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Sciences

Darwinisme : le cardinal Schönborn persiste, signe et approfondit

La mise en cause du darwinisme est un sujet à la mode, et qui est traité dans les médias de manière abêtissante : pour La Vie du 12 janvier, l’intervention du cardinal Schönborn (ici, v.o.)  dans ce débat dans le New York Times en juillet dernier représentait une "première victoire d’un mouvement néoconservateur d’inspiration nord-américaine" !

Les débats actuels autour des théories de l’évolution, au carrefour de différentes disciplines, sont difficiles à suivre : les généralistes, comme votre serviteur, peinent à évaluer les arguments dans chaque domaine; tandis que les spécialistes peinent à prendre du recul par rapport à leur discipline.

Trop souvent, deux niveaux de débat sont amalgamés :

– A un premier niveau, le mouvement du "Dessein Intelligent" (ID) (autour du Discovery Institute) veut imposer un débat scientifique sur des "failles" dans la théorie de l’évolution. Ses principaux arguments portent sur des organismes qui ne peuvent avoir simplement "évolué" à partir d’un autre, car ils sont trop complexes. On peut prendre l’image suivante : les darwiniens disent que des saumons que l’on trouve dans un lac en altitude viennent d’un bassin en contrebas, après être remontés par un torrent; les tenants de l’ID plaident que certaines portions du torrent (chutes abruptes…), ne peuvent pas avoir été remontées par les saumons. Ce débat est, au coeur, purement scientifique, mais les deux parties tendent à déborder vers…

Le débat sur les conclusions anthropologiques ou théologiques que l’on peut tirer du darwinisme.

Ft0601C’est à ce dernier niveau qu’était intervenu le cardinal Schönborn l’an dernier. Constatant que sa tribune a "suscité énormément de réactions, et pas toutes positives", le cardinal est revenu sur le sujet dans le numéro de janvier de la revue First Things (ici, v.o.), où le physicien catholique Stephen Barr (ici, v.o.) l’avait critiqué.

Le cardinal Schönborn explique se situer non sur le plan de la foi, mais de la raison. Il s’attaque à un positivisme darwinien qui touche y compris des catholiques : si, d’un point de vue méthodologique, les scientifiques sont justifiés à faire comme si le mécanisme de l’évolution était autonome, ils ne peuvent en revanche imposer cette assertion en-dehors de leur discipline.

Ce qui passe fréquemment pour la science moderne – sur laquelle s’est greffé beaucoup de matérialisme et de positivisme – se trompe fondamentalement à propos de la nature. La science moderne est souvent, comme je l’ai écrit dans ma tribune [du New York Times] "de l’idéologie, pas de la science." Les problèmes causés par le positivime sont particulièrement aigus dans les larges conclusions anti-téléologiques qui sont tirées de la théorie de Darwin sur l’évolution, qui est devenue  (selon les termes du Pape Benoît XVI, écrivant il y a quelques années) la nouvelle "philosophie première" du monde moderne, une description totale et fondamentale de la réalité qui va bien au-delà de ce que lui permet la science […]. Ma tribune avait pour but de réveiller les catholiques pris dans un sommeil dogmatique à propos du positivisme en général et l’évolutionnisme en particulier. Elle semble avoir atteint son but.

Henri Védas

PS : Documents catholiques traitant de l’évolution : Encyclique Humani Generis de Pie XII; lettre de Jean-Paul II à l’Académie pontificale des sciences en 1996 (en anglais); document de 2004 de la Commission Théologique Internationale présidée par le cardinal Ratzinger (en anglais).

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13 commentaires

  1. Texte assez touffu en anglais… une traduction en français de ce texte du cardinal Schönborn serait bienvenue.

  2. Oui!
    Qui se propose?

  3. A l’instar de l’avortement et de l’homosexualité, le darwinisme est un autre tabou créé de toutes pièces par notre société laicarde et auquel il est interdit de toucher sous peine de lynchage médiatique.
    Aux chrétiens du XXI e siècle de l’aborder comme un terrain perdu à reconquérir.

