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Cathophobie / Médias : Désinformation

Si La Croix ne se proclame plus comme avant le « journal le plus anti-juif de France », il en a gardé malheureusement les méthodes et le fonds idéologique

Si La Croix ne se proclame plus comme avant le « journal le plus anti-juif de France », il en a gardé malheureusement les méthodes et le fonds idéologique

L’abbé Michel Viot s’en prend au journal La Croix, qui, en date du 20 mars, à propos du cardinal Barbarin, titrait en première page «La décision surprise du pape» :

Monsieur Guillaume Goubert, patron de La Croix, qui signe l’éditorial est un homme prudent et cultivé. Il connaît son monde et les intérêts bien compris de sa publication. Celle-ci a beau avoir débarrassé sa une du lourd crucifix rayonnant des origines de sa parution, le 16 juin 1883, elle s’appelle tout de même « La Croix », et entre encore dans presque tous les presbytères et maisons diocésaines, sans compter celles de nombreux paroissiens abonnés qui pensent contribuer à la diffusion du catholicisme, sans pour autant forcément lire le journal dans son entier et dans ses détails. Aussi l’auteur de l’éditorial avance-t-il sur le chemin de la vérité avec une humilité de caractère ecclésiastique très professionnelle, de contagion sans doute, un peu comme s’il mettait en pratique ce conseil du rabbin ukrainien du XVIIIe siècle qu’il citait lors de sa prise de fonction en 2015 : « Ne demande jamais ton chemin à quelqu’un qui le connaît. Car tu pourrais ne pas t’égarer ». Je ne sais pas à qui monsieur Goubert a demandé son chemin… mais je salue au passage la référence rabbinique qui consacre l’heureuse rupture du journal avec l’antisémitisme de ses origines. Voilà qui doit réjouir l’âme du colonel Dreyfus. Si La Croix ne se proclame plus comme avant le « journal le plus anti-juif de France » (La Croix, 30 août 1890), ne publie plus de fulminations contre la « youtrerie universelle » qu’il s’agit de mettre à bas en « [boutant] hors de France les Juifs, ces parasites dangereux » et en « [détruisant] par tous les moyens leur influence politique, commerciale et financière » (La Croix, 21 juillet 1898), il en a gardé malheureusement les méthodes et le fonds idéologique. En l’occurrence, il s’agit toujours de souscrire à la forme de progressisme que prescrit l’air du temps et de l’introduire dans ce que l’on présentera comme la foi catholique : en 1898, c’était le dévoilement du « péril juif », hier et aujourd’hui la promotion des vœux pieux humanitaro-socialistes les plus stériles, façon « ne laissons pas mourir la terre », et demain la « réforme » de l’Eglise dont La Croix semble disposer des plans en vue de sa « réparation » (La Croix, 28 mars 2018), avec pourquoi pas « l’égalité de genre » jusque dans le sacerdoce ?

Ce journal a gardé aussi le penchant mercantile de ses origines, sachant écrire ce que son « cœur de cible » catholique veut lire, tout en flattant le monde pour « ratisser » le lectorat au plus large, dans le but bien compréhensif d’augmenter les adhésions. Rappelons qu’en 1884, quand on ne dédaignait pas encore la religion populaire, La Croix misa sur la valeur très sûre que constituait Saint Antoine de Padoue. Aussi organisa-t-elle à sa manière l’œuvre du « Pain de Saint Antoine », récoltant les dons des fidèles pour les prières adressées à ce saint, publiant les demandes et les remerciements, et répartissant les sommes reçues, ce que certains catholiques dénoncèrent, tel Léon Bloy dans « Je m’accuse ». Sans oublier le providentialisme systématique d’un des célèbres fondateurs, le père Emmanuel Bailly, qui ne craignit pas d’écrire que la mort accidentelle de deux cents enfants anglais constituait une double bénédiction : deux cents innocents allaient droit au ciel et devenaient un signe de retour à la vraie foi pour un pays égaré (La Croix, 21 juin 1883).

Les problèmes des mœurs du clergé catholique ont aujourd’hui remplacé le « péril juif » et le Pain de Saint Antoine. La tradition de La Croix impose de viser large, depuis le Comité de la Jupe jusqu’aux porteurs de soutanes, si ces derniers ont la pieuse idée de s’abonner au journal. Aussi notre éditorialiste après avoir souligné son titre provocateur par une citation abusivement tronquée de Monseigneur Georges Pontier, dont il ne retient que deux mots sortis de leur contexte, « étonné» et « inédite», ce qui semble aller dans le sens de la « décision surprise», va tout de même essayer de justifier « un peu » le Pape. Il consent à écrire que le Cardinal Barbarin n’est pas aussi responsable que d’autres, que le Saint Siège respecte la procédure d’appel. Voilà pour satisfaire les soutanes et ce qui peut tourner autour.

