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Culture de mort : Eugénisme

Le monstre du transhumanisme inquiète jusqu’aux apprentis sorciers

Jacques Testart, le "père" du premier bébé éprouvette signe un article alarmant sur le projet transhumaniste (qu'il avait déjà qualifié d'eugéniste), sans réaliser qu'il a lui-même alimenté le chaudron,  tombé aujourd'hui dans les mains d'apprentis sorciers plus "ambitieux". Le raisonnement, qui est discutable à certains égards, est intéressant, venant de ce genre de personnalité :

"Le projet transhumaniste est vieux comme le monde humain : depuis toujours les hommes ont rêvé de géants, de sorciers, de héros invincibles ou immortels. Ce qui est nouveau c’est que l’accélération récente des capacités techniques apporte de l’eau au moulin transhumaniste dans la plupart des domaines, faisant crédibles des délires jusqu’ici à peine pensables. Et ce mouvement profite de deux phénomènes inédits : d’une part la mort de Dieu qui crée un vide à occuper par d’autres puissances issues de l’homme, d’autre part les catastrophes environnementales qui obligent à réagir au nom de la survie. Les réponses transhumanistes à ces défis dessinent, de façon encore très imprécise, un monde où l’homme (certains ? la plupart ? tous ?) bénéficierait de nouveaux pouvoirs grâce à des technologies en progrès exponentiel et illimité. L’humanité accéderait alors à la stature des héros rêvés depuis toujours, ce qui lui permettrait d’ échapper au sort funeste que ses propres actions ont préparé. Le transhumanisme se veut donc aussi une réponse à la crise écologique, mais c’est par la négation, voire l’exacerbation, des phénomènes qui ont créé la crise. Logiquement, il rencontre la sympathie de tous les acteurs irresponsables qui nient ces évènements (négationnistes) ou qui en profitent (investisseurs en quête éperdue de croissance infinie). C’est dire que ce qui pourrait passer pour délire infantile venu du pays de Dysney est à prendre au sérieux.

Il est impossible d’analyser ou seulement d’énumérer tous les projets lancés par les théoriciens du transhumanisme. L’élevage des embryons in vitro tel que décrit par Aldous Huxley , dans des conditions supposées capable d’influencer des fonctionnalités futures, est dépassé par la volonté plus radicale de modifier le génome grâce à la transgenèse. Outre des prothèses intégrées au corps pour lui donner des pouvoirs décuplés ou carrément nouveaux, on nous promet de nouvelles capacités d’intelligence, et bien sûr des machines intelligentes (dont des robots bientôt dans les foyers) ainsi que des connexions entre le cerveau et la machine. Car le transhumanisme pense le vivant comme une mécanique sophistiquée mais très imparfaite, dont chaque rouage doit être repensé en supprimant toute rupture conceptuelle entre l’inerte et le vivant ou entre l’animal et l’homme. La phase de recherche utilise largement les handicapés (y compris la compétition aux jeux paralympiques ) car augmenter l’homme handicapé pour lui conférer la normalité est accepté depuis longtemps. Le problème est quand la correction du handicap permet de dépasser la norme…

Toute personne qui dispose d’un smartphone est déjà un homme augmenté. Pourvu qu’il prévoit le rechargement de sa machine, il pourrait s’isoler sur la montagne tout en disposant de pouvoirs inédits dans l’histoire de l’humanité: se géolocaliser, converser avec la planète entière, consulter toutes les bibliothèques et connaître l’actualité du monde physique ou politique instantanément… Beaucoup ont déjà cette possibilité sans se douter qu’ils sont entrés en transhumanité… Nos prothèses vont se cumuler à un rythme accéléré, s’accompagnant de séductions largement partagées. Ce qu’on refuserait aujourd’hui, parce que la proposition fait violence, on le demandera demain et on ne saura plus s’en passer après demain. C’est la force du « progrès » que d’annuler les interrogations éthiques ou prudentielles par la vertu de l’accoutumance. Alors, c’est bien en amont qu’il faut décider de ce qu’on acceptera, c’est à dire qu’il faut poser des limites à la toute puissance.