  4. Bonjour,
    De grâce, distinguons une bonne foi pour toute science et spiritualité. L’évolutionnisme n’est ni une philosophie, ni une croyance, laquelle est par définition subjective et personnelle. L’évolution telle que la présentent les scientifiques, est une synthèse des faits constatés et constatables par toutes et tous : la science et l’évolution sont universelle, constatable par toutes et tous quelque soit sa culture, sa croyance, ses traditions.
    L’évolution n’est pas là pour expliquer le “pourquoi” de tout cela : ceci est du domaine de la croyance…et encore. L’évolution compile des données et explique “comment”.
    Les récentes attaques contre l’évolution sont sans aucun doute à relier à une importante montée du communautarisme, en particulier religieux,et aux dogmes qui y sont associées : rigueur morale, retour aux tradition, retour au créationnisme…
    Cette poussée du communautarisme est indubitablement liée à la situation géopolitique mondiale actuelle. Plusieurs spécialistes en géopolitique confirment cette tendance depuis la fin des années 90.
    L’évolution est avant tout une constatation objective des faits. Je suis favorable au fait d’aborder le créationnisme en philosophie ou en histoire des religions, mais je suis totalement contre le fait d’enseigner, au côté de la génétique par exemple, en biologie , le créationisme, néocréationisme ou l’inteligent design, lesquels reposent sur une interprétation hautement subjective des faits.
    La science et l’évolution donnent une explication sur l’origine des espèce totalement neutre, sans influence liée à une quelconque croyance.
    Les attaques récurentes contre l’évolution mettent en danger l’accé aux science et l’enseignement de l’universalité des faits scientifiques.
    Dans quelques années, nous risquons de voir des cours de sciences fidèles à la Bible dans un pays A et au Coran dans un pays B : le même fait sera expliqué différement en fonction de l’influence spirituelle du moment. Pour les uns, cet objet sera rouge, pour les autres il sera noir.
    Le problème, c’est que l’objet ne sera en réalité ni rouge, ni noir…

  5. @Patrick
    Je pense que le cardinal Schönborn signerait des deux mains l’esprit de votre commentaire : il veut justement que l’ “évolution” ne soit que telle que vous la décrivez. Mais sa mise en garde, qui certes était moins claire dans sa tribune du New York Times, porte sur la tentation de la science évolutionniste de se poser en “philosophie première” (il donne dans l’article de FT une citation, entre des centaines qu’il aurait pu trouver, de cette hybris d’un chercheur évolutionniste).
    Quant au “dessein intelligent” – qu’on ne peut assimiler trop vite au créationnisme – il cherche à faire ses preuves sur le terrain purement scientifique, et se situe à mon sens à un niveau nettement distinct de celui du cardinal.

  6. Présent du 1er février précise que l’article du cardinal dans FT sera traduit dans le prochain numéro du Cep (4, rue de Beauvais 91410 Saint-Cyr-sous-Dourdan)

  7. Le problème de l’évolution c’est que ce n’est pas seulement une science. Dans l’évolution il y a une part non négligeable de croyance. La paléontologie, elle, est une science qui constate des faits. L’évolution n’est pas un fait, c’est un postulat, une croyance. Jamais on a constaté, ce qui serait un fait, l’évolution d’une espèce.