Mais il faut maintenant satisfaire le Comité de la Jupe, véritable résurrection d’un mélange subtil de comité de salut public et de tribunal révolutionnaire, dans lequel l’âme de Fouquier-Tinville aurait été insufflée dans de juvéniles Théroigne de Méricourt, non encore fessées, puisqu’elles ne veulent rien moins que décanoniser Saint Jean Paul II. Alors tombe la sentence sur le Saint Père : « la décision du pape, si elle est fondée humainement et juridiquement, a cependant un lourd inconvénient, celui de donner l’image d’une Église qui se tient à distance du trouble ressenti dans l’opinion mais aussi par de nombreux fidèles ».

J’abandonne volontiers, pour l’instant à monsieur Goubert ce qu’il appelle l’opinion. Elle est travaillée, et le mot est faible, par des médias qui haïssent l’Eglise catholique et se délectent des fautes graves commises ces temps-ci par certains de ses membres. Ils y prennent tant de plaisir, qu’ils répètent à longueur d’émissions les mêmes faits, au point que pendant certains jours on aurait pu croire que le diocèse de Lyon était un repère de pédophiles camouflés par leur hiérarchie, alors même que le Cardinal Barbarin depuis son arrivée à la tête du diocèse a été un modèle de rectitude sur cette question des mœurs, n’hésitant pas à prendre des décisions et des sanctions exemplaires, dans des situations particulièrement graves.

Mais je ne resterai pas muet sur ce qui est appelé « le trouble des fidèles» : il s’agit moins d’une réaction légitime face aux abus que d’une remise en cause de cette vérité fondamentale selon laquelle, l’Eglise de Jésus Christ« subsiste » dans l’Eglise Catholique. Ayant le bonheur de me trouver toujours en activité et auprès de toutes les sortes de fidèles qui fréquentent à des rythmes aussi divers que variés notre Église catholique, je puis affirmer que le trouble en question n’est fort heureusement pas aussi répandu qu’on veut nous le faire croire !

Cela dit ce «trouble des fidèles» est sensible, c’est vrai, chez une minorité, pratiquante hélas, mais qui, triplement hélas lit des journaux comme La Croix et consorts… qui savent très bien entretenir ce trouble. Madame Isabelle de Gaulmyn, rédactrice en chef adjointe de La Croix, forte de sa proximité avec les victimes du prêtre accusé dans l’affaire en question, a agi comme un témoin à charge contre le Cardinal – et c’est peu dire. Elle a plus que contribué au trouble de certains fidèles, honorant ainsi une certaine ligne de conduite en la matière, elle qui exhortait par exemple à « respecter» le vote irlandais permettant l’avortement, osant explicitement donner la préférence à une vie déjà là, celle de la mère, sur ce qu’elle appelle « une vie en devenir», celle de l’enfant à naître. Rappelons ici quelques vérités chrétiennes : le fœtus est une vie humaine, le supprimer est un acte homicide, aider à le faire rend complice. Ceux qui s’en rendent coupables, comme ceux qui par leur propos diminuent la gravité d’un tel acte, doivent savoir qu’ils sont excommuniés. Ils ne peuvent donc plus participer à l’Eucharistie et sont privés des honneurs des funérailles chrétiennes, sauf repentir. Ils sont donc très mal placés pour donner des leçons de morale catholique. Madame de Gaulmyn devrait y réfléchir. Mais je ne pense pas que son but premier soit d’ordre moral.

Ce but est ecclésiologique. Il faut descendre le prêtre de son piédestal et le désacraliser. Je résume là un programme que l’on retrouve dans plusieurs déclarations et offensives médiatiques faisant suite à ces affaires de mœurs. Ainsi le prêtre redeviendra un humain « normal », il pourra se marier et être du sexe féminin, et, qui sait, transsexuel ! Voilà qui réjouirait celles à qui les deux pieds dans le bénitier ne suffisent pas et qui souhaitent tâter du Saint Chrême dans les paumes de leurs mains. Certes le Comité de la Jupe ne présente pas officiellement la demande de l’ordination des femmes, pas plus que sa chapelle annexe « La conférence des baptisés-e-s de France ». Mais quand on en vient à organiser un « conclave » de femmes comme en mars 2013, au moment même où se réunissait le conclave qui allait élire le successeur de Benoît XVI, à multiplier les déclarations selon lesquelles l’Eglise serait misogyne en ne donnant pas aux femmes la place qui leur est due, on est en droit de se poser des questions. A cause de tels groupes, des catholiques « périphériques » ou de « parvis » sautent carrément le pas, et réclament le mariage des prêtres ainsi que l’ordination des femmes comme signe de normalisation de l’Eglise, c’est-à-dire de configuration à l’esprit du monde.

