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Institutions internationales

A propos de la condamnation de la France par la CEDH suite à la condamnation d’un outrage public à la pudeur commis dans une église

A propos de la condamnation de la France par la CEDH suite à la condamnation d’un outrage public à la pudeur commis dans une église

Analyse de Jean-Luc Thiver-Joly, Docteur en droit privé :

Par un arrêt rendu le 13 octobre 2022 par la CEDH, dans l’affaire Bouton c. France (requête n°22636/19), la France a été sanctionnée pour avoir condamné une FEMEN à une peine d’emprisonnement avec sursis, en répression d’un délit d’outrage public à la pudeur commis dans l’église de la Madeleine à Paris.

Grégor PUPPINCK a écrit dernièrement, dans un article très intéressant, que les arrêts de la CEDH du 25 octobre 2018 et du 13 octobre 2022 de la CEDH, procèdent de deux raisonnements juridiques contradictoires.

Une réflexion s’impose car il semble au contraire, que ces décisions procèdent du même esprit.

Revenons sur l’arrêt rendu le 13 octobre 2022 de la CEDH. Rappelons d’abord que la Cour a considéré que le comportement immoral de la FEMEN était une « performance » parfaitement légitime dans une église, pour les motifs suivants :

  • « Une peine de prison infligée dans le cadre d’un débat politique ou d’intérêt général n’étant compatible avec la liberté d’expression garantie par l’article 10 de la Convention que dans des circonstances exceptionnelles (diffusion d’un discours de haine ou d’incitation à la violence, etc …), il n’a pas été rapporté que le comportement de la FEMEN requérante ait été injurieux ou haineux, mais que l’action visait à dénoncer la position de l’Église catholique sur l’avortement » ; et que celle-ci « avait pour seul objectif de contribuer au débat public sur les droits des femmes ».
  • « La sanction pénale infligée à la requérante en répression du délit d’exhibition sexuelle n’avait pas pour objet de punir une atteinte à la liberté de conscience et de religion mais la nudité de sa poitrine dans un lieu public. La Cour en déduit que les juridictions internes n’avaient pas, eu égard à l’objet de l’incrimination en cause, à procéder à la mise en balance entre la liberté d’expression revendiquée par la requérante et le droit à la liberté de conscience et de religion protégé par l’article 9 de la Convention ».
  • La Cour a décidé enfin que la sanction était disproportionnée à la gravité des faits en ce que les juridictions françaises se sont « bornées à examiner la question de la nudité de sa poitrine dans un lieu de culte, sans prendre en considération le sens donné à sa performance, ni les explications fournies sur le sens donné à leur nudité par les militantes des Femen ».

Aujourd’hui dans le contexte social de «libéralisation des mœurs», ou plutôt de dégénérescence morale de la société, la notion juridique d’« atteinte à la moralité publique » semble définitivement révolue. De grandes réformes législatives ont contribué à la destruction de cette notion, en particulier l’abrogation de l’article 283 du Code pénal en France. Depuis lors, le juge répressif n’est plus tenu d’examiner si l’infraction est constitutive d’un outrage aux bonnes mœurs. De ce fait notamment, la Cour européenne n’entre en voie de condamnation à l’encontre des auteurs de contenus obscènes, qu’en fonction du seuil de gravité des dommages subis par les victimes (voir article sur la loi Avia). Enfin, le juge de la CEDH définit la mesure de la « gravité » en fonction du seuil de tolérance social, mais également et surtout des valeurs sociales. Ce principe est ostensible à travers le dispositif de l’arrêt du 13 octobre, la CEDH estimant que la sanction des juridictions françaises est disproportionnée à la gravité des faits, en ce que la France n’a pas jugé l’acte de la Femen au regard du but politique et social que celle-ci revendiquait.

Dans l’affaire jugée par la CEDH le 25 octobre 2018 E.S. c. Autriche (requête n°38450/12), rappelons que la CEDH avait condamné une requérante pour dénigrement de doctrines religieuses, lui reprochant d’avoir fait des déclarations insinuant que Mahomet avait des tendances pédophiles.

La CEDH avait estimé que :

  • « Dans le cadre d’une discussion animée, il n’est pas compatible avec l’article 10 de la Convention de faire des déclarations accusatrices sous le couvert de l’expression d’une opinion par ailleurs acceptable et de prétendre que cela rend tolérable ces déclarations qui outrepassent les limites admissibles de la liberté d’expression. »
  • «Que les déclarations de la requérante étaient susceptibles de provoquer une indignation justifiée ; que ces propos n’avaient pas été tenus d’une manière objective contribuant à un débat d’intérêt général (par exemple sur le mariage d’un enfant), mais pouvaient uniquement être compris comme ayant visé à démontrer que Mahomet n’était pas digne d’être vénéré. La Cour souscrit à l’avis des tribunaux nationaux selon lequel Mme S. était certainement consciente que ses déclarations reposaient en partie sur des faits inexacts et de nature à susciter l’indignation d’autrui.

Dans cet arrêt, l’incertitude pesant sur la notion d’« objectivité des propos censés contribuer à un débat général » rend aléatoire l’appréciation exacte de la notion « d’indignation suscitée par le débat ». Le juge est évidemment contraint de définir cette mesure. Mais il le fait au regard du seuil de tolérance social.

Conclusion

On peut par conséquent déduire de ces arrêts de la CEDH du 25 octobre 2018 et du 13 octobre, qu’ils répondent à la même logique, car dans les deux cas le juge européen définit souverainement des limites « admissibles ou tolérables » de la liberté d’expression, en s’attachant à promouvoir les revendications ayant un but politique « légitime », c’est-à-dire en d’autres termes, toutes les actions « politiquement correctes. »

En conséquence, la préservation de notre liberté de culte catholique est menacée puisqu’elle est de moins en moins socialement reconnue.

À nos Rosaires !

Jean-Luc Thiver-Joly Docteur en droit privé

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8 commentaires

  1. la même juridiction qui a condamné à mort Vincent Lambert.
    son crime: être handicapé.
    les “valeurs de la République” ont aboli la Justive;
    elles veulent nous pourrir la vie et la supprimer.
    il est temps de faire la Contre Révolution qui passera ces Juges au karcher.

  2. A quand une réaction des catholiques ??
    Mis à part 80% des “catholiques le sont dans leurs salons, à domicile et dans la chapelle, mais pas dehors, bah oui “pas de politique” disent certains Prêtres, alors si l’ont résonnent ainsi, les Vendéens eurent torts, Christéros, Saint Louis, etc… Clovis tant que l’on y est !!!
    Le Christ vomit les tièdes !!
    Au passages ce sont des réactions de gens de la dite “Tradition”, je ne parle pas des collabos de V2…

  3. Comment la CEDH aurait-elle jugée l’affaire si la FEMEN avait réalisé sa performance dans une mosquée? Elle aurait sans doute considéré que son geste dépasse les limites admissibles ou tolérables de la liberté d’expression.

  4. liberté d’expression (de la haine et du mauvais gout) pour certains (le rappeur qui voulait tuer les enfants blancs et pendre leurs parents) seulement pour les “progressistes” les lgbt, les antifrance!
    et l’état se soumet! ils vont même payer cette grue avec nos impots!
    et combien de catholiques votent encore pour ces gugusses et le maintiennent aux manettes, rappelez vous “« Dieu se rit des hommes qui déplorent les effets dont ils chérissent les causes. »

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