  8. Bonjour,
    La “philosophie première” est sans doute une allusion à certaine conclusion issue de l’évolution. Et en particulier celle qui remet en cause la suprématie humaine, la place de l’Homme au sommet de la hiérarchie du vivant. Si l’évolution est un fait scientifique qui déchaîne autant les passions, c’est parce qu’elle replace l’Homme à l’intérieur du monde vivant et non pas au sommet d’une hiérarchie qui, dans un contexte évolutif, est un concept complètement inadapté (car on ne peut comparer que ce qui est comparable) et par conséquent, qui n’existe pas.
    Et ça, beaucoup de gens ont du mal à l’accepter…
    Il est certain que replacer l’Homme au sein du vivant, et donc, par conséquent, lui faire perdre sa place “d’espèce élue”, est en totale contradiction avec les principes religieux.
    Mais n’est-il pas temps de prendre conscience que l’Homme n’est qu’un élément de la Nature et non l’aboutissement ultime du mécanisme biologique ? Ce message d’humilité, défendu par les évolutionnistes, peut être considéré par certains comme une philosophie de la vie, une “philosophie première”, mais il vise avant tout à comprendre les interactions existant entres espèces vivantes, interactions qui ne sont pas toujours favorables à l’Homme.
    Maintenant, si présenter les faits évolutifs, les faits expliquant comment l’on passe d’une espèce à une autre, comment l’Environnement (climat, prédation, ressources énergétiques…) intervient dans l’extinction et la sélection des espèces, comment ces extinctions et ces sélections sont soumis au « hasard contraint » (et que, par conséquent, l’histoire biologique n’est pas écrite) conduit certains à considérer ces informations scientifiques comme une “philosophie première”, la science n’avancera pas.
    Les évolutionnistes n’ont pas « choisis » leurs découvertes : le rôle du hasard contraint, par exemple, est observé en biologie dans la mise en place des configurations spatiale des protéines. C’est un fait, qu’on le veuille non. Et je peux vous affirmer que certaines découvertes ont placé de nombreux chercheurs dans l’embarras car elles remettaient en cause certains de leurs principes dogmatique.
    Quant au dessain intelligent, il s’agit de créationnisme masqué derière un discour pseudoscientifique. La polémique autour de la chercheuse Anne Dambricourt en témoigne : les scientifiques ne lui reprochent pas ces observations, bien au contraire. La très grande majorité s’accorde à dire que ces observations sont correctes.
    Mais l’interprétation qu’elle propose ne s’appuie absolument pas sur ces observations : elle ne peut en aucun cas conclure à une évolution guidée à partir de ces travaux. Là, nous sommes du domaine de la croyance et non des faits.
    Je me permets enfin de revenir sur les propos de Bob. Je pense sincèrement que tu ne connais pas suffisament l’évolution pour tenir de tels propos. Je ne peux, ici, présenter l’évolution et les faits qui s’y rattachent. Par manque de temps et de place. L’évolution des espèces est constatée en paléontologie comme en biologie du développement : l’étude de la phylogenèse et de l’ontogenèse confirme l’évolution.
    Le paléontologue observe l’évolution des organismes au cours du temps lorsqu’il se penche sur les fossiles : il voient des modifications morphologiques apparaitre au fur et à mesure.

  9. Il faudra que Patrick m’explique en quoi l’évolutionisme serait plus objectif que le créationisme? Et au nom de quoi on interdirait d’enseigner celui-ci? Le totalistarisme n’est guère loin.
    N’oublions pas qui le drawinisme a influencé dans les années 1930.

  10. Relis mes propos florent : je ne suis pas contre l’enseignement du créationnisme, mais il doit avoir lieu en philisophie ou histoire des religions. La science est régie par des loi de vérifications. Ce n’est pas le cas de la foi : on a la foi ou on ne l’a pas.
    L’évolutionnisme repose sur une analyse objecive des faits : quelque soit sa religion, culture, tradition ou origine, tout Homme est capable de constater, de décrire, de mesurer, etc. un fossile par exemple. Même si chaque personne utilise son vocabulaire personnel, la description sera la même pour tous : un carré reste un carré, un cercle reste un cercle.
    La foi est propre à chacun d’entre nous. Chaque croyant a sa propre perception de l’amour de Dieu et de son oeuvre. Le créationnisme repose essentiellement sur cette foi, cette perception de l’oeuvre de Dieu. En ce sens, le créationnisme est subjectif car il s’appuie sur la croyance de l’existence d’une entité divine, croyance qui ne demande pas une vérification.
    Et puis, la création varie d’une croyance à l’autre : ceci démontre que la création repose sur les croyances propre à chaque communauté religieuse et n’est pas une explication universelle.
    Je n’oublie pas les influence néfastes et les dérives extrêmes lié à l’évolution mais on ne peut empêcher certains de détourner le message de l’évolution. Toute les grande discipline ont eu leur lot de dérive : que dire du nucléaire et de la bombe atomique ? Pourtant, le nucléaire me permet de communiquer à cet instant de taper mon texte.
    Je pourrais rappeler, comme certains le font quelque fois, les horreurs liées au catholicisme ; c’est une réponse facile mais je ne me l’autorise pas. Pour une raison assez simple : les dérives de certains extrêmistes ne représentent absoluement pas le message initiale de la foi catholique. Si certains ont détourné le message de paix et d’amour de la Bible, je ne peux pas, en toute honnêteté, accusé ce Livre Saint d’en être la cause.
    De tradition catholique moi-même, je n’aurais de cesse, jusqu’à la fin de mes jours, de regretter les atrocités de certains pseudocroyant et de me sentir, en tant que catholique, un peu coupable, un peu responsable.
    En tant que scientifique travaillant sur l’évolution, il n’a pas été simple pour moi de faire cohabiter évolution et message biblique. Mais je ne pouvais renier mes travaux, mes études, les faits que j’avais devant moi. Je vous certifie que cela n’a pas été simple.
    Les écrits d’un célèbre (dans son domaine) évolutionniste m’a aidé à associer au mieux évolution et croyance : Henri Tintant. Il est l’auteur entre autre d’un article fantastique intitulé “La Créativité de l’Evolution”. Fondamentalement évolutionniste et croyant, il ne croyait pas en une évolution guidée (comme le croient les partsant du dessein intelligent par exemple) mais voyait, dans la grande diversité du vivant, dans la richesse des formes passées, présentes ou à venir, un forme de Créativité. H. Tintant plaçait sans doute Dieu à l’origine de tout, avant même le BigBang, comme organisateur des lois physiques et chimiques qui régissent le monde vivant comme le monde du non-vivant. Cela n’enlève en rien au message global de la Bible : aimez vous les uns les autres. Mais notre environnement(faune et flore) a le droit au respect qui lui est du. Sans cette nature, nous ne serions pas là. En ce sens je ne me considère pas au sommet de cette nature mais bel et bien comme un élément au sein de celle ci. Cela n’enlève rien au fait que nous, les Hommes, nous avons la capacité, et sans doute le devoir,de nous occuper de ce monde.
    A méditer peut-être…