Or il s’agirait là ni plus ni moins que d’une remise en cause radicale de la mission sacerdotale de l’Eglise et de l’anthropologie chrétienne instituée par le Christ lui-même. Comme, entre autres, le montre bien le prologue de l’Evangile selon Saint Jean, le Verbe de Dieu, en se faisant chair, a dressé sa tente parmi nous. Il est le Nouveau Temple, indestructible, rebâti en trois jours. Pendant sa construction terrestre, c’est à dire pendant tout son ministère jusqu’à la croix, comme dans la suite de sa mystérieuse reconstruction après Pâques, il a maintenu ses différents parvis : la place privilégiée de sa Mère et celle des saintes femmes, celle de Pierre et des autres apôtres, celle des disciples. Voilà l’accomplissement dans l’Eglise de l’anthropologie israélite incarnée dans le Temple de Jérusalem, anthropologie de l’Alliance qui distingue au sein de la nature humaine les femmes des hommes, et qui distingue spécialement d’eux les prêtres et le grand prêtre, ces derniers étant issus des seuls hommes et placés à part dans le sacerdoce. Chacun disposait de son parvis, de son sanctuaire exclusif. Jamais les hommes et les femmes ne mettaient le pied chez les prêtres ! Et encore moins dans le Saint des Saints, réservé au seul grand prêtre ! Voilà pourquoi, seuls les Apôtres, dans la communion avec Pierre, des hommes exclusivement, et leurs successeurs conformés comme eux au nouveau grand prêtre qu’est le Christ assument désormais son sacerdoce. Ils peuvent s’adjoindre des collaborateurs. Ceux-ci n’auront jamais la possibilité d’être leurs égaux, pas plus que les prêtres d’Israël ne pouvaient entrer dans le Saint des Saints. Ils n’ont d’ailleurs pas le pouvoir d’assurer leur succession. L’évêque demeure donc le seul prêtre à part entière dans son diocèse. Il y représente le Christ, qui était un vrai homme placé à part dans le sacerdoce messianique ; son lien avec lui est d’ordre conjugal, il en porte l’anneau et ne peut donc qu’être célibataire. Changer cela porterait atteinte au cœur même du mystère de l’Eglise et du projet de Dieu pour les hommes et les femmes.

Les partisans de ces mortelles innovations les savent impossibles dans la Tradition catholique, reçue de celle d’Israël. Ces nouveaux marcionites essaient en vain à se livrer au spiritisme conciliaire en invoquant les mânes de Vatican II, à défaut de ses textes. Aussi espèrent-ils la réunion d’un concile Vatican III, grâce aux troubles des consciences qu’ils vont tout faire pour augmenter. Et les médias ne manqueront pas pour préparer le terrain. On voit certains hurler partout que rien ne va plus, que le feu est mis à l’Église ! Mais ce sont eux qui le propagent par leurs écrits, leurs biais idéologiques, leurs informations déformées, exagérées et aussi démagogues. Et d’oser aller jusqu’à demander l’intervention du politique pour réformer l’Eglise et réprimer ses abus ! Une commission parlementaire pour rechercher les cas de pédophilie aujourd’hui, demain des élections dans des assemblées primaires paroissiales pour élire les curés et pourquoi pas les évêques ! La conférence épiscopale saisie de ces votes et délibérant en direct à la télévision – et avec les commentaires de madame de Gaulmyn ? En fait, on ne ferait que remettre au goût du jour la Constitution civile du clergé de 1790. Et qu’y aura-t-il après ? Le schisme et la déportation des prêtres récalcitrants ? Et le diable sait quoi d’autre…

Il est donc plus que temps de veiller à ce que certaines publications n’entrent plus par effraction dans les lieux où l’on veut vivre le catholicisme. Continuons donc à faire pénitence pour nos péchés et ceux de l’Eglise, en poursuivant au-delà du Carême quelques privations, comme le jeûne du papier journal qui trouble nos idées et dévaste nos forêts.

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