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Pays : International

Plaidoyer pour la responsabilité

Communiqué de l'Observatoire socio-politique du diocèse de Toulon :

A"A l’invitation de l’Observatoire sociopolitique du diocèse de Fréjus-Toulon, des économistes chrétiens se sont réunis sur l’île de Lérins les 22 et 23 octobre 2011. […] l’Observatoire sociopolitique du diocèse de Toulon souhaite interpeler les acteurs du G20 qui s’ouvre demain à Cannes. En effet, nous savons que les décisions qui y seront prises ne sont pas les réformes structurelles profondes dont le monde a besoin. Si la crise économique s’amplifie, c’est qu’elle repose sur de lourdes erreurs structurelles, cachées par un manque de transparence et de vérité. Il serait donc illusoire de penser une réforme financière sans faire la vérité sur l’homme, l’Etat et l’économie.

« L'homme doit être au centre de l'économie et l'économie ne doit pas se mesurer en fonction d’un plus grand profit mais en fonction du bien commun. Elle inclut la responsabilité de l'autre et ne fonctionne vraiment bien que si elle agit de façon humaine dans le respect de l'autre », nous rappelle opportunément Benoît XVI dans l’avion qui le conduisait à Madrid en août dernier. La crise mondiale est d’abord une crise anthropologique. En effet, si l’économie est un ensemble d’actes humains, portés ou subis par des hommes, l’économie n’agit jamais par elle-même : il n’existe pas « d’être économique ». Affirmer que l’homme doit être au centre de l’économie signifie donc qu’il doit en rester le seul acteur et le maître, sans lui être soumis, ce qui constituerait un manquement à sa condition d’homme. L’économie qui est là pour l’homme ne doit donc en aucun cas porter atteinte à sa dignité. […] L’économie relève en effet d’actes humains responsables et solidaires. L’interdépendance native de l’homme en société lui confère une responsabilité permanente sur les autres, qui doit le conduire à accepter et à assumer cette solidarité. Être responsable, étymologiquement, c’est répondre à. Cela signifie que nous assumons de rendre des comptes à qui de droit. Ce « qui de droit » étant celui qui est concerné, directement ou indirectement, par mes actes et leurs conséquences. Assurément, l’acte économique induit par nature une relation, dans laquelle celui qui donne comme celui qui reçoit sont en droit de demander compte de ce qui a été échangé et de la qualité même de l’échange. Ce qui est dû à l’autre dans l’acte économique est à la fois quantitatif (ce qui est échangé) et qualitatif (comment cela est échangé). La responsabilité d’un acte économique porte donc sur l’adéquation entre cet acte et ce qui est dû. Je pose un acte responsable, lorsque j’ai pris soin de cette adéquation. […]

La justice n’est pas l’égalité ni l’uniformité, mais l’équité et la diversité. Ainsi, imposer des besoins économiques standards à l’ensemble de la société est contraire à la dignité de la personne humaine, car cela ne répond plus aux besoins de chacun et nie toute responsabilité individuelle à l’homme. Car la responsabilité ne porte pas sur la notion de dignité humaine, mais sur la dignité de personnes très concrètes. Dans ce sens, l’imprévisibilité de l’activité économique, liées à la nature de l’homme, comporte de fait un risque évident pour le bien commun. Prévoir ce risque est précisément le rôle de l’Etat, garant du Bien Commun, face aux seuls intérêts privés. Garant, cela veut dire qu’il doit veiller à ce que le bien privé ne se fasse jamais au détriment du Bien Commun, et qu’il lui soit ordonné. Cela veut dire qu’il est le garant de la justice et qu’il doit la promouvoir et la rétablir au besoin. En ce sens, la responsabilité de l’Etat doit porter à la fois sur la finalité (la promotion de la dignité de la personne humaine) et sur les moyens (respectueux de cette dignité). Obéissant au principe de subsidiarité, l’Etat doit vérifier que chacun tient sa place au service du Bien de tous. Le fondement de la responsabilité se trouve donc dans la personne humaine qui seule pose des actes responsables et choisis. Toute compétence, autorité n’est qu’une délégation de cette responsabilité de la personne humaine. […]

Aujourd’hui, nous sommes enlisés dans un système qui craque, tout en restant tétanisés par les conséquences qu’impliqueraient de saines réformes, parce que nous avons substitué la vérité de l’avoir à la vérité de l’être, nous avons identifié l’être et le faire. Nous ne sommes plus ce que nous sommes ontologiquement, mais nous sommes devenus ce que nous faisons et gagnons économiquement. Nous ne sommes plus nous-mêmes, mais ce que socialement nous avons revêtu comme masque. Et ce précisément parce que ce n’est plus l’homme qui fait l’économie, mais l’économie qui fait l’homme. Il ne s’agit pas cependant de diaboliser le monde économique ou l’Etat, mais de réordonner les choses au Bien Commun, chacun à sa place, tenant son rôle. Ordonner signifie en effet remettre à sa place chaque pierre de l’édifice. Mais pour ordonner, il faut savoir où l’on veut aller et d’où l’on part. Changer durablement et adéquatement, c’est-à-dire de façon juste, le modèle économique, ne pourra néanmoins se faire qu’accompagné ou précédé d’un changement de modèle anthropologique qu’il appartient au politique de promouvoir. Les responsables politiques doivent, avant tout autre chose, renouer avec la vérité de l’homme. En effet, l’Etat, garant de l’éthique économique est devenu acteur économique : technicien, gendarme, pompier. En ce sens, l’invitation du G20 à « réguler » le système et non à le réformer est assez révélatrice du niveau auquel les hommes politiques situent désormais l’Etat. […]

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