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Pays : Pologne

Pologne : l’enjeu de la décommunisation et le rôle de Lech Walesa

[La campagne pour le deuxième tour des élections présidentielles polonaises est en cours : les médias français en font peu de cas, ou bien en rendent compte en calomniant systématiquement le camp catholique. Un lecteur, Marek, qui a accès aux sources polonaises a bien voulu nous donner des informations de première main sur cette élection qui s’annonce pleine d’enseignements. Henri Védas]

L’une des figures dont on ne parle pas assez semble être celle de Lech Walesa. Ancien Président de la République polonaise (1990-1995) et prix Nobel de la paix (1983), Lech Walesa se positionne de manière particulièrement visible du côté du candidat libéral de la Plate-forme Civique (PO) Donald Tusk, pour lequel il encourage vivement les polonais à voter.

Nous pouvons nous demander pourquoi Lech Walesa se tient si près de Donald Tusk et nous interroger sur le comportement suspect que l’ancien président polonais laisse apparaître ces derniers mois. Est-ce donc la face cachée de Walesa que nous découvrons ? Nous pouvons légitimement nous le demander.

Le fils de l’ancien président Jaroslaw Walesa vient d’être élu député aux dernières législatives sous l’étiquette PO.

En février dernier, Lech Walesa a attaqué violemment la station du père Rydzyk : Radio Maryja aprés que celle-ci ait diffusé une émission révélant les liens de l’ancien président avec les services secrets communistes (SB) de 1970 à 1976. Lech Walesa aurait à l’époque usé du pseudonyme Bolek. Vous trouverez des preuves supplémentaires sur le site (en Polonais) de l’hebdomadaire "national-catholique"* Glos  ("la Voix") : il nous livre les noms non seulement de Lech Walesa mais également de nombreux députés et sénateurs qui avaient travaillé pour les services secrets communistes polonais et qui siégaient après "la fin du Communisme" (en 1989) sur les bancs  du Parlement et du Sénat.

Cette liste avait été fournie le 4 juin 1992 par le ministre des affaires intérieures de l’époque Antoni Macierewicz (actuellement chef du Parti Patriotique) qui siégait dans le gouvernement du premier ministre catholique Jan Olszewski. Le quotidien catholique Nasz Dziennik (Notre Journal) a rendu public, juste avant les dernières législatives, un film de Jacek Kurski intitulé "Le changement nocturne" (Nocna zmiana). Dans la nuit du 4 au 5 juin 1992, Lech Walesa et ses lieutenants, parmi lesquels un certains Donald Tusk (alors chef du Parti du Congrès Démocratique-libéral), décidérent en effet de renverser (opération réalisée avec succès) le gouvernement du premier ministre Jan Olszewski aprés justement la publication de la liste d’Antoni Macierewicz.

Le gouvernement de Jan Olszewski avait en effet souhaité une décommunisation totale de la société. Un scandale avait éclaté au parlement. Des rumeurs d’attentats avaient circulé. Donald Tusk avait alors fait tout ce qui était en son pouvoir pour convaincre ses partisans de voter la démission du gouvernement de Jan Olszewski et de permettre au chef du parti paysan Waldemar Pawlak (33 ans) de devenir premier ministre. Tout ceci dans le but bien entendu d’empêcher les lustrations des agents communistes et donc une grande transparence vis-à-vis du passé (Référence).

Bien que Lech Walesa ait été lavé de tout soupçon par certains tribunaux durant ces dernières années, l’affaire ne semble toujours pas classée et elle risque de prendre une tournure assez intéressante avec l’arrivée (nous l’espérons du moins) de Lech Kaczynski au pouvoir. Les historiens de l’Institut de la Mémoire Nationale (IPN) semblent d’ailleurs être divisés sur ce point de l’histoire lié à l’ancien président.

Si Lech Walesa semble avoir été particulièrement énervé par la victoire du parti Droit et Justice (PiS) des frères Kaczynski aux dernières législatives (et nous comprenons maintenant pourquoi), il risque de se faire vraiment du souci si Lech remporte la Présidentielle. Lech Walesa s’était d’ailleurs embrouillé avec les fréres Kaczynski au début des années 90. Les Kaczynski avaient demandé en effet au Président Walesa de s’en prendre aux anciens agents communistes mais ce dernier avait préféré prôner l’apaisement et rompre définitivement avec les Kaczynski. Ceux-ci avaient alors disparu de la scène politique. Il fallut attendre l’an 2000 pour voir Lech Kaczynski revenir sur le devant de la scène dans le gouvernement du premier ministre Jerzy Buzek au poste de ministre de la Justice. Sa popularité avait alors atteint 70 % au sein de la population polonaise (au sein d’un gouvernement soutenu par à peine 20 % de la population) grâce en partie à son esprit de justicier (alourdissement des peines pour les criminels, lutte contre la corruption).

Autre fait trouble, celui de la réconciliation ces derniers temps de Lech Walesa avec le Président post-communiste actuel Aleksander Kwasniewski mais aussi avec l’un des candidats à la présidence Marek Borowski (candidat de la Sociale-démocratie polonaise : Sdpl). Nous pouvons également ajouter qu’un débat télévisé amical avait été réalisé dernièrement entre Lech Walesa et le général et ancien Président de la république Jaruzelski.

S’il est vrai que Lech Walesa a mené la bataille pour la liberté de la Pologne et l’histoire lui en a rendu grâce, il existe certaines choses qu’il aura du mal à effacer et devra par conséquent en répondre devant le peuple. Il s’agit en quelque sorte de l’autre face de la médaille. Aprés avoir été élu Président de la république, Lech Walesa a préféré se soucier de ses intérêts personnels plutôt que de ceux du peuple polonais. Il a ainsi raté successivement sa réélection en 1995, ainsi qu’en 2000 où il n’a recueilli que 1.01 % des voix…

Marek

* Le terme de "national-catholique" ne semble pas avoir les mêmes connotations désastreuses en Pologne qu’en France ! (HV)

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