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Les fidèles de Saint-Germain-en-Laye attachés à la messe traditionnelle ont rendez-vous avec leur évêque

Les fidèles de Saint-Germain-en-Laye attachés à la messe traditionnelle ont rendez-vous avec leur évêque

Depuis deux ans et demi à Saint-Germain-en-Laye, des fidèles attachés à la liturgie traditionnelle assistent à la messe devant une église fermée à clé. Entretien avec le président de l’association.

Cyril Farret d’Astiès, pouvez-vous rappeler pour nos lecteurs quelle est la situation à Saint-Germain-en-Laye ?

Il y a toujours eu à Saint-Germain-en-Laye des fidèles pour demander la célébration dans leur ville d’un messe traditionnelle. En 2007, forts des promesses du motu proprio Summorum pontificum (Article 5, § 1.  : Dans les paroisses où il existe un groupe stable de fidèles attachés à la tradition liturgique antérieure, le curé accueillera volontiers leur demande), les fidèles ont déposé très officiellement une demande. Demande refusée en février 2008. Pendant dix ans, diverses demandes ont été adressées aux autorités religieuses. Début 2017, suite aux travaux imposant la fermeture temporaire de l’église de Saint-Louis du Port-Marly, cette communauté a été accueillie dans la chapelle des Franciscaines, une des chapelles de notre ville. Constatant les bonnes relations entre tous les fidèles et le clergé à Saint-Germain-en-Laye (organisation d’une procession commune pour la Fête-Dieu par exemple), une nouvelle demande a été déposée et une nouvelle association constituée, toujours en vain. En novembre 2019 a été lu un communiqué annonçant la réouverture de Saint-Louis du Port-Marly et imposant un partage de cette église avec la paroisse de Marly-le-Roi (messe dominicale anticipée du samedi soir), cette communauté est repartie en mars 2020. Nous nous sommes donc retrouvés orphelins dans notre ville. Symboliquement d’abord, une première messe sans autorisation a été célébrée par un prêtre ami à la chapelle Saint-Louis de l’hôpital de Saint-Germain-en-Laye le 21 juin 2020 pour demander la célébration d’une messe traditionnelle chaque dimanche et jour de fête, à une heure compatible avec une vie familiale, dans un des lieux de culte de la ville, célébrée par un prêtre bienveillant. Devant les demandes des fidèles, cette messe a été reconduite, à échéances irrégulières d’abord, puis chaque dimanche et fête à 11h00. Cette messe regroupe en moyenne une petite centaine de personnes, parfois bien davantage, en particulier aux beaux jours.

Où en êtes-vous aujourd’hui ?

Sur le plan pratique, nous approchons le chiffre symbolique de la centième messe célébrée devant la chapelle. Notre organisation est bien rodée : schola, sacristie mobile, ouvroir liturgique, pot de fin de messe, service d’autel… et un stock de parapluie ! Nous cohabitons en bonne intelligence et avec une certaine affection avec les sans-abris qui occupent le porche de l’église. Les prêtres qui nous soutiennent sont conviés à déjeuner à tour de rôle dans les familles.

Sur le fond, nous n’avions aucun contact avec le diocèse à l’époque de monseigneur Aumônier en dépit de nos très nombreuses sollicitations. A la nomination de monseigneur Crepy au siège de Versailles et du père L’Hirondel comme curé de Saint-Germain-en-Laye, les relations se sont immédiatement améliorées. Nous rencontrons régulièrement notre curé et ses jeunes vicaires avec qui nous avons des rapports sincères et fraternels. Nous avons également rencontré plusieurs fois l’abbé Boulle, vicaire général. Nous devons très prochainement rencontrer notre évêque.

L’hiver est pratiquement là, pourquoi ne pas entrer dans la chapelle ou louer une salle ?

Nous ne voulons pas forcer cette porte qui est fermée à clé, nous ne voulons pas entrer en clandestinité, nous ne voulons pas faire sécession, ce que nous voulons c’est que l’Église nous ouvre ses portes car nous sommes ses fils !

Nous comprenons la difficulté que représente pour les autorités religieuses du diocèse cette situation qui possède un double nœud qu’il faut parvenir à trancher.

Premier nœud : notre évêque et notre curé ont hérité d’une situation envenimée dans laquelle ils n’ont aucune responsabilité personnelle.

Second nœud : alors qu’ils entendaient proposer une solution à l’été 2021 (nous en avons la quasi-certitude) ils ont été arrêtés net dans leur élan charitable par l’acte autoritaire du pape François. Ce sont des éléments importants à avoir à l’esprit.

Mais d’autre part, nous sommes de notre côté confronté à une triple injustice : injustice car de 2007 à 2021 le motu proprio Sumorum Pontificum a été bafoué (le curé accueillera volontiers…). Injustice de Traditionis Custodes qui, outrepassant toute légitimité et tout sens de la mesure prétend éradiquer un rit liturgique dont le fondement est précisément la fidélité à la longue Tradition de l’Église. Injustice enfin de se voir fermer la porte au nez quand on sait le succès de mot comme « accueil » et « ouverture » qui accompagnent la communication de l’Église de France depuis quelques années…

N’est-ce pas insoluble ?

