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Religions : L'Islam

Islam et démocratie : qu’en pensent les musulmans ?

Dans un article intitulé "Islam et démocratie" du dernier numéro de La Civiltà Cattolica, la revue des jésuites de Rome, le jésuite Giovanni Sale, historien, s'interroge. Après avoir affirmé qu’il n’y a aujourd’hui que deux Etats musulmans où l’on entrevoie des éléments de démocratie, le Liban [sic] et la Turquie, le père Sale passe méthodiquement en revue les thèses qui, en Occident, se disputent le terrain :

"Sur ce sujet délicat, les analystes occidentaux se répartissent en trois catégories : les 'optimistes', eux-mêmes divisés en 'gradualistes et 'réalistes' (qui soulignent les exigences de la Realpolitik au plan international), les pessimistes et les sceptico-possibilistes".

D’après le père Sale, le chef de file des optimistes gradualistes est Bernard Lewis, historien à Princeton.

Les optimistes réalistes sont les néoconservateurs arrivés sur le devant de la scène pendant la présidence Bush et décidés à implanter la démocratie dans les pays musulmans, mais également prêts à s’allier avec des régimes despotiques amis.

Le maître à penser des pessimistes est Samuel Huntington, qui estime qu’entre le monde musulman et la démocratie il y a une antinomie irréductible, qui produit un choc de civilisations.

Enfin les sceptico-possibilistes soutiennent que la démocratie ne doit pas être implantée dans les pays arabes par l’extérieur mais qu’elle ne peut naître et grandir dans ces pays que par l’intérieur. Toutefois beaucoup d’obstacles s’opposent à cette évolution, notamment le facteur religieux.

En conclusion, l'article rejette à la fois la thèse du choc des civilisations et celle, néoconservatrice, de l'exportation de la démocratie y compris par les armes. En revanche il partage à la fois la thèse optimiste gradualiste de Bernard Lewis et l'avertissement des sceptico-possibilistes quant aux obstacles qu’il faut surmonter, dont le premier est l’obstacle religieux :

"L’Islam et la démocratie peuvent devenir compatibles à condition que l’élément religieux, avec toute sa richesse de contenus et d’expériences, serve de simple point de référence éthique et moral à l'action de l'interprète de la science sociale, sans prétendre dicter des normes à l’Etat et à la politique".

En clair : l'islam et la démocratie sont compatibles si l'islam n'est plus l'islam. Dans son article, le père Sale met en valeur l’analyse du monde musulman par Daniel Pipes, consultant de la Maison-Blanche du temps de Bush. Selon Pipes, il existe, à côté d’un vaste ensemble de fondamentalistes radicaux, une population encore plus large de musulmans dont l’hostilité à l'Amérique et à l'Occident tient plus au milieu social dans lequel ils vivent qu’à une conviction enracinée, et enfin une autre population de musulmans "modérés" non hostiles aux valeurs occidentales. Pipes – considéré comme un "faucon" – souligne l'importance "d’un engagement culturel et civique qui encourage les musulmans modérés à travailler à un profond changement démocratique et civique des sociétés musulmanes". Une "voie musulmane vers la démocratie" est possible : c’est la conclusion de l’article. Mais "c’est une voie entièrement à étudier et à mettre en œuvre".

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20 commentaires

  1. Ne pas mettre la charrue avant les boeufs; exporter d’abord le christianisme et la question de la démocratie ne sera plus qu’une question de temps.

  2. Ce père jésuite ne sait sans doute pas qu’il y a du pétrole dans les pays arabes. Le problème n’est pas l’islam, c’est le pétrole ! Les analystes américains et les subtiles distinctions du père jésuite sont des exercices en chambre. Demain on trouvera… des armes de destruction massive en Iran… pour s’emparer du pétrole. La démocratie est une question de coût des élections avec guerre ou sans guerre.

