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L'Eglise : L'Eglise en France

Lettre ouverte de l’abbé Michel Viot aux prêtres de France à propos de la réception par la Conférence des Évêques du rapport de la Ciase

Lettre ouverte de l’abbé Michel Viot aux prêtres de France à propos de la réception par la Conférence des Évêques du rapport de la Ciase

Paris, le  3 décembre 2021

En la fête de Saint François Xavier, prêtre

 

Chers Frères dans le Christ,

Ne voyez nullement dans mon initiative une forme d’irrespect envers l’autorité de nos Pères évêques. Au contraire, elle voudrait venir au secours de cette autorité grandement mise à mal dans l’opinion publique et dans l’Église. Nous savons tous, et nous devons leur dire, que de nombreux prêtres et laïcs ont ressenti les décisions qui ont été prises lors de la dernière assemblée de Lourdes comme un véritable coup de massue. Je voudrais donc ici résumer brièvement le sentiment de beaucoup d’entre nous sur cette affaire.

1°/ Tout d’abord le rapport de la Ciase nous semble en soi une mauvaise action. En laissant de côté la composition de la Commission Sauvé, sur laquelle il y aurait beaucoup à dire, le ton paternaliste du rapport, ses propositions dont certaines touchent à la structure de l’Église du Christ, nous voudrions seulement relever ce qui saute aux yeux : le caractère discutable, pour parler faiblement, de sa méthodologie.

Un appel à témoignages lui a permis de nouer 6 471 contacts concernant des plaintes : 3 652 entretiens téléphoniques, 2 459 courriels et 360 courriers. Elle n’a cependant réalisé que 153 auditions de personnes plaignantes. Puis avec des méthodes d’évaluation fondées sur des sondages, elle a extrapolé à 330.000 le nombre des personnes qu’elle qualifie non de plaignantes, mais de victimes de clercs, religieux et laïcs au service de l’Église depuis 1950. Elle évalue de même le nombre des prêtres et religieux qualifiés de criminels entre 2900 et 3200. Or, il existe des affaires jugées et d’autres jugeables, dont les victimes, les auteurs, et éventuellement les évêques complices de ces auteurs par leur faiblesse coupable, sont parfaitement identifiables : la justice ecclésiastique et civile s’est exercée et peut s’exercer pour que soit préservé le bien commun gravement lésé par ces crimes odieux. Alors que les 3000 criminels virtuels et les 300.000 victimes virtuelles évoqués par le rapport de la Ciase ne seront, par la force des choses, jamais entendus ni même jamais désignés, mais deviennent une formidable machine de guerre contre l’ensemble des prêtres et religieux de l’Église qui n’en peuvent mais.

2°/ Il nous apparaît que l’acceptation par la CEF du rapport de la Ciase est grosse de très graves conséquences. Ici encore, on peut laisser de côté l’accessoire comme la création d’un tribunal pénal national, alors que ces sortes de crimes, qualifiés canoniquement de delicta graviora¸ sont soit évoqués par la Congrégation pour la Doctrine de la Foi, soit jugés par les tribunaux qu’elle désigne et contrôle.

Ce qui nous semble contraire aux principes les mieux établis est la délégation d’une véritable juridiction, informelle mais souveraine, l’INIRR, Instance nationale indépendante de reconnaissance et de réparation, créée pour la circonstance. Parmi les plaignants, elle va décider qui sont des victimes aptes à recevoir des réparations pécuniaires, et elle va, par le fait même, désigner des prêtres et religieux comme coupables. Cette instance tiendra ainsi lieu de tribunal jugeant sans débats contradictoires et émettant des décisions qui ne seront susceptibles d’aucunes voies de recours.

D’autre part, c’est une personne morale indéterminée, l’Église, qui sera condamnée à verser des réparations en lieu et place des coupables, à savoir les criminels et les évêques coupablement négligents. On nous dit que l’Église de France (qui n’est aucunement une personne juridique au regard du droit français) s’acquittera de cette indemnisation par des fonds venant notamment de la vente de biens immobiliers des associations diocésaines. Il faut rappeler que celles-ci ont pour objet social, selon leurs statuts, « de subvenir aux frais et à l’entretien du culte catholique », et nullement d’indemniser d’éventuelles victimes en lieu et place de personnes soupçonnées d’être des criminels.

3°/ Enfin, le plus douloureux pour nous est que cette responsabilité pécuniaire est établie au nom d’une « responsabilité systémique de l’Église ». Ceci a le double inconvénient :

  • De diluer dans l’ensemble du corps des évêques, des prêtres et des religieux de France la responsabilité de crimes et de négligences coupables, en exonérant par le fait même ceux qui en portent la responsabilité morale directe, à savoir tels clercs prédateurs et tels évêques laxistes. Tous coupables, mais personne de vraiment coupable.
  • Et surtout de malmener le Credo dans lequel nous affirmons que l’Église est sainte. Sous prétexte de fonctionnements dans l’Église qui ont permis des crimes, on affirme la responsabilité de l’Église fondée par Jésus-Christ.

