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Liberté d'expression

Terrorisme intellectuel au sein de l’université française

Terrorisme intellectuel au sein de l’université française

Philippe Soual est enseignant en philosophie depuis plus de trente ans. Suite à des affiches placardées dans la fac par le lobby LGBT lui reprochant sa participation à une université d’été de la Manif pour tous, il s’est vu retirer son cours d’agrégation sur Hegel. Il répond au Figarovox :

Précisons tout d’abord que je suis, non pas un polémiste, mais un professeur de philosophie, et un spécialiste en particulier de Hegel. J’enseigne en classes préparatoires et à l’université depuis maintenant plus de trente ans. Or Hegel est précisément au programme de l’agrégation de philosophie cette année: à ce titre, mes collègues de l’université Jean Jaurès m’ont demandé de donner un cours sur cet auteur, ce que j’ai accepté avec plaisir. L’université a publié la maquette des enseignements, incluant mon cours qui devait avoir lieu de novembre à mars. Mais, à ce moment-là, des étudiants de cet UFR qui ont vu mon nom apparaître ont placardé des affichettes dans l’université, affichettes qui ont été relayées ensuite sur Facebook par une «association» d’étudiants, l’Union des ÉtudiantEs de Toulouse (UET).

Cette affiche sur laquelle figurent mon nom et ma photo est diffamatoire: je ne suis pas porte-parole de la Manif pour tous et mon propos était simplement un discours philosophique portant sur une question anthropologique. En effet, j’ai été invité à donner une conférence qui portait sur l’anthropologie et le transhumanisme, à l’université d’été de cette association en septembre 2015. Cette intervention, chacun peut en juger puisqu’elle est accessible à tous sur Internet. Il ne s’y trouve pas la moindre attaque ou marque de haine à l’encontre de qui que ce soit.

Voyant ces affiches, mes collègues de l’université se sont réunis en urgence et ont délibéré entre eux. Ils ont alors pris la décision de me retirer ce cours d’agrégation, invoquant comme motif le «maintien de l’ordre public». Car ils ont eu peur que tout cela ne provoque des débordements.

[…] Il apparaît, à en croire mes collègues ou à en juger par mes nombreux voyages dans des universités étrangères, que l’université française accorde bien moins de place à la diversité intellectuelle que les universités étrangères. Dans une université américaine, allemande, italienne… on peut trouver une grande variété d’opinions, de prises de position politiques ou métaphysiques différentes et concurrentes. L’université française au contraire, et ce depuis quelques décennies, tend à devenir de plus en plus monochrome, au point que c’en est désormais inquiétant. Car l’université est le lieu par excellence de la liberté intellectuelle, de l’examen rationnel, de la recherche et du dialogue, et elle est l’institution de la transmission de la connaissance.

J’observe aussi une crispation autour de certains débats, et plusieurs intellectuels font la même constatation que moi. Au lieu d’un débat raisonnable entre personnes civilisées, certaines opinions sont dorénavant criminalisées, et nous assistons à de plus en plus d’invectives et de soupçon, avec de nombreux amalgames blessants. […]

En réalité, le «vivre ensemble» apparaît dans le discours lorsqu’il a disparu dans la réalité, ou plutôt ce discours se propage à partir du moment où la société est entièrement atomisée pour des raisons d’ordre économique et social, mais aussi «métaphysiques». Pourtant nous devons nous demander: une société entièrement individualiste, sans bien commun, est-elle toujours une société? […]

Enfin, je ne suis pas rassuré non plus quand je vois à quel point est parfois maltraitée la liberté d’expression, y compris à l’université. Étymologiquement et depuis sa fondation au Moyen-Âge, l’université est une communauté de maîtres et de disciples, et elle englobe la totalité des connaissances humaines. Elle repose sur elle-même, précisément pour permettre un libre examen de ces connaissances, offrant à chacun la possibilité du doute, nécessaire pour exercer toute forme d’esprit critique. En outre, l’idée de pluralité est constitutive de la démocratie. Or, si ce pluralisme intellectuel, éthique et politique s’étiole dans l’université française, alors la liberté intellectuelle n’est plus réellement possible.

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3 commentaires

  1. Oui mais… au Moyen Age, qui a fondé ces universités lieux de libre examen? Eh oui… : l’Eglise. Chassez l’esprit catholique, vous chasserez aussi l’exercice de la raison, le respect de tous, le goût de la vérité. Voilà ce qu’il leur est impossible d’entendre.

    A nous catholiques de refonder l’école, le lycée, l’université.

  2. Les méthodes utilisées ressemblent fort à celles développées par Saul Alinsky : le lynchage en public, le harcèlement…

    Il est interessant de lire les ouvrages sur cet “Animateur de communauté” et de comprendre ses méthodes d’organisation de la révolte.

    Pour que la “communauté” existe, il lui faut créer des actions et identifier un ennemi à détruire : une personne qui sera l’objet de la révolte organisée et qui représente un rouage de pouvoir duquel obtenir quelque chose.

  3. Ce qui est scandaleux c’est cet esprit de partisan “gauchard”. Si ce Monsieur était allé faire une conférence dans une une université d’été de n’importe quel parti de Gauche, la pose d’affichettes dénonçant sa présence à de telles conférences aurait soulevé l’indignation des mêmes collègues qui par “trouille” ou convictions (finalement nauséabondes) l’ont exclu.
    Je ne trouve pas la défense de l’intéressé très honorable. Il aurait mieux valu qu’il s’indigna de ce “fascisme intellectuel” de ses opposants plutôt que de minimiser sa présence à une université LMPT. Où est la liberté dans ce pays dont c’est pourtant le premier mot de sa Devise ? on se croirait revenu au “mur des Cons”.
    Si l’intéressé en reste là, c’est vraiment lamentable…

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