  3. Je mets ce message ici mais ça s’applique aussi aux articles qui parlent du voile, de l’oppression musulmane contre les chrétiens, etc.
    Vu sur le site L’évangile au quotidien :
    http://www.levangileauquotidien.org/main.php
    on fête aujourd’hui 27 juillet les martyrs Sts George, Aurèle et Nathalie, Félix et Liliose, martyrs (+ 852)
    « Saints Nathalie, Aurèle et leurs compagnons (Morts en 852)
    Aurèle et sa femme Nathalie faisaient comme tous les chrétiens de Cordoue : ils cachaient leur foi. Voyant un jour un chrétien se faire bafouer en public, ils décidèrent avec des amis de ne plus se cacher ni d’avoir peur. Arrêtés parce que les femmes ne portaient pas le voile, ils furent condamnés à être décapités. Un moine qui était l’hôte d’Aurèle et de Nathalie, craignant que sa qualité d’étranger ne l’empêchât d’être martyr lui aussi, il injuria Mahomet. Ils furent tous décapités dans l’ordre suivant : Félix (ami d’Aurèle), Georges (moine), Liliose (femme de Félix), Aurèle et Nathalie. »

  4. Je citerai pour ma part Saint Vidian, martyr des sarrasins de mon village natal Martres-Tolosane.
    La théorie selon laquelle il-y-aurait une masse de musulmans ne se sentant pas concernés par leur “religion” ne tient pas.Il a toujours suffi que ces majorités soient “mises à feu” par des minorités “agissantes” au milieu d’eux, auquel cas ils ne s’en désolidarisent jamais et combattent pour conquérir de plus en plus, par opportunité, suivant leur “beau modèle” irréformable.

  5. Ne pas oublier que les musulmans ont la loi naturelle gravée dans chacun de leurs coeurs, malgré tout et qu’il est difficile d’étouffer complètement cette loi.
    C’est donc le droit naturel qui constitue la base du dialogue laïc avec les musulmans… et les autres, y compris nous.
    Ce n’est pas leur titre de musulmans, mais leur titre d’être humain qui importe pour l’édification d’une société commune.

  6. Le pire ennemi du christianisme en général et du catholicisme en particulier est la démocratie elle-même.
    Pourquoi voudriez-vous que les musulmans en veuillent. Comme nous, ils la subissent lorsqu’ ils sont en position de faiblesse.
    L’ essence même de notre religion est incompatible avec une gestion démocratique de la société.

  7. @ Denis MERLIN
    Entièrement d’accord avec vous : la loi naturelle est LA base d’un accord minimum avec les musulmans. Quand on vit au sein d’une société musulmane, on comprend que c’est ce que l’islam n’a pas détruit, même si certaines pratiques sociales l’ont amoindrie (mais il en a été et en est encore de même dans les sociétés chrétiennes).
    Le couplet anti démocratique de certains est assez simpliste. Si la démocratie doit remplacer et redéfinir la loi naturelle, elle est néfaste. Mais si elle reconnait celle-ci, elle peut être un moyen de gouvernement des sociétés : les musulmans aspirent autant que d’autres à vivre dans des sociétés où la liberté de la personne et sa dignité soient reconnues (la démocratie moderne ne les a pas inventées, et en a hérité, mais eux voient l’occident au travers de forme contemporaine).
    Si nous considérons que les musulmans sont destinés à périr en enfer, nous ne sommes pas chrétiens. Or convertir à la foi ne se fait pas que par des raisonnement théologiques : beaucoup de musulmans très croyants admirent les réalisations morales et culturelles du monde chrétien et déplorent les archaïsmes de leurs sociétés. C’est un levier puissant pour les amener à réfléchir sur les racines islamiques du totalitarisme des sociétés musulmanes.
    On peut combattre l’islamisation de la France, tout en s’appuyant et en appuyant ceux qui au sein de l’islam dans les pays musulmans tentent un rapprochement avec nous. Entre choc des civilisations dans leurs principes, et modus vivendi concret, il y a toute la marge et l’espace du dialogue inter religieux et de la politique des états.
    En ce sens la phrase du Gal DE GAULLE rapportée par Alain PEYREFFITE sur ”Colombey les deux mosquées” si l’Algérie était demeurée française est d’une profonde ineptie, et démontre bien que ce personnage n’était que très superficiellement catholique.

