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Pays : Etats-Unis / Pays : Russie

Poutine est-il tombé dans le piège américain ?

Poutine est-il tombé dans le piège américain ?

D’Antoine de Lacoste :

Tous les galonnés en retraite qui se succèdent sur les plateaux de télévision tiennent le même discours : les opérations militaires ne se passent pas comme prévu, l’armée russe est en difficulté, ses pertes sont énormes, Poutine a sous-estimé l’armée ukrainienne, etc.

Passons sur le côté comique de répétition et rappelons juste que ces « vérités » assénées sont actuellement tout à fait invérifiables. D’autant que seules les sources ukrainiennes sont reprises en boucle. Les « héros » de l’île aux serpents ou les « 1000 morts » du théâtre de Marioupol annoncés par Zelenski lui-même devraient pourtant inciter à plus de prudence. Mais nous sommes dans la dictature de l’émotion, dans un manichéisme typiquement occidental qui nous rappelle les grandes heures de la Syrie ou du Kosovo. Faut-il rappeler que c’est à la fin d’une guerre que l’on sait qui l’a gagnée ?

Il y aurait cependant plusieurs débats stratégiques à tenir et rares sont ceux qui s’y engagent mais il y en a.

Certains pensent ainsi que les Américains ont en quelque sorte attiré la Russie dans le piège ukrainien non seulement pour l’affaiblir mais aussi pour raffermir l’OTAN et ressouder l’Europe derrière elle.

Il est vrai que depuis des années (2007 et le discours de Munich de Poutine par exemple), la Russie attire l’attention des occidentaux sur sa préoccupation concernant l’Ukraine et la Géorgie. Bien des dirigeants russes ont rappelé que l’adhésion à l’OTAN de ces pays serait une ligne rouge inacceptable. Contrairement à ce que l’on peut penser aujourd’hui, les Européens étaient parfaitement conscients de ce problème et souhaitaient le résoudre à l’amiable.

Dans le Figaro du 26 mars, Maurice Gourdault-Montagne, ancien conseiller diplomatique de Jacques Chirac, raconte :

« Des occasions ont été manquées. Par exemple fin 2006 Jacques Chirac m’avait envoyé à Moscou pour présenter l’esquisse d’un plan consistant en une protection croisée de l’Ukraine par la Russie et l’OTAN. Cela aurait été une manière de faire de l’Ukraine un pays neutre garanti dans ses frontières. Le conseiller diplomatique de Poutine s’était montré très intéressé, y voyant le règlement de la situation de la flotte de Sébastopol, basée en Crimée ukrainienne, garantissant à la Russie un accès aux mers chaudes. Condoleeza Rice, secrétaire d’Etat du président Bush à qui j’en parlais un peu plus tard me répliqua sans ambages que « la France n’avait pas à bloquer l’adhésion de l’Ukraine et de la Géorgie ».

La France pourtant, dès l’année suivante et aidée de l’Allemagne, bloquera cette adhésion lors du sommet de Bucarest.

Les Etats-Unis se sont acharnés dans cette voie, malgré les multiples avertissements russes. Comme si, au fond, ils souhaitaient le déroulement du scénario actuel. Il est d’ailleurs symptomatique que durant tout l’automne, alors que les Européens ne croyaient pas à l’invasion russe, les Américains répétaient que la Russie envahirait l’Ukraine. Certitude ou intox se demandait-on à l’époque ? Et pour bien enfoncer le clou, de rappeler à plusieurs reprises que ce n’est pas à la Russie de « décider qui adhère ou non à l’OTAN ».

Lorsqu’en septembre 2020 le président Zelenski affirme que la stratégie de sécurité nationale de l’Ukraine prévoit l’adhésion de son pays à l’OTAN, confirmant d’ailleurs un vote du parlement de juin 2017, que croit-on qu’il puisse se passer ?

« Poutine n’est pas fou » rappelle Gourdault-Montagne. Il a en réalité estimé que les intérêts vitaux de son pays étaient menacés, ce que savaient bien les Américains.

Est-ce un piège pour autant ? L’avenir le dira et c’est loin d’être certain mais en attendant l’Amérique livre de plus en plus d’armes à l’Ukraine, comme pour faire durer le plaisir.

Biden a encore annoncé de nouvelles livraisons, notamment d’armes lourdes. Et les Russes ont averti « des conséquences imprévisibles » que cela pourrait avoir.

L’Amérique cherche la guerre et l’Europe ferait mieux de chercher la paix au lieu de courir derrière son maître.

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15 commentaires

  1. En effet bien plus que Poutine c’est l’UE qui fonce tête baissée dans le piège américain. La Russie défend ses intérêts. Nous défendons les intérêts de l’Amérique. Est-ce bien raisonnable ?