J’espère, Chers Confrères, qu’il ne sera pas fait grief à moi-même et à tous les prêtres qui pensent comme moi, de notre franchise, dont nos évêques comprendront le caractère filial. Je vous prie de recevoir l’expression de tout mon dévouement dans le Seigneur.

Michel Viot, prêtre

NB: Ceux qui veulent se joindre à sa démarche peuvent joindre l’abbé Viot ici. Une association conseillée par un groupe d’avocats et de juristes sera à la disposition de tous les catholiques qui voudront s’opposer à la vente de biens d’Eglise, pour obtempérer aux indemnisations que va décider la commission présidée par Madame Derain de Vaucresson, compte tenu de l’absence de juridiction de cette instance, et de la nullité de ses décisions. En effet, d’une part, seul un tribunal civil peut accorder des indemnisations au titre du pretium doloris, en vertu de l’article 1382 du Code civil, et d’autre part, les ventes de biens d’Eglise pour des besoins autres que cultuels pourront être annulées par le tribunal administratif comme contraire à l’article 2 des statuts types des associations diocésaines.

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7 commentaires

  1. que penser de la CEF qui depuis quelque temps accepte tout ce que le pouvoir lui impose, que ce soit les églises fermées, les cultes sans assistance, les lois contraires à la doctrine ????
    Enfin une voix qui parle VRAI, qui ne se plie pas
    Mais qui sont ces gens qui prétendent disposer de ce qu’ils n’ont pas ?

  2. le lien ne marche pas?

  3. L’abbé VIOT a un parcours spirituel très intéressant. Sachant d’où il vient alors on ne peut que compatir aux souffrances qu’il exprime en face du personnel habitué aux tapis rouges et souvent peu vivant de l’Eglise. Le grand malheur qui touche nombre de ces évêques est qu’ils ne croient pas à la souffrance expiatoire du Christ. Ils vivent dans une miséricorde à bon marché, dans une fausse théologie.

  4. Bravo Monsieur l’Abbé! Malheureusement, Mgr Eric de Moulins Beaufort (de son vrai nom de Moulins d’Amieu de Beaufort; au séminaire, sa plaque de porte indiquait: “Eric Dumoulin”: a-t-il honte de son nom?) est lié, je ne sais par qui ni pour quoi, mais on le voit bien par sa réception irrationnelle du “rapport” Sauvé, un document dont tout le monde peut juger du peu de valeur scientifique et qui aurait couté 3 millions d’euros! Mgr Eric joue avec l’argent des pauvres et des biens qui ne lui appartiennent pas. Il joue avec les Prêtres, il joue avec le Sacerdoce, il joue avec la foi des petits. Pauvre Eglise! Pluiseurs paroissiens m’ont dit partir définitivement: que puis-je faire?

  5. La lettre de l’abbé VIOT est claire et limpide.
    J’ajoute à celle-ci, que considérer l’Église, en tant que telle, responsable de ces crimes abominables n’est ni plus ni moins une hérésie. C’est exactement la même chose de dire que la faute originelle d’Eve et d’Adam remet en cause la perfection de la Création. On le voit bien, ces remises en cause visent le Créateur Lui-même accusé d’imperfection et de faillite. Nous sommes donc en présence d’un blasphème à visée satanique. Le but recherché ici est bien d’en finir avec la Création Parfaite pour lui substituer un transhumanisme, dont les étapes sont bien connues : avortement, “mariage” gay, PMA, GPA, genre, euthanasie, etc. Dans ce combat luciférien, il faut neutraliser l’Église qui est la seule en mesure de nous indiquer le chemin de la Vérité.
    La question essentielle à laquelle il faut répondre est la suivante : Croyons-nous encore aujourd’hui que Dieu, Père, Fils et Esprit a créé l’Univers pour notre bien et croyons-nous que l’Église a été fondée par Jésus-Christ qu’Il a confié à Sa Mère la Bienheureuse Vierge Marie ?
    Le défit majeur de notre époque est dans la foi en la Vérité et en la Vie, c’est-à-dire en Dieu. L'”ouverture” au monde, selon l’esprit de Vatican II, tout comme la synodalité en débat aujourd’hui ne peuvent porter des fruits que si chaque catholique ne prend pas conscience d’abord que le message qu’il porte est Unique et Irremplaçable. Toute autre chose n’est que gesticulations mondaines stériles.

  6. Merci Mon Père pour cet excellent courrier.
    Quant à indemniser les victimes, je trouve particulièrement choquant qu’on paye comme on le ferait avec une prostituée.
    À l’abjection, on ajoute le mépris…

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