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L'Eglise : L'Eglise en France

Pouvons-nous attendre moins de soumission et plus de clairvoyance de la part des représentants de l’Eglise de France ? Trois exemples

Pouvons-nous attendre moins de soumission et plus de clairvoyance de la part des représentants de l’Eglise de France ? Trois exemples

Nous sommes profondément reconnaissants à tous les prêtres et évêques de l’Eglise de France pour leur sacerdoce et respectueux de leur fonction. Et c’est parce que nous avons conscience de nos propres fragilités et insuffisances que nous attendons d’eux parfois plus de clairvoyance, c’est-à-dire plus de discernement, tant à l’égard des pouvoirs publics qu’à l’égard des associations musulmanes et de l’islam, afin d’être fortifiés dans la foi. Trois situations toutes récentes viennent nourrir cette attente.

La première situation tient à la position de l’Eglise de France à l’égard des pouvoirs publics pour la célébration de Pâques.

On sait en particulier que la vigile pascale est censée se dérouler de nuit, la veille du jour de Pâques. En ce printemps 2021, la France était soumise (très soumise) aux diverses interdictions des pouvoirs publics et en particulier d’un couvre-feu.

Or la conférence des évêques de France n’a même pas jugé bon (utile ?) de demander officiellement une dérogation pour la vigile pascale afin de permettre le déroulement des rites catholiques. Des association (Civitas) et parti politique (VIA – La voie du peuple) avaient néanmoins introduit une demande de référé-liberté pour l’obtenir. Cette demande a été rejetée par le Conseil d’Etat qui a, en particulier, justifié son refus en se référant… à l’absence de demande de la part des évêques !

« De nombreuses paroisses ont adapté leurs horaires pour tenir compte de ce couvre-feu en multipliant les offices et en avançant l’horaire des cérémonies se déroulant l’après-midi, notamment pendant la semaine de Pâques…  La Conférence des évêques de France a également proposé des aménagements liturgiques permettant de célébrer la veillée pascale du 3 avril, en tenant compte des restrictions liées au couvre-feu ».

On apprend maintenant que, à sa demande, le CFCM (Conseil français du culte musulman) a obtenu du ministère de l’intérieur l’allégement de ces mêmes contraintes nées du couvre-feu, et non pas pour une journée mais pour la durée du ramadan (un mois) :

L’heure de la première prière musulmane, qui doit avoir lieu avant l’aube et est donc soumise à l’allongement des jours en cette période, est de 5h24 le 13 avril et de 4h18 le 13 mai

Rappelons encore que le refus apporté par le Conseil d’Etat en réponse à Civitas et à Via – la Voie du peuple était justifié

« au regard de la dégradation actuelle de la situation sanitaire justifiant  le maintien d’une mesure d’interdiction des déplacements, entre 19 heures et 6 heures du matin ».

On apprend d’ailleurs aussi qu’il y a quelques facilités offertes aux musulmans après le coucher du soleil au moins dans le département du Tarn selon un journal local. Ainsi, policiers et gendarmes tarnais ont reçu la consigne de ne pas verbaliser les musulmans circulant pendant le couvre-feu dans le créneau 19 heures-22 heures et à partir de 5 heures, pendant la durée du Ramadan fixée cette année du 13 avril au 12 mai. Adressés aux commissariats et aux gendarmeries du département le mercredi 14 et le jeudi 15 avril, les mails que « Le Journal d’Ici » a pu consulter précisent que « les pratiquants sont autorisés par la préfecture à dispenser l’aumône (se traduisant par la livraison de nourriture à des amis, familles…) ». Il est également souligné que « le créneau nocturne correspond à la rupture du jeûne et il est potentiellement susceptible de générer des rassemblements sur la voie publique ou aux abord des mosquées ».

Comme le fait remarquer à juste raison M.B.Carayon, maire LR de Lavaur :

Que des facilités soient accordées à tous pour permettre en particulier aux musulmans de vivre leur foi, en réalité, c’est très bien. Mais pourquoi l’inertie de la Conférence des évêques de France ? Et pourquoi aucune demande d’aucun évêque, alors même que l’on sait que, canoniquement, la CEF n’a aucun pouvoir particulier sur les évêques ?

