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France : Politique en France

Magouille des comptes de campagne par le Conseil constitutionnel

Jacques Robert a été membre du Conseil constitutionnel de 1989 à 1998. A ce titre, il a examiné, en octobre 1995 les comptes de campagne des candidats, notamment ceux d’Edouard Balladur. Il témoigne de la magouille :

"Je vis très mal la façon dont le droit, à cette occasion, a été tordu. […] Comme tous les dossiers électoraux, celui d’Edouard Balladur a été examiné par trois conseillers rapporteurs détachés auprès de nous par la Cour des comptes et le Conseil d’Etat. Leur rapport, présenté en séance plénière, était sans équivoque : les comptes du candidat Balladur accusaient 10 millions de francs de recettes d’origine inconnue. Ils étaient donc irréguliers.

Ont-ils tenté d’obtenir une explication de l’ex-candidat?
Oui. Ils lui ont écrit à trois reprises, par lettre recommandée, mais Edouard Balladur ne leur a jamais répondu. L’explication selon laquelle ces 10 millions provenaient de la vente de tee-shirts, esquissée par son trésorier, ne tenait pas la route. C’était une somme énorme. On s’est tous dit que Balladur se fichait de nous. […] Nous étions tous très ennuyés. Roland Dumas, président du Conseil, a alors pris la parole. « Nous ne sommes pas là pour flanquer la pagaille, a-t-il dit. Les Français ne comprendraient pas qu’on annule l’élection pour une affaire de dépassement de crédits. Il faut trouver une solution. » Il s’est tourné vers les rapporteurs. « Des postes ont peut-être été majorés? Si vous baissiez cette somme, ce serait pas mal… » La séance a été suspendue. Les trois rapporteurs se sont retirés pour travailler. Au bout de cinq ou six heures, quand ils sont revenus, le montant avait été réduit, mais les comptes étaient encore largement dépassés. Roland Dumas leur a demandé de faire un effort supplémentaire. Les rapporteurs se sont retirés à nouveau. Ils ont fini par présenter des comptes exacts… à 1 franc près. Sans doute pour montrer qu’ils n’appréciaient pas d’être pris pour des imbéciles. […] Une chose est sûre : nous n’étions pas très fiers. Nous venions de passer trois jours à huis clos. Nous étions épuisés, mal à l’aise. Nous nous sommes dispersés sans un mot, avec le sentiment que la raison d’Etat l’avait emporté sur le droit. […] Mon impression, c’est que Roland Dumas, Jacques Chirac et Edouard Balladur se tenaient à l’époque par la barbichette. Et que nous avons servi de caution à une belle entourloupe."

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8 commentaires

  1. E. Balladur constitue-t-il l’exception? ou est-il un exemple … paradigmatique?

  2. A mois de janvier 1995, je fus averti par un “publiciste” que Jacques Chirac serait président contre toute attente , pas Edouard Balladur.
    Je trouvais pourtant les pommes si ridicules et pas françaises…

  3. Encore une confirmation que l’alternance gauche droite n’existe pas et que nous sommes bien, nous électeurs, l’alibi d’un parti unique UMPS où l’élu suprême est celui qui est le meilleur serviteur du système.
    Et malgré tout, il y a encore énormément de personnes qui pensent qu’il faut mieux voter pour l’un que pour l’autre, ou que avec l’un se serait pire qu’avec l’autre…Alors que les lois votées à l’époque de l’un, ont des effets encore amplifiés par l’autre.
    Il faudrait réussir à rompre ce cercle vicieux. Le choix devient de plus en plus clair, même si bien sûr ce ne sera pas l’idéal en cas de victoire. Mais tant que nous nous croyons encore dans un système démocratique et qu’on nous permet encore d’aller mettre un bulletin dans une urne, il faudra sans doute le tenter cet unique choix.

  4. La raison d’État pour maquiller des comptes magouillées ?
    Elle est belle la république française…

  5. Quel était le rôle de Nicolas Sarkösy dans cette campagne? Merci.

  6. c’est le Conseil consensucautionnel !

  7. Merci pour cette précieuse information dont le fou du roi Louis XVII a fait un bon usage en la pacsant avec une autre …
    “Du Conseil Constitutionnel de la porno-ripouxblic et de l’amour de la magouille au service du Peuple qui ne comprendrait pas …”
    http://cril17.fr/

  8. Sur le fonds : ces juges constitutionnels, ne sont pas nommés à vie comme aux USA, ce qui garantirait leur indépendance totale, mais pour un temps donné, à part les ex présidents de la R. Ce sont donc des obligés qui sont nommés, voire des gens ”tenus”, et R. DUMAS et qq autres en sont l’exemple. Encore un exemple de la faillite démocratique de la Vème République.
    Quand on pense qu’on persiste à nous parler de partis qui seraient républicains et d’autres qui ne le seraient pas et méritent ostracisme et relégation démocratique…..

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