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Histoire du christianisme

Une enquête terrible

Une enquête terrible

Une enquête de 730 pages, réalisée à la demande de l’Ordre dominicain, afin d’évaluer sa responsabilité dans l’affaire des frères Thomas et Marie-Dominique Philippe, condamnés par Rome en 1956 et 1957, et qui ont pourtant pu poursuivre leurs abus spirituels et sexuels pendant plus d’un demi-siècle, de fonder une véritable nébuleuse, dont le plus connu d’entre eux est Jean Vanier, sort en librairie.

Deux historiens, un psychiatre et une psychanalyste, une sociologue et une théologienne, membres de la commission d’étude mandatée par l’Arche pour enquêter sur Jean Vanier, viennent de publier de leur côté un rapport de près de 900 pages, accessible en ligne. Jusqu’à la mort du père Philippe en 1993, Jean Vanier conservera une fidélité et une soumission totales au dominicain, mais aussi à ses dérives érotico-mystiques au point d’en devenir le complice, le perpétuateur et le successeur. Ils démontrent les mécanismes que ces derniers ont employés pour abuser spirituellement et sexuellement de nombreuses femmes entre 1950 et le début des années 2000.

C’est un autre Philippe, qui n’a aucun lien de parenté avec les deux autres, dominicain et commissaire au Saint-Office, qui enquête en 1952 sur Thomas Philippe. Il permet la condamnation des frères Thomas et Marie-Dominique Philippe en 1956 et 1957, et s’est battu pour empêcher la réhabilitation du premier. Mais le deuxième l’a été grâce à la protection du Maître de l’Ordre.

Paul Philippe, alors visiteur religieux, découvre avec horreur l’envers de la dévotion inculquée par Thomas, qui est écarté de la direction de l’Eau vive, le centre spirituel qu’il a fondé. Il cherche à comprendre. Il parle avec des psychiatres. Bientôt, il penche pour la folie. Le témoignage du père Guérard des Lauriers, professeur de métaphysique et de philosophie des sciences au Saulchoir, atteste au commissaire du Saint-Office de faits gravissimes que lui a confiés une moniale, ancienne favorite de Thomas Philippe. Il évoque des attouchements, des baisers sur les parties sexuelles, que le dominicain qualifie de « secret pour les petits enfants de la T.S. Vierge ». Les « initiées » auraient juré le secret avec ordre de mentir « pour la T.S. Vierge » dans les visites canoniques. L’une d’elles aurait avorté d’un enfant conçu lors de ces séances et le mort-né aurait été vénéré par les « initiées ». Le commissaire reprend son enquête et les témoignages sont terribles. Après avoir fait condamner le père Thomas Philippe, qui perd tous les pouvoirs liés à son ministère, Paul Philippe organise dans la foulée le procès de Marie-Dominique Philippe, qui se voit sanctionné en 1957.

Mais l’affaire ne s’arrête pas là car les deux frères tentent et réussissent plus ou moins à se faire réhabiliter. L’historien écrit :

« Ce qui amène à la situation de la fin des années 1970, où, dans un rapport circonstancié, [Paul Philippe] décrit ce qui se passe depuis des décennies entre Thomas Philippe, Jean Vanier et leurs disciples, mais plus personne ne l’écoute car il n’incarne plus que la répression d’avant le Concile. »

Le cardinal Paul Philippe parviendra à bloquer les demandes d’ordination de Jean Vanier puis décède en 1984 à Rome. À partir de ce moment, plus aucun garde-fou n’existera.

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