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Médias : Désinformation / Pays : Etats-Unis

La désinformation de la presse française sur les Etats-Unis

En lisant la presse française à propos de la déroute électorale de Barack Obama, Henri Hude, actuellement aux Etats-Unis, n'en croit pas ses yeux :

O "Si les choses continuent à aller dans le même sens, l’essentiel de l’information utile sur les USA (en France, ou plutôt à Paris) finira par se concentrer dans les blogs, et dans les agrégats de blogs […] Comme d'habitude quand il s'agit de près ou de loin du président Obama, la presse française vit dans un curieux déni de réalité. Veut-on un exemple de ce qu’écrit la presse américaine ? Dans le Washington Post, (4 novembre 2010, A 31), nous lisons que la majorité électorale qui avait porté Obama au pouvoir a éclaté. […]

Un premier article français, que je vais commenter dans cette lettre, et qui donne le ton, s’intitule : «La chambre aux Républicains mais pas le Sénat.» Commençons par le titre. Ce titre est matériellement exact. Mais il induit en erreur. Il efface le fait objectif de la débâcle électorale du parti démocrate. Il masque le fait objectif de la désaffection des Américains pour le Président Obama. Voici pourquoi il manque gravement de sérieux professionnel, et pas seulement dans son titre :

D’abord, la majorité utile pour obtenir une décision au Sénat américain n’est pas de 51, comme ce serait le cas en France, mais de 60. C’est uniquement s’il a 60 sièges à lui tout seul (ce qui se produit rarement) que le parti au pouvoir peut imposer ses vues sans avoir à rechercher un compromis. Le nombre 51 n’a donc pas beaucoup de signification pour la fonction législative, il ne détermine que l'élection du président de l'assemblée et la répartition des fonctions dans les commissions. En outre, même avec 60 voix, il est recommandé au parti au pouvoir de ne pas passer en force, sans débat et sans concession. C’est le conseil que n’a pas suivi Barack Obama et c’est une des raisons pour lesquelles il est si sévèrement sanctionné. […]

La suite de l’article se contente d’énumérer plusieurs gains républicains et plusieurs belles résistances des démocrates, épinglant quelques faits importants, mais sans rien mettre en perspective. Il donne l’impression que les démocrates, quoique sévèrement étrillés, ont sauvé les meubles. Il donne surtout l’impression d’avoir été fait à la va-vite. […] Comme le notent quand même ces journaux français, notamment l’article qui m’a fait prendre la plume, le tiers du Sénat américain, non l’ensemble, soit 37 postes, était renouvelable. Mais cette dernière information est si peu complète qu'elle manque de pertinence. Le fait important, celle qu'un vrai professionnel n'aurait pas laissé passer, c'est que sur ces 37 sièges à pourvoir, il y avait deux fois plus de sièges républicains à renouveler (soit 23) que de sièges démocrates renouvelables (12). Les démocrates ont donc perdu au moins 6 sièges sur 12, et peut-être 7, donc au moins 50%. Il s’en est fallu d’un cheveu qu’ils n’en perdent neuf. Et plusieurs sièges ne sont pas encore attribués, pour diverses raisons. Si donc le Sénat avait été intégralement renouvelable, avec 59 sièges démocrates, il y aurait eu, en faveur des républicains, et toutes choses égales par ailleurs, une majorité sans précédent. Ceci est parfaitement clair dans les pages A 22 et A 23 du Washington Post du 4 novembre 2010.

L'information intéressante, le fait significatif, c'est donc que le parti démocrate a perdu beaucoup plus au Sénat qu’à la chambre basse, où il n’a perdu «que» le tiers de ses sièges, tout comme il n’a perdu «que» le tiers de ses postes de gouverneurs. La déroute à la Chambre est donc accompagnée d’un vrai désastre au Sénat. Les articles français disent ainsi très exactement le contraire de ce qui est : est-ce là ce qu'en France on appelle l'information ? Quand donc aurons-nous dans ce pays un peu plus d’éthique médiatique ? Ce reproche, notons-le, ne vaut pas pour tous les journaux. […] Bref, la presse française suit l’exemple célèbre du maraudeur : celui-ci avoue avoir volé une corde. Et c’est la vérité, sauf qu'il oublie de dire qu’il y avait une vache au bout.

