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Pays : International

Le scandale LIBOR ou la dérive du capitalisme de connivence

Lu sur H16 :

"Pour ceux qui suivent de près les sites financiers, la nouvelle n’a pas été réellement surprenante : le LIBOR, le marché des taux interbancaires à Londres, est massivement manipulé. C’est une information qui circule depuis plusieurs années dans les milieux boursiers, et qui était déjà disponible depuis février dernier pour ceux qui se donnaient la peine de s’informer. Pour rappel, le LIBOR est le London Interbank Offered Rate, autrement dit le taux auquel les banques se prêtent de l’argent. Ce taux est fixé à 11h (heure de Londres), par un groupement de banques déterminé (la British Bankers’ Association) et concerne les prêts non gagés par des titres. Au passage, il existe la même chose sur d’autres marchés, comme celui de la zone euro (EURIBOR). De façon indirecte, ces taux définissent aussi ceux des crédits aux ménages et aux entreprises.

Au courant du mois de février, on apprenait donc, dans la discrétion feutrée qui sied à tout ce qui se passe dans le monde de la bourse, que le taux auquel les banques se prêtent sur le marché de Londres (un marché de 350.000 milliards de dollars) était largement bidouillé. Pour le moment, Royal Bank of Scotland (qui fut l’une des banques sauvée en 2008 de la faillite à grande injection d’argent gratuit du contribuable britannique) et Barclays sont directement impliquées dans le scandale qui secoue toute la City. […]

Cette affaire est particulièrement symptomatique de la crise financière qui n’en finit pas de secouer le monde actuellement. Les éternels contempteurs du capitalisme y trouveront, une fois encore, les raisons d’alimenter leur haine d’un monde qu’ils ne comprennent pas et que l’écrasante majorité jalouse en secret pour les milliards qu’il brasse sans eux. Ils argueront encore une fois que tout ceci ne serait pas arrivé avec « les bonnes régulations ». On ne peut que rire devant ces arguments ridicules : tout ceci étant déjà parfaitement interdit, tous ces marchés étant déjà, théoriquement, sous les yeux vigilants des autorités de régulation financière (SEC et compagnie), on comprend que le problème ne se situe pas dans les lois, mais plutôt dans l’éthique de ceux qui devraient les appliquer…

A contrario, les réalistes (dont, bizarrement, beaucoup de libéraux) verront que cette affaire, supplémentaire, illustre très bien l’incroyable dérive du capitalisme de connivence, de l’état lamentable dans lequel se trouve maintenant l’ensemble de la finance à force de mariages consanguins et incestueux entre le monde politique et les coulisses financières. La City n’est plus qu’un cloaque de patrons fricotant sur base biquotidienne avec les réguliers du gouvernement britannique, tout comme les banques françaises sont intimement mêlées au pouvoir politique et aux administrations françaises en place (il n’est qu’à voir le nombre d’énarques, parfaitement incompétents en matière bancaire, mais propulsés à la faveur de leurs accointances dans les conseils d’administrations de ces établissements, pour se convaincre de l’interpénétration nauséabonde des deux milieux, politiques et financiers).

L’État totalitaire, pour asseoir son hégémonie, a besoin de canons, de fusil et de soldats qui feront les guerres qu’il faudra pour assurer sa propre pérennité. L’État social-démocrate, lui, a bien compris qu’il n’était pas nécessaire d’envahir un pays pour exister ; il lui suffit donc, pour se maintenir, de se brancher directement au monde financier. Après tout, c’est l’État qui est maître de la monnaie, qui définit le médium de toutes les transactions, et qui punit sans faiblir ceux qui tentent de s’extraire de son joug, qu’il soit monétaire ou fiscal. En cela, la sociale-démocratie aura permis aux larrons et autres aigrefins politiques de trouver de bons truchements pour leurs goûts immodérés de pouvoir et de luxe.

Et s’il faut que cette porosité se traduise par des actes purement et simplement illégaux, qu’à cela ne tienne. Résultat : plus aucune banque d’importance, plus aucun établissement financier un tant soit peu remarquable n’est indépendant des politiciens qui, en l’échange de passe-droits et de regards tournés à gauche lorsqu’on bidouille à droite et inversement, récupèrent une partie des fonds ainsi collectés et, par voie de conséquence, du pouvoir afférent.

Maintenant que cette affaire éclate, il va être particulièrement intéressant de voir comment la presse va s’emparer du morceau (surtout la presse française concernant les banques elles-mêmes françaises). Et, encore mieux, cette semaine promet d’être intéressante : cette affaire se développe alors qu’on sort tout juste d’un sommet européen fanfaronné comme décisif et réussi…"

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6 commentaires

  1. Ce n’est pas la SEC qui régule les banques au Royaume-Uni, mais la FSA. La SEC, c’est aux États-Unis…

  2. “L’argent est un mauvais maître mais un bon serviteur”

  3. “c’est l’État qui est maître de la monnaie” : imaginez le retour au Franc avec Sarkozy ou Hollande…

  4. “plus aucune banque d’importance, plus aucun établissement financier un tant soit peu remarquable n’est indépendant des politiciens ” ou l’inverse.

  5. La gauche bobo GB est mouillée :
    SCANDALE LIBOR : AU TOUR DU LABOUR ? (PRESSE GB)
    http://www.arretsurimages.net/vite.php?id=14163
    Il y a une grande littéraure sur la manipulation des cours par les salles de marchés elles mêmes notamment via ce que l’on appelle des markets makers trop bien informés et ne parlons pas des délits d’initiés sans lesquels la plupart des tarders ne feraient pas le quart de leur bonus.

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