voiler. Mais considérons les avancées (forcées) du droit sur la notion de contrainte : c’est une obligation intégrée. Un sauf-conduit. Le signe que la femme consent à rester à sa place. Ce faisant, elle obtient le droit de sortir. Mais aux conditions et en respectant les modalités imposées par le patriarcat oriental et islamique. La liberté consiste alors à obtenir le maximum de ce qu’une femme peut obtenir dans un cadre réglementé par les choix des hommes… Le retournement est tel que le foulard est présenté comme le signe d’empowerment : de puissance d’agir féminine… Nous sommes dans un contexte d’hyperghettoisation : la réalité de ségrégation sociospatiale urbaine est doublée d’une chape de plomb religieuse. Qui est oppressive : pression qui induit que ceux qui ne suivent pas l’orthodoxie sont de mauvais musulmans… Il n’y a guère que pour les droits des filles et des femmes que le retour en arrière est possible et à l’œuvre… Nous assistons à une volonté de retraditionnalisation des femmes et de leur rôle. Elles conduisent, elles ont instagram, snap, mais il est d’autant plus nécessaire de cylindrer leur éducation : voilement des petites filles…. Nous avons besoin de l’Etat et de son autorité, de son ambition pour les citoyens, et pas seulement de son assistance sociale ».

Donc, récapitulons :

  • L’expansion d’autres modèles culturels (traditionnels, religieux ou se prétendant tels) a plusieurs conséquences néfastes sur la liberté de choix et de comportements des jeunes filles
  • Arrivée d’une contre-culture selon laquelle le corps et la destinée des femmes ne leur appartiennent pas mais appartiennent au groupe
  • De nombreuses normes culturelles rendent aujourd’hui la présence des femmes illégitimes dans les espaces publics
  • Développement d’une hyper-orthodoxie religieuse qui fait que les femmes n’ont pas leur place dans l’espace public
  • Nous sommes dans une régression anthropologique
  • Nous assistons à une volonté de retraditionnalisation des femmes et de leur rôle
  • Nous avons besoin de l’Etat et de son autorité

Mais le CNV a décidé qu’il ne lui revenait pas d’alimenter les stéréotypes. L’islam n’est donc pas un problème. Il n’est cité ni comme cause, ni comme cible dans les plans d’actions. Qui sont, eux, tous genrés, c’était un minimum. Le CNV est certainement plein de bonne volonté ; mais il a choisi l’évitement. Il a choisi l’impuissance. Le rôle de l’eunuque.

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3 commentaires

  1. Existe-t-il un manuel de traduction de ce langage, car moi pov’blanc, pas comprendre?

  2. Bon !

    Arrêt immédiat du traitement avec le Padamalgam 500 dans tous les Ministères et organes de gouvernement.

    Remplacement par du Di-cernement 2000 en alternance avec du Biencomun. Prendre de l’antiYunker et du merkelulsif en cas de crise.

  3. comme dirait Houlebec : SOUMISSION

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