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Pays : International

La ‘nation’ algérienne

En visite dans la région de Constantine, le président algérien Abdelaziz Bouteflika a relancé lors du journal de la mi-journée de la télévision algérienne la polémique sur la présence française en Algérie (1830 à 1962) :

"La colonisation a réalisé un génocide de notre identité, de notre histoire, de notre langue, de nos traditions,(…) nous ne savons plus si nous sommes des Amazighs (Berbères), des Arabes, des Européens ou des Français".

Bouteflika lance l’intéressante question de l’identité algérienne. Face à son ignorance, il faut faire quelques rappels utiles :

Algerie_carte À la différence de ses voisins, le Maroc et la Tunisie, dont l’existence en tant qu’État remonte à plus d’un millénaire, l’Algérie était avant 1830 un territoire sans État, peuplé notamment de juifs. En 46 avant JC, Jules César annexe le royaume de Maurétanie et le transforme en une province romaine. Pas plus que les envahisseurs qui leur succèderont, les Romains n’arrivent à soumettre les populations indigènes des montagnes : pasteurs semi-nomades héritiers des Numides, que l’on appelle Berbères ou bien Kabyles. Au IVè siècle, dans l’empire devenu chrétien se lève une personnalité hors pair, Saint Augustin. Il meurt en 430 tandis que l’arrivée des Vandales, envahisseurs venus d’Outre-Rhin, ruine pour très longtemps l’Afrique du nord.

En 534, le général Bélisaire reconquiert le littoral et les plaines pour le compte de l’empereur romain d’Orient, Justinien. Les Byzantins vont se maintenir pendant près de 2 siècles sur place, jusqu’en 680. La conquête arabe se révèle ardue du fait de la résistance opiniâtre des Kabyles. L’Afrique du nord est brièvement unifiée au XIe siècle par les Almohades venus du Maroc qui s’emparent du royaume berbère de Bougie et écrasent les Arabes de la tribu des Banu Hilal, venus d’Égypte un siècle plus tôt. La décomposition rapide de l’empire almohade entraîne à nouveau le fractionnement de l’actuelle Algérie en royaumes rivaux (Tlemcen, Bougie,…).

Les Espagnols en profitent au début du XVIe siècle pour prendre pied dans les ports : Mers el-Kébir, Oran, Bougie, Le Penon (en face d’Alger). Menacé, le roi d’Alger appelle à son secours des corsaires, les frères Barberousse. En 1516, ces musulmans d’origine albanaise s’installent à Alger. Ils évincent le roi et, 4 ans plus tard, instituent la Régence et se placent sous la protection du sultan turc d’Istamboul. Le 21 mai 1529, Barberousse devient le maître tout-puissant de la ville d’Alger et de ses environs immédiats. Lui-même et ses successeurs vont dès lors écumer la Méditerranée jusqu’à la veille du débarquement français en Algérie : les barbaresquesC’est par dizaines de milliers que se comptent les malheureux paysans, voyageurs ou marins enlevés à leur famille, condamnés à la mort lente et aux travaux forcés, au harem s’il s’agit de femmes.

2613_1 Une fois l’ignorance, levée, il serait bon de se demander pourquoi Bouteflika fait porter les maux de l’Algérie à la France. Est-ce pour cacher ces massacres ? Quant à la colonisation, en comparaison de cette histoire troublée, elle ne peut être que positive. Le nom même d’Algérie a été donné par la France.

Michel Janva

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4 commentaires

  1. On peut aussi se poser la question de savoir pourquoi M. Bouteflika vient se faire soigner en France (Val de Grâce en 2005), il n’y a pas de médecins en Algérie ?
    C’est que les “colons” ne sont finalement pas si mauvais peut-être ?….
    cordialement

  2. Merci pour ce petit rappel historique.
    Un autre point, le Sahara (avec son pétrole) n’a jamais été algérien, si ce n’est depuis les accords d’Evian !

  3. En réalité le grand perdant de l’épopée algerienne de la France fut surtout le Maroc. Les territoires historiquement marocains correspondants aux régions de Tindouf et Bechar ont été administrativement rattachés à l’Algérie Française puis transmis en package à l’Algérie indépendante créant des contentieux territoriaux à ne plus en finir.
    Il est clair que la décolonistion de l’Algérie a été faite dans la plus grande des précipitations.
    Quoi qu’il en soit, si on doit retenir au moins un aspect positif de la colonisation francaise en Algérie c’est celui d’avoir offert à ce pays “pure création française” un territoire au moins 5 fois plus grand que celui de l’ex régence turque d’Alger qui correspond à l’entité que les Francais on trouvé sur place à leur arrivée.

  4. Bonjour,
    Je voudrais juste corriger certaines erreurs :
    En 46 av. JC, après la bataille de Thapsus entre Césariens et Pompéiens, ce n’est pas la Maurétanie qui est annexée, mais l’Africa “nova” et la région de Cirta (Constantine), c’est à dire la future Numidie (constituée en tant que province dans les faits à partir de Caligula en 37-41 ap. JC, puis officiellement sous Septime Sévère en 193-211).
    La Maurétanie (dite “césarienne”, de Caesarea, l’actuelle Cherchel) n’a été annexée que sous Claude (41-54).
    L’Algérie actuelle regroupait en fait deux provinces romaines au Haut Empire (Maurétanie césarienne et Numidie), puis trois à partir de Dioclétien (284-305) (on a alors créé la Maurétanie “sitifienne” pour la région de l’actuelle Sétif, zone tampon entre les deux anciennes provinces).
    Tout ça pour montrer l’absence d’unité réelle avec des provinces très différentes dans leur histoire et dans leur statut. La Maurétanie césarienne était en effet une province impériale procuratorienne (cad dirigée par un gouverneur de rang équestre), la Numidie une province impériale proprétorienne (cad dirigée par le légat de légion, en l’occurence la IIIe légion auguste stationnée à Lambèse à l’ouest de l’Aures).
    Au Haut-Empire, la région correspondant à l’actuelle Algérie était peuplée de berbères de différentes tribus plus ou moins en bonnes relations avec Rome (certaines étaient sédentarisées et vivaient selon le modèle de la cité, d’autres restaient à la marge), de citoyens romains d’origine italienne ou africaine (les principaux foyers de romanisation étaient la région de Cirta-Constantine en Numidie et la cité de Caesarea-Cherchel en Maurétanie).
    Historiquement, l’Algérie antique était donc nettement coupée en deux (en gros de part et d’autre de Sétif). De plus l’autorité romaine ne s’exerçait vraiment que sur une mince bande côtière, tout le sud de l’Atlas algérien restant incontrôlé.

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