CFA : Rien n’est jamais insoluble. Les réalités de l’Église ne sont pas comparables aux réalités juridiques, commerciales ou même diplomatiques. C’est la charité qui doit guider nos réflexions et nos actions.

J’ai exposé les difficultés réciproques dont il faut avoir conscience, mais il ne faut pas les ruminer. Au-delà de ces difficultés bien réelles, je crois très sincèrement qu’entre catholiques il y a forcément moyen de trouver une sortie honorable. Nous en avons identifié plusieurs qui permettraient aux autorités de tourner cette page douloureuse. Et s’il ne semblait pas possible de tourner immédiatement et définitivement la page, il est toujours possible de mettre en place une solution d’attente.

Il y a en outre dans l’Église depuis quelques semaines me semble-t-il une tendance à enterrer la hache de guerre. Trois exemples tout à fait parlants : au cours du pèlerinage ad Sedem Petri 2022 le cardinal Matteo Zuppi, archevêque de Bologne, président de la conférence épiscopale italienne, a présidé les vêpres pontificales au Panthéon ; une caution importante confirmée par l’accueil des pèlerins pour une messe solennelle célébrée dans Saint Pierre par monseigneur Agostini (cérémoniaire et membre de la Secrétairerie d’État), en présence du cardinal Brandmüller, évidemment avec l’accord du pape. De son côté le cardinal Pietro Parolin, Secrétaire d’État, dans un message du 27 octobre 2022 aux évêques de France réunis en Assemblée plénière les a invités « au nom du pape à la plus grande sollicitude et paternité (envers) les personnes – en particulier les jeunes, prêtres ou laïcs – désorientées par le motu proprio Traditionis Custodes (…). A Paris, monseigneur Ulrich a autorisé fin novembre un prêtre de la fraternité Saint-Pierre à célébrer une messe traditionnelle en semaine et le dimanche à Notre-Dame du Lys.

Mais au-delà de ces explications optimistes mais un peu éthérées, à quoi pensez-vous de concret ?

Très concrètement, il est possible que la paroisse offre cette célébration dans une des chapelles de la ville comme elle offre aussi une messe à une petite communauté gréco-catholique ukrainienne ainsi qu’une messe « grégorienne » pour certains paroissiens.

Je pense également possible de rattacher une messe célébrée à Saint-Germain-en-Laye à une communauté traditionnelle déjà existante dans le diocèse.

Il est aussi possible que la porte de la chapelle reste ouverte en attendant que les choses rentrent enfin dans l’ordre à Rome après cet épisode malheureux déclenché en juillet 2021.

Pourquoi ne vous contentez-vous pas de cette messe grégorienne ?

C’est une excellente question ! Et une question bien difficile ! Mais permettez-moi de commencer par une remarque liminaire avant de poursuivre : la question liturgique est vraiment extrêmement sensible car elle touche en profondeur notre rapport à la prière et notre intimité spirituelle. Les réformateurs de la liturgie ont tellement misé sur l’investissement personnel dans la préparation et la conduite de la célébration pour favoriser une participation des prêtres et des fidèles que toute critique, toute interrogation peut être interprétée comme une mise en cause personnelle et une attaque ad hominem.

Ceci étant dit, je pense qu’en proposant à Saint-Germain-en-Laye une messe de Paul VI célébrée en latin, orientée et accompagnée de chants grégoriens les autorités du diocèse ont réellement et sincèrement voulu faire un geste d’ouverture. Tant mieux, cette messe grégorienne peut devenir un « sas » pour retrouver la célébration pleinement traditionnelle.

Pour répondre précisément à votre importante question et essayer de dire les choses avec tact, je voudrais persuader nos frères qui ne comprennent pas notre attachement inconditionnel à la liturgie traditionnelle que cet attachement n’est pas dicté par le sentiment, ni par esprit de contradiction ou d’indépendance. Notre attachement est un attachement spirituel. Lorsque l’on a goûté à l’harmonie de l’année liturgique, que l’on a plongé dans la profondeur rituelle, que l’on a découvert la poésie mystique des oraisons, que l’on a ouvert son intelligence aux mystères rendus perceptibles par l’admirable édifice de la liturgie traditionnelle, que l’on a fait l’oblation de ses propres idées pour se laisser porter et modeler par cette antique tradition cultuelle, les formes soignées et classiques que peuvent prendre telle ou telle interprétation du rit de Paul VI semblent bien trop fades.

Il faut bien avoir conscience que beaucoup de fidèles ont découvert la liturgie traditionnelle au cours de leur vie, ils connaissent donc bien le nouveau rit et ils l’ont abandonné pour une source plus vive, plus fraîche, plus désaltérante.

Un dernier mot ?

CFA : En échos à ce que disait récemment monseigneur Crepy à Lourdes au micro de KTO évoquant la communion dans la diversité des communautés, je citerais cette sentence que l’on attribue habituellement à saint Augustin : In necessariis unitas, in dubiis libertas, in omnibus caritas.

Pour toute question complémentaire, contact de l’association : [email protected]

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