Ce dont la presse française (ou du moins ce que j’en ai vu on line) ne dit presque rien, et ce qui est encore plus important, c’est le glissement historique des législatures locales […]. Comme on sait, chacun des 50 États possède non seulement un exécutif (le gouverneur), mais un mini-congrès avec deux chambres, plus une haute cour de justice, exactement comme la fédération des États-Unis. Les prérogatives des assemblées d’État sont considérables, par exemple en relève tout ce qui a trait à l’éducation. Or les républicains, sans presque rien perdre de leurs positions propres, ont conquis sur les démocrates 19 (sur 50) de la totalité (soit les 2 chambres) de ces assemblées d’États. Ils en ont à moitié conquis plusieurs autres. Cela représente pour les démocrates une perte située entre 50 et 60% de leurs positions locales. Selon le même article d'USA Today, 650 postes de sénateurs d'État et de représentants d'État ont été pris aux démocrates par les républicains, qui retrouvent ainsi leur niveau historique de… 1928. L’assemblée de la Caroline du Nord, tout comme celle de l’Alabama, ont été gagnées par le Parti républicain ; elles étaient démocrates sans la moindre discontinuité depuis 1870.

Ces élections de 2010 étaient particulièrement cruciales, car ce sont les "State Capitols" qui sont chargés d’effectuer le découpage électoral. Or le prochain, qui suivra la publication du recensement de 2010, déterminera les résultats de 2012. […]

Bref, si l’on tient compte de tout cela, on a l’ensemble de l’image : un référendum contre le président Obama, qui s'est engagé à fond dans la campagne ; une punition de son "mensonge" : comportement jugé idéologique et partisan depuis qu'il est à la Maison Blanche, faisant suite à une campagne présidentielle en 2008, qui avait séduit par son aspect centriste et bipartisan ; une motion de méfiance à l’égard de ses principales politiques ; enfin, une déroute électorale de ses partisans, parmi les plus sévères de toute l’histoire de la démocratie américaine."

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8 commentaires

  1. Henri Hude a écrit “Comme on sait, chacun des 50 États possède non seulement un exécutif (le gouverneur), mais un mini-congrès avec deux chambres, plus une haute cour de justice, exactement comme la fédération des États-Unis”.
    Ce n’est pas tout à fait exact car le parlement du Nebraska est monocaméral, il ne comporte qu’une seule chambre.

  2. Il s’agissait d’un article du Figaro. J’ai été très déçu (mais guère étonné) de voir un soit-disant journal de droite réagir comme le Monde ou Libé…

  3. Il fallait entendre les lamentations sur toutes les chaînes et radios pour y croire !
    Néanmoins, le lendemain, c’était fini et on passait à autre chose…

  4. à Marc
    la France est profondemment enkystée dans le SOCIALISME DEPUIS PLUS DE TRENTE ANS !
    comment pouvez vous penser que le Figaro soit un journal de “droite” ?
    ps : Sarko avec l’umps poursuit la politique de ses prédécesseurs : SOCIALISME
    avec plus de mondialisation, plus d’immigration et toujours plus d’Etat. Avec les résultats que tout un chacun peut apprécier
    consulter un peu fdesouche.com et rebelles.info

  5. La France manque cruellement d’une presse indépendante et crédible, d’une presse faisant un vrai travail d’investigation et d’information objective et fiable, le plus souvent nous sommes dans l’idéologiquement correct.

  6. La suffisance,(et parfois la mauvaise foi) de beaucoup de nos media trotsko-lenino marxistes, dits de référence ou représentatifs, est telle que bien évidemment ce sont les américains qui se sont trompés en votant mais pas eux! d’ailleurs vous allez voir….

  7. A petitjean,
    Mon commentaire portait sur le Nebraska…

  8. Les medias français mentent sur les USA depuis longtemps mais plutôt tôt que tard ils en feront les frais…la Vérité les rattrapera sévêrement…par les faits

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