  8. Quand on ne veut pas combattre on trouve tous les arguments nécessaires. J’ai eu plusieurs échange avec Daniel Pipes entre 2003 et 2004.
    Il est ambigu: il appuie le likoud en Israël et a critiqué fortement Sharon lors de l’évacuation de Gaza, mais en effet il tient à sa théorie des musulmans “modérés” que nul ne trouve jamais, même dans des pays comme l’Egypte où la répression contre les Coptes bat son plein avec l’appui de l’état.
    Sa position se comprend quand on sait qu’il est arabisant et qu’il fut séduit par l’islam quand il en fit l’étude. Mais sa conscience de scientifique l’entraîne à dire la vérité et à encourager l’occident à ne rien céder à l’islam religion politique.
    Il a beaucoup changé ces dernières années du fait des menaces reçues de la part des musulmans américains (Le CAIR par exemple)
    Cette affaire est la quadrature du cercle, et je dirai avec Nietzche: l’occidental moderne est la contradiction faite homme qui veut tout et son contraire, et en ce sens il est décadent, ce que ne sont pas le musulmans.

  9. Je ne comprends pas (bien) votre réponse, cher Chris du Fier.

  10. 3 constatations
    L’islam est une hérésie chrétienne.
    Ce qu’on peut souhaiter de plus heureux à un musulman, c’est la conversion. C’est possible et chaque jour des musulmans se font baptiser (secrétement) quand ils ont eu la chance de rencontrer des chrétiens qui témoignent de leur foi. Mais a t-on jamais vu un pays ou même un groupe musulman devenir massivement chrétien ?
    Bien sûr la démocratie est incompatible avec l’islam. Mais ce que des chrétiens peuvent espérer de mieux dans ces pays est peut être un régime autoritaire (donc peu démocratique) qui pourra s’imposer même à l’islam. L’Iran en 1975 était sans doute moins démocratique qu’aujourd’hui, mais les chrétiens y vivaient mieux qu’aujourd’hui.
    Le Maroc n’est pas vraiment démocratique, mais le sort des chrétiens serait certainement moins enviable dans une république islamique.
    Donc je ne crois pas que les chrétiens gagnent grand chose à brandir l’étendard de la démocratie dans les pays musulmans.
    Enfin, pour conclure (et je comprends que cela en laisse beaucoup insatisfaits), Dieu lui même a accepté que l’islam soit parfois vainqueur, parce que d’une façon mystérieuse son dessein providentiel s’accomplira malgré tout d’une façon encore plus éclatante et qui déjouera tous les calculs humains. Qui aurait prédit l’effondrement du communisme dans les années 50 ? L’avenir est à Dieu.

  11. Je pense qu’il y a de grands naïfs ici… Préférer l’islam à de Gaulle, c’est un comble !!!

  12. Je comprends votre réponse, Chris du Fier. Je ne sais pas si vous suivrais sur tous vos chemins, mais je comprends l’expression d’un tel discours.
    Je vous encourage à développer.

  13. La meilleure façon de modérer un musulman est de le christianiser.

  14. 0 Clément
    Il y a dans tous les pays musulmans une partie des élites et des classes moyennes instruites qui aspirent à la démocratie : elles ne peuvent pas s’exprimer, car les pouvoirs musulmans font de la démagogie en direction des classes défavorisées anti occidentale pour faire oublier leurs insuffisances ou leur corruption.

  15. Bien que n’ étant ni philosophe et encore moins érudit, je vais tenter d’ expliquer mon sentiment au sujet de la rivalité qui existe entre une société dite démocratique et qui se choisit elle-même ses lois et une société régie par des lois divines, ce qui m’ a poussé à écrire que je crois sincèrement qu’ un régime démocratique est le pire ennemi pour un croyant du Livre.
    Le petit Larousse définit ainsi le mot ‘démocratie’ : Régime politique dans lequel le peuple exerce sa souveraineté lui-même, sans intermédiaire d’ un organe représentatif ou par représentants interposés.
    C’ est la porte ouverte à la décadence morale que l’ on voit tout les jours dans nos pays : avortement, promotion permanente de la sexualité sous toutes ses formes mêmes les plus abjectes, refus de l’ effort et du sacrifice indispensable pour assurer le futur des générations prochaines,refus du partage des valeurs chrétiennes, intoxication et endoctrinement des masses sur de fausses valeurs, telles le nationalisme à outrance, l’ ethnocentrisme devoyé, l’ égocentrisme exacerbé à son paroxysme, la religion du pognon, etc..
    Toutes ces anti-valeurs ont été propagées par la démocratie et ont provoquées la perte de la foi chrétienne dans nos pays.
    What Else ?..

