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France : Politique en France

Le sain communautarisme face à la dissociété nationale

De Rémi Fontaine dans Présent :

"Si le mouvement national peut apparaître aujourd’hui inopportun ou inefficace à certains, ce n’est pas par erreur propre, intrinsèque, c’est parce que nous sommes descendus d’un cran, si l’on peut dire, dans la décadence et dans la nécessaire réaction de survie (contre-révolutionnaire) à lui opposer. Au point d’induire, par empirisme organisateur, ce sain et légitime communautarisme, d’un niveau différent, mais qui est loin pourtant d’être contradictoire avec le nationalisme à la française. On pourrait dire aujourd’hui de ce « communautarisme » ce qu’Henri Charlier disait hier du nationalisme : « Chez nous le nationalisme n’a été qu’un moyen intellectuel de défendre par des arguments puisés dans l’histoire et la philosophie le sentiment naturel d’amour de la patrie qui y était combattu par toutes sortes d’idéologies et un enseignement falsifié de l’histoire, auxquels beaucoup de catholiques se laissent prendre. » Mais que vient faire Péguy dans cette galère ? Lui qui voulait ardemment que « France et Chrétienté continuent », il l’a exprimé prophétiquement en des termes particulièrement imagés et parlants :

«Toutes nos maisons sont des forteresses in periculo maris, au péril de la mer. La guerre sainte est partout, elle est toujours, elle est à présent ce qui va de soi, ce qui est de droit commun. C’est pour cela qu’elle n’a plus besoin d’être décrétée, signifiée. Cette guerre sainte qui autrefois s’avançait comme un grand flot, dont on savait le nom, brisée aujourd’hui, émiettée en mille flots, vient battre le seuil de notre porte. Ainsi nous sommes tous des flots battus d’une incessante tempête, et nos maisons sont des forteresses dans la mer. (…) Les plus faibles, les femmes, les enfants au berceau sont déjà assiégés. La guerre bat le seuil de nos portes ; nous n’avons pas besoin d’aller la chercher, d’aller la porter. C’est elle qui nous cherche et qui nous trouve. Les vertus qui n’étaient requises que des hommes d’armes du Seigneur en armure, aujourd’hui sont requises de cette femme et de cet enfant. Nous sommes tous aujourd’hui placés sur la brèche, nous sommes tous à la frontière, la frontière est partout. (…) Miles Christi, tout chrétien est aujourd’hui un soldat : le soldat du Christ. Il n’y a plus de chrétien tranquille. Ces croisades que nos pères allaient chercher jusque sur les terres des Infidèles… ce sont elles aujourd’hui qui nous ont rejoints au contraire… et nous les avons à domicile. Nos fidélités sont des citadelles

L’état de la société politique française est tel aujourd’hui par l’œuvre révolutionnaire, individualiste et mondialiste, destructrice des corps intermédiaires et de la loi (morale) naturelle, qu’elle est devenue une dissociété nationale, selon le néologisme de Marcel de Corte. Sans plus vraiment de frontières protectrices (externes et internes) propres aux sociétés organiques (sociétés de familles et non pas d’individus) ordonnées à un bien commun et régies par le principe de subsidiarité. Le nationalisme à la française bien compris consistait déjà en une réaction à cette déstructuration systématique. Il constituait d’ailleurs un communautarisme supérieur, par sa volonté d’organiser, de hiérarchiser et développer les communautés légitimes de la nation (conformes à son bien commun) envers et contre ses communautés illégitimes (par exemple les « Etats confédérés » chez Maurras). […]

Du nationalisme à la française au sain et légitime communautarisme, le principe reste en effet le même à des niveaux différents (le premier ayant besoin du second et le second ne pouvant ainsi effacer la légitimité politique du premier quelle que soit sa difficulté) : «Si les saints peuvent prier en paix et les sages travailler avec fruit, c’est que l’épée guerrière, menée par le sceptre des rois, a déterminé autour d’eux la zone où ces occupations sublimes restent possibles. Quand Syracuse est prise, Archimède est égorgé et tant pis pour le théorème» (Maurras).

Oui, la guerre bat le seuil, non plus de nos nations chrétiennes, mais de nos maisons elles-mêmes autrefois tranquilles : celles-ci sont des forteresses au péril de la mer menaçant nos femmes et nos enfants, puisque précisément le rempart national s’est écroulé, après celui maintenant ancien de la chrétienté. Nos (saines et légitimes) communautés, nos humbles maisons paternelles, sont nos derniers remparts, nos dernières frontières : n’allons pas leur opposer dialectiquement les ruines de la Maison nationale que des hommes de bonne volonté s’acharnent héroïquement à vouloir encore défendre et reconstruire pour le bien de tous. Car, pour tenir ensemble sur nos créneaux domestiques, il faudra bien un jour que France et Chrétienté ressuscitent !"

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1 commentaire

  1. Nos foyers domestiques n’ont pas les mêmes armes que la communauté nationale, par principe : la porte de la demeure familiale est facilement enfoncée si le rempart de la cité a été abattu, pour demeurer l’image de C. MAURRAS, qui recoupe sur le fonds le principe invoqué par R. FONTAINE concernant l’ordre des fins propres à chacune de ces réalités naturelles.
    Le problème du nationalisme français est qu’il a souvent et continue, y compris dans les milieux catholiques, de confondre l’Etat et la société, la nation et les corps intermédiaires, les premiers, Nation et Etat, niant les seconds, société et corps intermédiaires : ainsi le souverainisme anti eurofédéraliste se bat pour la survie de l’indépendance de l’Etat mais ignore la survie de l’indépendance des corps sociaux naturels. Or, comment la communauté nationale réduite au seul Etat tout puissant peut-elle survivre si elle asphyxie les corps intermédiaires ?
    Comment le français comme culture universelle peut-il survivre s’il a tué les langues et cultures provinciales et régionales qui l’ont alimenté durant un millénaire ?
    Il en va de même pour nos familles : peut m’importe que l’Etat français demeure libre d’organiser l’école en France, si moi comme parent je ne puis choisir librement le modèle scolaire qui correspond à la tradition française et catholique la plus classique et permanente ?
    Le nationalisme peut aussi être une impasse s’il n’est que jacobinisme de l’Etat-Nation.

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