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Les Chinois s’intéressent de plus en plus à nos exploitations agricoles

Les Chinois s’intéressent de plus en plus à nos exploitations agricoles

Loup Mautin est père de famille et agriculteur dans le Perche. Il exerce son activité dans les domaines de la polyculture et de l’élevage depuis 22 ans. Au sein du Rassemblement national, il a lancé le forum Terres de France en novembre 2018. A l’occasion du 56e Salon International de l’Agriculture il répond dans Présent :

Pourtant le monde agricole souffre et la réalité est parfois difficile ?

La vitrine est un peu trop belle quand on connaît la vraie vie des campagnes, quand on côtoie la misère du bout des chemins ou que l’on partage le quotidien du fin fond du bocage. C’est pourtant une bonne chose qu’une fois par an, la plus grande ferme de France se mette sur son 31 pour montrer le meilleur d’elle-même parce qu’elle sait que les Français l’attendent, que le monde entier la regarde. Il n’y a jamais eu un tel attachement pour le monde agricole. Les citadins sont fiers de leurs terroirs et de leurs paysans. Et c’est bien là le paradoxe car dans l’arrière-boutique, la réalité est très différente.

La dérégulation en cours actuellement favorise les ambitions affichées des Etats-Unis, du Brésil et de la Chine qui ont la capacité de pratiquer des prix issus d’un dumping social ou environnemental sur lequel il est impossible de nous aligner. C’est la raison pour laquelle notre agriculture est grandement fragilisée, y compris vis-à-vis de certains pays au sein même de l’UE en raison de l’absence d’harmonisation fiscale et sociale, et de charges salariales plus élevées en France. De plus, le démantèlement de la Politique Agricole Commune en cours actuellement, a largement fragilisé la position des agriculteurs français et européens par une exposition plus forte à la volatilité des prix.

En conséquence de quoi, le monde rural souffre et nos agriculteurs n’arrivent plus à vivre de leur travail. Personne n’ignore le drame des suicides (un tous les deux jours en France) et la misère des revenus toutes filières confondues. Nous avons le sentiment d’être la variable d’ajustement de choix politiques dont le pouvoir n’a plus les moyens.

Cette réalité de la mondialisation, comment se manifeste-t-elle dans votre profession ?

Les défis des prochaines années sont colossaux. En 2050, il y aura 10 milliards de bouches à nourrir et notre agriculture est grisonnante. Certains l’ont bien compris, ce qui attise d’ores et déjà les convoitises. Un immense mouvement de financiarisation du foncier est à l’œuvre : 40% de nos terres agricoles sont détenues par le biais de sociétés par actions, contre 10% il y a seulement une dizaine d’années. Les Chinois (20% de la population mondiale pour 10% des terres arables) s’intéressent de plus en plus à nos exploitations agricoles. Des milliers d’hectares leur ont été vendus. L’envol du prix des terres rend de plus en plus difficile l’installation des jeunes agriculteurs qui ne peuvent soutenir la concurrence. Dans ce domaine, un protectionnisme ciblé est vital. L’alimentation est trop stratégique pour répondre aux règles classiques du libre-échange. C’est notre souveraineté et notre sécurité alimentaires qui sont en jeu.

D’autre part, d’ici dix ans, la moitié des agriculteurs cesseront leur activité et un exploitant sur deux ne sera pas remplacé. Qu’allons-nous transmettre ? Que deviendra le modèle d’agriculture familial français qui a façonné le monde rural ? Nos savoir-faire ? Nos traditions ? Ce patrimoine a besoin d’être protégé.

Mais l’agriculture française possède déjà de nombreuses marques et appellations reconnues ?

Nos produits sont d’une qualité exceptionnelle. Malheureusement, les produits importés en vertu des accords de libre-échange signés avec la terre entière par l’UE inondent nos marchés et font chuter les cours. De surcroît, nos concurrents ne respectent pas les normes sanitaires et environnementales que nous nous imposons. C’est une distorsion de concurrence déloyale très préjudiciable aux producteurs que nous sommes et c’est un danger pour le consommateur dont la sécurité alimentaire peut être menacée. […]

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4 commentaires

  1. Qu’attendons-nous pour mobiliser l’épargne des Français pour constituer des fonds susceptibles de s’opposer au pillage de notre patrimoine foncier par ces sociétés par actions qui détiennent déjà 40% de nos terres agricoles?

  2. Certes.
    Mais parallèlement, personne ne s’offusque chez les citadins de “l’artificialisation” (ou bétonnisation) de nos meilleurs potentiels agronomiques au rythme effarant de 60000ha chaque année rien qu’en France !!
    Les Auchan, Leclerc, Carrefour, Decathlon ou autres Amazon consomment notre tissu rural dans l’indifférence générale ! Tout cela est d’une hypocrisie déconcertante. En cas de coup dur, ce sera la misère telle qu’on ne l’imagine pas car notre alimentation dépend exclusivement de la logistique, laquelle est entre des mains étrangères à nos intérêts vitaux…

  3. J’ai été exploitant dans l’agriculture pétrolière et suis heureux de l’avoir quitté, de ne plus être complice de Monsanto et Bayer (qui acheta autrefois des femmes à Buckenwald pour ses expériences), de ne plus éventrer le sol avec ma charrue ni déverser ces tonnes d’engrais qui y achèvent toute vie. Je suis heureux de ne plus approvisionner les multinationales céréalières ni les centrales d’achat des hypermarchés. Je suis heureux de ne plus avoir à remplir le dossier PAC ni à entretenir la multitude de “conseillers” et de contrôleurs. L’avenir de l’agriculture pétrolière, bio ou non, se confond avec celui du monde techno-libéral : la banqueroute. J’espère que ce sera dans les meilleurs délais car en attendant c’est la nature qui trinque ainsi que tous ceux qui ingèrent chaque jour ces molécules de synthèse faites pour tuer. J’ose espérer qu’un nombre significatif d’agriculteurs quittera cette agriculture de mort avant la débâcle, afin d’adopter l’agriculture sur sol vivant dont le rendement potentiel est le double. Mais pour cela, plus qu’une reconversion, c’est un conversion qui est nécessaire…

  4. Les agriculteurs vendent leurs terres au plus offrant, donc c’est les chinois qui achétent, mais je ne pense pas qu’ils vont emmener les terres chez eux, donc ils font travailler des français je ne vois pas il faut hurler

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