  16. @ PG
    Reprenez moi si je me trompe, mais n’ est-il pas vrai que les ‘élites et les classes moyennes instruites’ comme vous les nommez en terre d’ Islam ont été les premiers promoteurs et instigateurs du renversement du Shah et de l’ avènement d’ une république théocratique en Iran ?..
    Justement peut-être en raison de l’ intention du Shah de faire entrer ce pays dans la sphère des démocraties occidentales. Ces mêmes élites (non pas celles de la finance) en tant que musulmans ont bien senti le danger.

  17. @ Chris du Fier
    @ Nabulione
    Ces élites espéraient du Shah autre chose que sa politique dite de troisième voie et d’immobilisme social, lesquels ont facilité la subversion des mollahs. Elles espéraient avec la modernité technique, voire apparaître la modernité sociale et juridique. Le Shah a cru qu’une simple modernisation et légère augmentation du niveau de vie suffiraient à tenir le pays : les mollah ont joué sur le registre de la dignité face à l’Occident, alors que le régime impérial semblait immobile.
    Nabulione : on peut estimer que De Gaulle s’est trompé et a trompé les Français sur l’Algérie et l’islam, sans être un thuriféraire de cette fausse religion. Il a cru qu’en livrant l’algérie au totalitarisme socialisant et pro soviétique du FLN, il empêcherait la démographie algérienne d’être un problème pour la France, tout en signant les accords d’Evian, déjà désastreux en soi (perte du SAJARA et de son pétrole qui n’avaient jamais appartenu à la colonie turque d’Alger d’avant la colonisation française) et que de plus il ne fit pas respecter : Giscard et Chirac ont continué sa politique et les suivants firent de même.
    Il faut des nuances sur ces sujets sans quoi les simplifications mènent à l’impasse.

  18. Juste une remarque sur les “musulmans modérés” aspirant à la démocratie…
    Sont-ils à l’islam ce que les “catholiques modérés” sont au catholicisme ?
    Si c’est le cas, on peut effectivement se poser des questions sur la compatibilité de l’islam et de la démocratie.

  19. @ PG
    J’ adore vos ‘nuances’ en ce qui concernent vos explications tant sur la révolution islamique en Iran que sur les interventions du Président C. De Gaulle en Algérie……
    Elles sont effectivement toutes en nuances..
    mais assez peu convaincantes.

  20. @ Chris du Fier
    De Gaulle ne croyait pas à la possibilité d’une évolution de l’Algérie vers une prise en compte des élites algériennes favorables à la France : il a donc favorisé le FLN et l’indépendance en mentant aux Français, mais aussi aux algériens. Il était de ceux qui pensaient que l’Islam était un moyen de pouvoir, et que la démographie des musulmans d’Algérie d’Algérie jouait contre la France : il a donc, de façon totalement irresponsable, donné l’Algérie aux plus anti français, favorisant le socialisme tiers mondiste anti français du FLN, et l’islamisme qui l’accompagnait et qui a éclos avec le FIS. Avec en plus l’immigration de peuplement : tout cela était sans nuances et nous a mené à la situation actuelle.
    En Iran, les populations urbaines instruites souhaitent sortir de l’islamisme : cette évidence gêne ceux qui pensent que tout musulman est un crétin qui aime la dictature. Ce sont souvent les mêmes qui critiquent les USA pour leur interventions en pays musulmans, au nom de la liberté… Si cette liberté a un sens, elle vaut aussi pour les citoyens des pays musulmans et non pas seulement pour leurs états et dictatures. Ainsi en Irak, dans les trois provinces kurdes, les récentes élections ont failli donner la majorité à des partis réformistes.
    La démocratie n’est plus incompatible avec l’Islam qu’elle ne l’est avec le christianisme, si on la considère comme une méthode de gouvernement, et non comme une idéologie.

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