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Bioéthique / Institutions internationales

Les institutions européennes face à l’embryon

Grégor Puppinck, docteur en droit et directeur de l’European Centre for Law and Justice(ECLJ), analyse dans L'Homme Nouveau la décision de rejet de la Commission européenne sur l'initiative Un de nous. Extraits :

"« D’un point de vue juridique, l’embryon est-il une personne humaine ? » […]

La Convention du Conseil de l’Europe sur la biomédecine vise la recherche sur l’embryon et protège « toute personne » sans préciser, volontairement, si les embryons sont des personnes. La Convention utilise aussi l’expression « être humain » en énonçant la nécessité de protéger l’être humain dans sa dignité et son identité. Sur ce point, les États ont précisé que : « Il a été constaté qu’il est un principe généralement accepté selon lequel la dignité humaine et l’identité de l’espèce humaine doivent être respectées dès le commencement de la vie ». C’est elliptique, volontairement.

La Cour de justice de l’Union européenne (CJUE), dans un arrêt Brüstle/Greenpeace de 2011, a été amenée à définir l’embryon au sens d’une Directive qui interdit notamment la brevetabilité des pratiques impliquant la destruction d’embryons. Cette cour a jugé que la notion d’embryon humain devait être comprise plus largement comme celles d’organismes cellulaires qui bénéficient de la protection juridique accordée au titre du respect de la dignité humaine dès qu’ils possèdent la capacité de déclencher le processus de développement d’un être humain. Cela empêche de breveter des procédés qui impliquent la destruction d’embryons, non pas au nom du droit à la vie, ou parce que les embryons seraient des personnes, mais parce qu’ils participent de l’humanité et sont donc revêtus de cette dignité.

Quant à la Cour européenne des Droits de l’homme, elle estime qu’il n’existe aucun consensus européen non seulement sur la définition juridique (ce qui est vrai), mais aussi scientifique (ce qui est faux) « des débuts de la vie » mais que l’on peut néanmoins « trouver comme dénominateur commun aux États l’appartenance (des embryons) à l’espèce humaine ». La Cour ajoute que c’est « la potentialité de cet être et sa capacité à devenir une personne qui doivent être protégées au nom de la dignité humaine ». En conséquence, la Cour juge que « le point de départ du droit à la vie relève de la marge d’appréciation des États, de sorte qu’il est impossible de répondre à la question de savoir si l’enfant à naître est une “personne” au sens de la Convention ». Cela étant, la Cour n’exclut pas qu’il puisse l’être : elle a toujours refusé de dire qu’il n’est pas une personne car la Convention européenne des Droits de l’homme est silencieuse « sur les limites temporelles du droit à la vie », de sorte qu’un État peut« tout aussi légitimement choisir de considérer l’enfant à naître comme une personne et protéger sa vie qu’adopter le point de vue opposé ». (Voir les affaires Vo c. France du 8 juillet 2004 et A. B. et C., c. Irlande du 16 décembre 2010).

En renvoyant aux autorités nationales la détermination de la qualité de l’embryon, la Cour de Strasbourg adopte le point de vue que cette question serait de nature politique et non pas juridique. Mais le politique n’est pas mieux placé que le droit pour dire ce qu’est l’embryon humain : en 1979, l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe reconnaissait « les droits de chaque enfant à la vie dès le moment de sa conception ». En 2008, cette même Assemblée promouvait l’avortement. Les assemblées législatives et les juridictions sont davantage des lieux de confrontation de volontés que les oracles du vrai et du juste.

Si nous, êtres humains, doutons de nous-mêmes et ignorons ce qui fait notre nature d’homme, la volonté de puissance à l’œuvre dans le droit positif ne peut qu’exploiter cette ignorance, mais certainement pas la résorber."

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