Chacune des promesses des transhumanistes mériterait examen, non seulement pour sa faisabilité mais aussi pour sa capacité de nuisance. Car la période récente a montré que, bien souvent, l’important dans l’innovation n’est pas l’innovation elle même mais l’instabilité qui l’accompagne comme naturellement, depuis le risque jusqu'au danger, et parfois la catastrophe. Nous avons été capables de construire d’énormes barrages et des centrales nucléaires, de multiplier le rendement des cultures, de nous déplacer à des vitesses incroyables, d’inventer des molécules surpuissantes, de tripler l’espérance de vie, etc… Mais en même temps nous avons inventé ou aggravé les inondations, la dissémination radioactive, la disparition des abeilles, les accidents de transport, les maladies chroniques et neurodégénératives, etc… Il semble plus difficile de maîtriser les effets de chaque innovation que d’en inventer toujours de nouvelles. Or, les transhumanistes nous promettent des bouleversements complets qui concernent nos corps, leurs relations entre eux et leurs relations au monde. Et ces propositions exaltent l’exploit en ignorant la complexité et l’aléatoire. Par exemple, il serait irresponsable d’un seul point de vue technique de fabriquer des humains génétiquement modifiés alors qu’on ne maîtrise toujours pas les interférences au sein du génome ou entre le génome et l’environnement, comme le révèlent les plantes ou animaux transgéniques. On dira que l’addition de prothèses est moins problématique car elles ne sont pas transmises par l’hérédité, si bien que leur abandon demeurerait ultérieurement possible. C’est oublier l’héritage social et culturel qui inscrit l’acquis comme une nouvelle norme, un « avantage acquis ». Sinon, il serait clair pour tous qu’il existe des grands projets inutiles et on aurait déjà éliminé toutes les centrales nucléaires, la Bourse ou l’idéal de compétition ! Nos dirigeants nous ont promis toujours plus de bien-être tout en augmentant la proportion de chômeurs, de sans logement, sans papiers, sans racines, sans avenir… Quelques rares penseurs (Illich, Anders, Ellul, Gorz, Charbonneau…) avaient prévu cette issue du « progrès » et proposé l’autolimitation de la puissance pour que l’homme ne soit pas soumis à la technique et conserve son autonomie qui est une condition de la liberté. De quels drames seront payés les bouleversements transhumains ? Ceux qui les proposent ne s’intéressent pas à la précaution mais seulement à la performance.

La mouvance transhumaniste n’est pas homogène mais la plupart de ses théoriciens se désintéressent de l’impact politique de leurs propositions. D’autres seraient tentés par l’élitisme, une conséquence logique d’un mouvement qui vise la performance plutôt que le bien-être. Alors, le mépris des « ratés », des indésirables ou des résistants au système transhumain ouvre la voie déshumanisante de sociétés à plusieurs vitesses, inégalitaires si ce n’est totalitaires. Mais il existe aussi des transhumanistes soucieux du respect des personnes (j’allais écrire des transhumanistes humanistes !…), comme si cette profession de foi pouvait être conciliable avec le but d’effacer les frontières entre l’humain et l’animal, entre le vivant et la machine. La démocratie est menacée quand une hiérarchie apparaît entre les hommes selon le degré et l’efficacité de leur « augmentation », quand les cyborgs et même les robots sont hiérarchisables sur une échelle d’efficacité dans l’artifice. La confusion des genres éclate quand certains chercheurs proposent de donner des droits aux robots… Pour l’ensemble des transhumanistes, l’homme n’est qu’un agrégat d’organites à toutes les échelles biologiques (molécules, cellules, organes), bien loin de la conception humaniste et donc en recul sur les droits acquis pour les personnes.