La deuxième situation tient à l’écriture de tags sur les murs d’un centre culturel musulman de Rennes (et non pas d’une mosquée, comme confirmé dans un tweet du CFCM, quoique l’on n’ait aucune illusion sur la capacité d’associations musulmanes à habiller la construction d’une mosquée sous le vocable de centre culturel, qui permet alors d’exciper de subventions publiques) :

Les réactions au sein de l’Eglise de France ont été nombreuses. La fameuse CEF, le 11 avril, a parlé « d’injures et de menaces adressées à des personnalités musulmanes » et d’ « inscriptions agressives et méprisantes pour les musulmans » ;  l’archevêque de Rennes, Mgr Pierre d’Ornellas, a parlé de « tags insultants ». L’évêque de Beauvais y est allé de « propos haineux et injurieux ».

Le tag est assurément une activité malpropre et dégradante. Cela n’interdit pas néanmoins, avant tout réflexe pavlovien, d’examiner ce qui a été écrit.

Une éventuelle pédophilie de Mahomet (dont on comprend que l’évocation soit blessante pour les musulmans) ne sera pas discutée ici. A peine suggérerions-nous de demander un rapport mémoriel à M.B.Stora qui a maintenant un peu plus de temps libre et qui aime les sujets controversés.

On remarquera que EELV (vous savez, le mouvement qui voudrait contrôler les rêves des enfants) pourrait aussi s’indigner du qualificatif de traître.

Les royalistes sont plutôt bien traités par l’inscription Vive le Roy et de la fleur de lys. Finalement, ce sont peut-être eux les coupables…. En tout cas, aucune de ces deux inscriptions ne peut sérieusement passer pour une injure.

« Les croisades reprendront » pourrait effectivement être considéré comme menaçant. Ce n’est cependant pas un appel au meurtre, et peut-être est-ce l’endroit pour rappeler ce que disait Charb dans un extrait video de 13 secondes :

« Pour le rappeler une énième fois, on a eu en vingt ans 14 procès avec l’extrême-droite catholique, on a eu un procès avec l’islam. Alors, quel est le problème en France ? Est-ce que c’est l’islam ou l’extrême-droite catholique ? En tout cas, pour nous, l’extrême-droite catholique nous a coûté beaucoup plus cher que l’islam ».

La date de l’extrait est inconnue. En tout cas, chose sûre, c’était avant le 7 janvier 2015, date à laquelle Charb a été assassiné avec la rédaction de Charlie Hebdo…

Il y a encore « catholicisme, religion d’Etat », qui fait un peu daté mais pas très opérant ; et une allusion à Charles Martel, auquel les évêques de France pourraient être reconnaissants car il a contribué à nous éviter l’islamisation au 8ème siècle.

Il reste enfin le « Non à l’islamisation » et nous n’osons penser que c’est à l’encontre de ce slogan que les évêques ont manifesté leur soutien au centre culturel. Centre culturel qui, au demeurant, doit contenir plusieurs exemplaires du Coran, riche en appels, toujours actuels, au meurtre des infidèles, des chrétiens, des juifs ou tout autre corrupteur.

La troisième situation tient au début du ramadan.

Comme à l’accoutumée, il y a eu fourmillement de messages de soutien provenant des représentants autorisés de l’Eglise de France. Ces messages sont irritants par deux aspects.

Le premier aspect tient à un amalgame théologique douteux (pour rester sobre) entre carême et ramadan, entre les « trois grandes religions monothéistes » et à leur « Dieu unique » [le même ?] comme abondamment développé dans la lettre du délégué diocésain aux relations avec les musulmans du diocèse de Nîmes :

« Cette année encore les calendriers religieux des trois grandes religions monothéistes sont imbriqués. Le dimanche 28 mars nos frères et sœurs de confession Juive ont fêté Pessah, la Pâque juive, commémorant la sortie d’Egypte des enfants d’Israël, alors que les Catholiques et Protestants entraient dans la semaine Sainte avec le dimanche des Rameaux, commémorant l’entrée triomphale de Jésus à Jérusalem; le jeudi Saint, son dernier repas avec les apôtres; le vendredi Saint, sa crucifixion; le samedi Saint, journée du silence de la tombe et la résurrection du Christ fêtée cette année le dimanche 4 avril. Le 13 avril, nos frères et sœurs musulmans vont entrer dans le mois Saint de Ramadan, mois où fut transmis le Coran, alors que nos frères et sœurs Orthodoxe, qui suivent le calendrier Julien, entreront dans leur semaine Sainte le 25 avril et fêteront Pâques le 2 mai… Que le Dieu unique nous guide sur ses chemins, divers et convergents. « Ramadan moubarak » que vos efforts soient agréés ».

