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France : Société

A défaut d’euthanasier les personnes âgées, on les fait mourir de faim

A défaut d’euthanasier les personnes âgées, on les fait mourir de faim

Pendant près de trois ans, Jean Arcelin a dirigé un Ehpad dans le sud de la France, avant de renoncer. Il publie son témoignage dans “Tu verras maman, tu seras bien”. Il déclare sur Atlantico :

Cela m’a traumatisé : j’ai fait des cauchemars, j’ai pris des anti-dépresseurs. Vous vivez des scènes, que je décris presque comme des scènes de guerre. Dans le deuxième Ehpad que j’ai géré, vous avez neuf soignants. Sur ces neuf soignants, certains matins, il peut en manquer trois. Vous avez 120 résidents. Cela fait donc un soignant pour 20 résidents. Le matin, les résidents se réveillent. Je parle de résidents qui payent 3000 euros par mois. Le matin, ayant un management de proximité, avant d’aller dans mon bureau, je me rendais dans les chambres des résidents. Je vais vous décrire une scène dont j’ai parlé dans le livre : dans un couloir vide, vous avez une vingtaine de chambres, et au fond de ce couloir, ce matin-là, je vois une ombre, une femme. Je m’approche car je sens qu’il y a un problème, je la vois s’affaisser, c’est une femme nue qui a 90 ans au moins, qui est lucide, qui traîne ses couches souillées à ses pieds et qui en fait, tout simplement, me demande de l’aide. Elle est mutique, choquée par ce qu’elle vit. Ce qui s’est passé, c’est qu’elle s’est réveillée, personne n’est venu. Elle a essayé de se changer mais elle n’y est pas parvenue. Elle n’est pas arrivée à se défaire de ses couches parce que les élastiques enserrent ses jambes. Elle sort dans le couloir pour chercher de l’aide. Je la recueille dans mes bras : j’ai dans mes bras une femme de 90 ans, nue, qui me demande de l’aide. Ce sont ce genre de scènes dont je parle. […]

Ce qui m’a révolté, par exemple, pour moi qui aime bien manger, quand on vous donne 4€35 par jour pour nourri un résident (petit déjeuner, déjeuner, dîner, collation, tout compris) vous imaginez la qualité des repas. Ce qui est cynique, c’est ce que cela ne dérange personne. Ces chiffres sont connus de tout le monde en interne : du PDG au directeur, tout le monde est au courant. Les collaborateurs n’ont pas ces chiffres. Mais tout le monde au-dessus sait qu’on nourrit les gens avec 4,35€ par jour. Mais cela ne dérange personne.

Il y avait les assises des Ehpad, un grand raout qui rassemble les élites du médico-social, mais cela ne sert à rien. C’est deux jours d’échange, de conférences, etc. Le seul intérêt, c’etait la visite de la ministre de la Santé, qui ne peut pas se couper des Ehpad privés commerciaux, qui représentent 25% du marché. Mais la ministre y fait un peu de politique… Ce que j’aurais aimé, dans ces assises des Ehpad, c’est que le déjeuner servi à Madame la Ministre, c’est qu’il soit concocté avec 1€. Il faut savoir qu’il y a 700 000 personnes âgées dépendantes en France en établissement. Une large majorité des 700 000 personnes mangera, pour le reste de leur vie, des repas à 1€. Je souhaiterai que par solidarité, les personnes qui dirigent ces Ehpad mangent la même chose.

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4 commentaires

  1. L’article d’Atlantico est glaçant. Les commentaires montrent bien la source du problème: la disparition de la cohésion familiale, qui a de nombreuses causes, économiques entre autres, mais pas seulement.

  2. Attention, le sujet de l’auteur de c elivre, ce sont les EHPAD à but lucratif.
    Ce qui le révolte, c’est que, pour faire du profit, les actionnaires de ces établissements poussent leurs dirigeants à rogner sur tout, dont la nourriture au premier chef.

  3. Je mettrai un bémol au titre de ce post; les circonstances de la vie font que depuis de nombreuses années, je visite des pensionnaires d’EHPAD :

    1 tout d’abord, il faut rendre hommage au personnel qui fait son devoir.

    2 c’est le rôle des familles (y compris les petits-enfants qui même s’ils sont des catholiques pratiquants, se défaussent sur leurs parents) de soutenir leurs anciens.

    3 les remarques doivent toujours être faites, même sur des sujets mineurs, comme ma femme a été amenée à le faire au sujet du travail de la coiffeuse, pour une personne de 101 ans !

    4 c’est le rôle des familles de faire face aux dépenses. Mélanger le sujet avec l’age du départ à la retraite est une escroquerie intellectuelle (et surement bientôt fiscale et sociale).

  4. une de mes nièces est aide soignante dans un ephad, ce qu’elle raconte est stupéfiant, les zélites devraient faire un stage dans un de ces établissement pendant un mois!

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