Des moyens financiers importants sont attribués aux recherches des transhumanistes , surtout aux USA (universités, armée, industrie de l’informatique…) mais aussi en Europe (par exemple le programme européen Human brain project). Les prophètes nous annoncent l’intelligence artificielle pour 2029 et l’homme immortel pour 2045, même si cet événement désigne seulement le téléchargement de l’esprit dans une machine… Il n’est pas certain que toutes les propositions des transhumanistes dépassent le stade théorique. Ainsi, plutôt que par des bidouillages génétiques (transgenèse), c’est vraisemblablement par l’identification de caractéristiques abondantes que les humains seront sélectionnés dans l’œuf ou orientés dans leurs activités, puis prévenus des risques individuels et soignés en continu (médecine personnalisée) . La question n’est pas de parier sur la faisabilité des projets mais, prenant en compte l’accoutumance et les pressions des lobbies scientistes et industriels, de décider bien en amont (tout de suite) ce que nous souhaitons, c’est à dire de quoi nous avons besoin. Mon opinion est que l’homme nouveau (celui dont rêvait Che Guevara) vaut mieux que cet homme augmenté que calculent avec arrogance les ordinateurs. Plutôt que de technologies envahissantes nos sociétés ont besoin de justice, de convivialité et aussi de sobriété pour la survie d’un monde fragilisé."

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9 commentaires

  1. A ceux qui ne l’auraient pas encore lu, je recommande le livre du docteur Jean-Pierre Dickès : “l’ultime transgression, refaçonner l’homme”, dans lequel il nous alerte sur toutes ces horreurs et les resitue dans le programme mondialiste.

  2. N’est – ce pas la philosophie de Nietzsche qui est émise ici ?

  3. La Tour de Babel n’est pas loin

  4. Le transhumanisme, c’est le truc qui transforme les ministres en guen … euh non en Amazones ?

  5. Dieu n’a-t-il pas dit à Adam et Eve: “Ne touchez paz à l’arbre de la Connaissance”. Mais le Serpent a sifflé aux oreilles d’Eve: “Mais si, car vous serez comme des Dieux… vous serez comme des Dieux”. Nous connaissons la suite. Aujourd’hui le serpent siffle toujours et Eve ecoute de plus en plus…. Mais alors où serons-nous chassés?

  6. Je suis tombé hier soir sur une émission de téé (à laquelle participait l’inévitable Mélenchon) dans laquelle une sorte de Dr Folamour faisait sa propagande transhumaniste, prétendant que grâce aux prothèses et à la modification du génome humain, l’homme vivrait 1000 ans. Heureusement un jeune écrivain (Enthoven je crois) lui a tenu tête.

  7. Complot sataniste si personne ne l’avait remarqué !
    ONLR

  8. Je n’ai pas l’impression que l’homme ait réussit à intégrer la machine, ni qu’une machine ait pu intégrer quoi que ce soit d’humain et je ne pense pas que cela soit possible.
    Pour qu’une machine devienne humaine, il faudrait qu’elle puisse générer ses propres représentations (et notamment se constituer une représentation d’elle-même: une identité).
    Inversement, nous pouvons tous utiliser une calculatrice, ce n’est pas pour cela que nous serons plus avancés dans la compréhension des logarithmes.
    Désolé, mais pour le moment, la technique n’a en rien augmenté l’homme: capacité de compréhension, de séduction, de vitalité d’action, nous ne sommes pas devenu autre et nous ne connaissons pas de nouvelles expériences du fait de la technologie.
    Le seul qui a l’air de profiter de la technique (au détriment du citoyen) c’est l’Etat.
    En ce qui me concerne, le véritable ennemi, c’est le métissage: là oui, nous chutons à jamais, nous n’aurons plus envie de nous-mêmes.

  9. A chaque fois que l’homme a rêvé de puissance ( Rome, Grèce antique, Egypte antique…) cela s’est achevé par une dérive du bien commun et un retour à l’anéantissement du projet humain sous une forme ou une autre. Laissons les rêveurs rêver de Gloire et de puissance. Se prennent-ils pour Dieu ? Laissons-les faire en riant dans nos moustaches. Car à chaque fois que l’être humain s’élève de lui-même par orgueil, INVARIABLEMENT la nature lui rappelle tôt ou tard qu’il n’est qu’un rampant et le jette au bas de son prétendu trône. Plus nous enfreignons ses lois (qui sont des lois Divines à la base) plus le malheur s’acharne sur nous. Pauvres surhommes !

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