  11. Oups, j’ai oublé d’indiquer mon nom dans le message précédent: milles excuses.

  12. Mouais, la frontière a l’air flou entre sciences et foi, isn’t it? Et si le créationisme n’avait pas aussi une base objective? En tous cas, Darwin s’est trompé sur de nombreux points ce qui est avèré par le monde scientifique, mais les médias officiels refusent de l’admettre, surtout pour ne pas favoriser le créationisme. Tout cela me semble donc très idéologique.
    Pour ce qui est des dérives du catholicisme, on peut en effet en discuter, mais on en voit d’autres exemples aujourd’hui, vous voyez sûrement de quoi je parle.

  13. J’arrive tardivement sur ce blog à la suite de deux articles dans la revue de vulgarisation Science et Vie, d’où il ressort que le hasard explique la Vie.
    Je n’ai pas eu de réponse à un premier courrier où j’arguais que le hasard était sans aucun doute un moyen d’adaptation et de diversification des structures vivantes, si tant est que le hasard n’est souvent que ce que l’on ne sait pas encore expliquer, mais qu’il ne saurait en être le motif, et que l’on se trouve alors devant un acte de foi personnel: certains croient que le monde a été voulu, qu’il a un sens, d’autres non, et d’autres enfin considèrent la question sans objet. Cet acte de foi relève dans un état laïc “normal” de leur libre arbitre. Il n’en est plus de même dans un état laïciste ou dans un état intégriste: dans l’un il est interdit de croire, dans l’autre il est interdit de ne pas croire. Laïcisme et intégrisme se reconnaissent ainsi dans la même intolérance à tout ce qui sort du dogme d’état (en France on appelle celà le politiquement correct).
    Effectivement, certains scientifiques modernes confondent science expérimentale et idéologie. Leurs convictions athées, qui en principe ne regardent qu’eux, leur font rejeter avec un rare aveuglement tout ce qui a trait à la transcendance. Ce n’est plus l’histoire de l’imbécile qui regarde le doigt quand le sage montre la lune, c’est celle du scientifique correctement-pensant qui confond le comment avec le pourquoi.
    Le danger de l’amalgame sous prétexte de leur foi entre les créationnistes absolus (témoins de Jéhovah, certains islamistes) et les évolutionnistes croyant à une transcendance (la liste des scientifiques chrétiens est longue ..), c’est la radicalisation et la perte d’accès à une information non biaisée à cause du parti pris des rédacteurs.
    Cet amalgame dont je veux croire encore qu’il n’est pas volontaire (quoique …) c’est comme si l’on mettait dans le même sac Jacques Delors, Staline et Hitler, et tous ceux qui se revendiquent d’un mouvement à consonance socialiste.
    Accessoirement, on peut très légitimement s’interroger sur les compétences et la déontologie de ces journalistes.

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