  2. En quoi défendre les intérêts vitaux de son pays serait-il un “piège”?
    L’adhésion de l’Ukraine à l’OTAN était inacceptable, et la préparation ukrainienne d’un génocide contre la population russophone du Dombass l’était tout autant.
    C’est le discours occidental/américain qui est déconnecté de la réalité. Il faut arrêter de croire à la propagande de guerre, “dans une guerre la première victime est la vérité”.

    • Pour l’instant le seul génocide que l’on a pu constater avec certitude c’est celui de la population ukrainienne. Si les séparatistes russes n’apprécient pas l’état de droit ukrainien, la frontière leur est grande ouverte depuis des années pour retourner vivre dans leur mère patrie.
      L’excuse officielle russe de se porter au secours de minorités opprimées est un argument faisandé depuis que Hitler s’en est servi pour envahir les Sudètes ou réaliser l’Anschluss: Les ex-républiques de l’URSS sont presque toutes truffées de minorités russes issues des apparatchiks de l’ère communiste, donnant ainsi légitimité 30 ans plus tard au dictateur parano de l’ex-mère patrie une invasion qui n’a d’autre finalité que de reconstituer le défunt empire soviétique.
      Après l’Ukraine, à qui le tour?

      • Encore une victime de la propagande stupide qui prétend que des cadavres jonchant les rues peuvent rester trois semaines sous le soleil de printemps et se présenter frais comme des roses sous l’objectif des photographes…

  3. Poutine, je ne sais pas… mais les européens, ça, c’est sûr !!

  4. La France de Macron et tous ses successeurs, à partir de De Gaulle, me dégoutent !!

  5. Il faudrait que la Russie se mette dans la tête que la puissance d’un pays ne se mesure pas à sa surface géographique. Manifestement la nostalgie de l’empire post-tsariste soviétique a fait enfler les têtes à Moscou.
    Le réarmement russe après la déconfiture soviétique n’est pas à la hauteur des craintes occidentales si l’on en juge par l’enlisement de l’armée sur terre et un croiseur coulé en mer Noire. Ce qui ne dissuade pas, entre autres, la Suède et la Finlande, neutres depuis des lustres au temps de l’URSS, de vouloir rapidement adhérer à l’OTAN: La défunte URSS leur semblait un pôle de sagesse et de prudence, comparée à la dictature d’un psychopathe paranoïaque sur le point d’utiliser l’arme nucléaire si ses ambitions territoriales sont contrecarrées trop longtemps.

    • N’importe quoi. Retournez regarder BFMTV ! C’est normal que Poutine veuille protéger les frontières de son pays contre l’OTAN bidéniste et mondialiste !

      • Montrez-nous QUAND est-ce que l’OTAN a agressé la Russie, franchi ses frontières avec des chars et de l’infanterie, violé son espace aérien avec hélicos, chasseurs et missiles, bombardé Moscou et Pétersbourg, et trucidé (souvent avec des viols) de façon ignomineuse des civils russes ?
        L’Ukraine, comme la Finlande, la Suède et plusieurs autres états sont parfaitement en droit de choisir une protection militaire contre toute agression étrangère. Une intégration dans l’OTAN semble préférable à une alliance avec une Russie manifestement dirigée par un fou.

    • N’importe quel géographe sait pourtant qu’un pays avec une surface importante est nettement avantagé par rapport à un pays avec une surface faible. Le géographe est ancré dans le réèl.
      Vous devriez éviter de sortir des inepties…

    • Tissu d’âneries consternant !

  6. or dure la guerre, les usine d’armement filières de l’OTAN et donc de l’amérique sont appelées à produire
    Jamais je n’aurais imaginé que l’amérique nous fasse cela, ils ont réussi a nous importer la guerre en Europe
    Vive la Fayette et les autres

  7. Les armes envoyées aux Ukrainiens finiront sur les marchés noirs européens
    14 avril 2022
    https://reseauinternational.net/les-armes-envoyees-aux-ukrainiens-finiront-sur-les-marches-noirs-europeens/

  8. la guerre Russo-ukrainienne est une guerre de sécession.
    les USA savent ce que c’est .
    comme toutes les guerres civiles , elle va être atroce , surtout avec les mœurs modernes de pays à peine sortis de la sauvagerie bolchevique .

  9. Je trouve votre vision des choses assez binaire manichéenne, A peut avoir une part de culpabilité sans que B soit innocent.

    Je ne suis pas souvent d’accord avec Montesquieu, mais il a raison lorsqu’il dit qu’il ne faut pas confondre ceux qui ont déclenché une guerre avec ceux qui l’ont rendue inévitable.

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