Une phraséologie totalement musulmane.

Et Mgr Aubry, évêque de la Réunion, fait dans un syncrétisme également parfaitement musulman :

« La prière, le jeûne et le partage, aujourd’hui même, peuvent réunir juifs, chrétiens et musulmans. Nous avons comme ancêtres communs Adam et Ève, Noé, Abraham, Moïse. Nous vénérons la Vierge Marie ».

Sauf que, par exemple, les musulmans vénèrent dans la Vierge Marie une parfaite petite musulmane…

Le deuxième aspect tient, comme nous y sommes malheureusement habitués dès qu’une éminence catholique s’adresse à un musulman, à la référence à un Dieu miséricordieux :

  • Message de Mgr Aveline, archevêque de Marseille et président du Conseil pour les relations interreligieuses au sein de la CEF : « Nous savons que vous, musulmans, vous allez vous engager dans un mois de jeûne, de prière et d’aumône, fidèles à votre foi en Dieu, le Miséricordieux».
  • L’évêque de Beauvais, Noyon et Senis, Mgr Benoit-Gonnin « prie Dieu, Tendre et Miséricordieux d’éclairer l’intelligence et d’animer le coeur de tous les êtres humains pour qu’ils se reconnaissent toujours d’avantage, membres et frères d’une même humanité».
  • Le service pour les relations avec les musulmans du diocèse de Bourges forme le vœu [écriture inclusive en prime] « qu’en ce mois sacré de bienveillance et de prières, nos ami-e-s-, voisine-s-, connaissances, et plus particulièrement nos allié-e-s- dans le dialogue interreligieux, qu’elles et qu’ils puissent le vivre dans la sérénité avec leur contribution à la Paix entre toutes et tous. Dieu Grand et Miséricordieux accueille ce travail de toutes celles et de tous ceux qui désirent que l’Amour sauve notre monde».
  • Mgr Papin, évêque de Nancy et de Toul, termine ainsi son mot : « Que Dieu, le Miséricordieux, bénisse vos familles et votre communauté ».
  • Message aux musulmans de Privas émanant des communautés catholique et protestante : « Que Dieu miséricordieux vous garde dans sa paix».

Or cette terminologie (parfaitement hallal là encore, c’est-à-dire que c’est un qualificatif dûment accepté par les musulmans) est captieuse comme l’écrivait récemment Le Salon beige car il y a une

« différence substantielle entre une religion dans laquelle Dieu est amour et pour laquelle il n’y a pas de plus grand amour que de donner sa vie pour ses amis (Evangile de St Jean, chapitre 15) et une autre religion dans laquelle Dieu est miséricordieux et la plus grande miséricorde qui peut être accordée est d’accepter de ne pas tuer une personne qu’on aura au préalable définie comme son ennemi » ?

Finalement, on en arrive à être (agréablement) surpris quand le délégué aux relations avec les musulmans du diocèse du Val-de-Marne évoque dans son mot aux musulmans à l’occasion du ramadan « notre foi en Jésus-Christ ».

Et on citera enfin, pour expliquer mieux encore notre désaccord avec la référence quasi unique à un Dieu miséricordieux (car après tout la miséricorde est aussi partie intégrante de la foi catholique) ces extraits d’un article de France Catholique (9/04/2021) consacré au témoignage d’un musulman originaire de Kabylie et converti au catholicisme, et titré « C’est avec l’amour que le Seigneur m’a attrapé ». A la question « La conversion a-t-elle été le fruit d’un long cheminement », l’homme répond :

« Ce que me disait mon ancienne petite amie chrétienne sur Dieu a joué le rôle de déclic. Un soir, je me confiais et lui partageais cette peur de Dieu dans mon ancienne religion, ainsi que les prêches sur le châtiment, les punitions, l’enfer et tous les interdits qui m’empêchaient de mener une vie sereine. Elle m’a dit alors que son Dieu à elle était un Dieu d’amour. Tout le contraire de ce que l’on m’avait appris ! ».

Et plus loin, à la question « Qu’avez-vous découvert lors de votre conversion ? », il répond d’abord :

« Enormément ! L’amour infini de Dieu, qui me permet d’aimer mes prochains et de prier pour eux, y compris pour mes ennemis ».

Quand les évêques de France, parlant aux musulmans, confesseront-ils notre foi dans un Dieu d’amour ?

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