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L'Eglise : Vie de l'Eglise

Les chrétiens d’Afrique sont très surpris par l’accusation de « pharisaïsme »

Le père Edouard Ade, prêtre du diocèse de Cotonou et Secrétaire général de l'Université Catholique de l'Afrique de l'Ouest / Unité de Cotonou, écrit sur le synode :

"1. Tout le monde a entendu le 04 octobre le Seigneur s’adresser à son Eglise : le mariage tel que voulu et fondé par Dieu, c’est un homme et une femme ; rien d’autre (Gn 2, 18-24). Et cette union est indissoluble : « ce que Dieu a uni, que l’homme ne le sépare pas » (Mc 10,9). Pas d’interprétation compliquée pour cette parole claire du Seigneur qu’il faut accueillir à la manière des enfants, car, « celui qui n’accueille pas le royaume de Dieu à la manière d’un enfant n’y entrera pas » (Mc 10,15). Jésus qui parle ainsi est celui qui « n’a pas honte de les appeler ses frères » (He 2, 11). Son amour n’exclut donc personne pas même le dernier des pécheurs, c’est pour cela qu’il a fait l’expérience de la mort, « au profit de tous ». Mais il n’a cependant pas voulu laisser cette multitude de pécheurs dans leur état de péché. Il a choisi de les conduire jusqu’à la gloire. Il les a sauvés et sanctifiés.

2. Qu’une telle parole de la part du Seigneur ait résonné aussi clairement à l’ouverture du Synode alors que les textes n’ont pas été choisis exprès pour cette circonstance devrait clore tous les débats idéologiques que l’on entend par médias interposés depuis des mois.

3. Les fidèles du Christ en Afrique sont gênés dans leur foi simple quand tous ceux qui rappellent cette vérité de l’Evangile sont taxés globalement de « conservateurs attardés », de « fondamentalistes ». Non, leurs pasteurs avec qui ils sont en profonde communion, ne sont pas du Moyen-âge mais bien de ce monde du XXIème siècle qui ne se réduit pas à ce que l’Occident vit comme difficultés anthropologiques et religieuses.

4. Ils sont surpris quand le Père Rosica, dans son briefing du mardi 06 octobre, parle indistinctement des homosexuels, des couples vivant en concubinage et des mariages polygames. Les Pères africains qui ont pu parler de mariages polygames pendant le « huis clos » n’ont certainement pas parlé de polygamie de chrétiens mais de « païens » en situation de polygamie dont l’un des membres demande à accéder au sacrement de baptême. C’est cela la question pastorale rencontrée depuis le temps des missionnaires en Afrique, au sujet de la polygamie. Ces frères qui vivant à la manière des patriarches, frappent à la porte de l’Eglise ne se sentent pas regardés avec condescendance par la communauté chrétienne parce que celle-ci affirmerait les exigences de l’Evangile.

5. Les fidèles du Christ en Afrique sont aussi très surpris que l’on veuille à tout prix coller le « complexe du pharisaïsme » à tous ceux qui affirment la doctrine catholique de toujours. Pourquoi doit-on taire l’instant de « conversion » exigée par l’Evangile de tous, pour accentuer unilatéralement une attitude de miséricorde qui serait dans ce cas la pire condescendance parce que excluant l’instant de vérité ? Quand Jonas a fait la prédication à son corps défendant à Ninive, tout le monde, depuis le Roi jusqu’aux animaux, se sont mis en habit de pénitence. Qui aujourd’hui s’est-il mis en attitude de conversion et a été tenu hors de l’Eglise ?

6. Le Père Lombardi n’a pas su si bien dire en parlant d’attitude « irresponsable » au sujet de l’incident médiatique du samedi 03 octobre provoqué par un prêtre, de surcroît, un official de la Curie. Car cela pose un problème de fond. Dans le débat en cours au sujet du mariage, il arrive que l’on se demande si c’est vraiment la situation des mariés qualifiés de « blessés » qui préoccupe à ce point et pour qui on voudrait des solutions en raccourcis, même quand les concernés protestent contre cette « bienveillance » qui ne les libère pas vraiment ? A la lumière de l’incident sus-cité, on est bien en droit de se demander si la persistance avec laquelle ont été maintenues dans les documents préparatoires au Synode des affirmations « scandaleuses » du type de la reconnaissance de « valeurs positives » dans des situations objectivement contraires à la vérité de l’Evangile, ne s’origine pas ailleurs que dans la compassion avec les mariés « blessés »

7. Lorsque l’on rapproche les considérations actuelles sur la miséricorde dans le champ de la pastorale familiale de l’Eglise de la parabole du Père miséricordieux et de l’enfant prodigue, on se retrouve comme devant cette situation paradoxale : c’est comme si le fils prodigue exigeait de son père, pour son retour, que celui-ci change d’abord les règles qui régissent sa maison. Devant la pression médiatique, on est loin de l’attitude de cet enfant qui « rentra en lui-même » et qui s’est dit : « tant d’ouvriers chez mon père » ; il n’a même pas eu le courage de se comparer à son frère qui est resté à la maison. Il lui suffisait qu’il soit traité comme un « ouvrier ». Il n’avait pas de prétention. Il avait même préparé minutieusement sa « confession ». Que le père miséricordieux ne lui laisse même pas le temps de faire le décompte de ses péchés, qu’il lui donne un habit nouveau et des sandales, qu’il fasse la fête, etc. ce n’était pas en raison d’une « miséricorde codifiée » mais par fidélité à l’amour que nul n’a le droit de figer. Mais ce débordement de « la miséricorde qui se moque du jugement » est une prérogative de Dieu. Ce n’est pas un « droit à conquérir ». Qui nous a dit que chez Dieu les divorcés remariés civils sincèrement repentis mais qui n’auraient pas eu la possibilité de communier ne nous devanceraient pas ? Si nous croyons vraiment que Dieu est miséricordieux, laissons-le exercer sa pleine miséricorde, en respectant scrupuleusement l’économie sacramentelle que Lui-même a établie. S’il veut donner à l’ouvrier de la dernière heure autant qu’à l’ouvrier de la première heure, n’a-t-il pas le droit de faire de son bien ce qu’il veut ? Mais ne nous substituons pas à Dieu. Car lui seul a su sur la Croix ce qu’il lui en a coûté de faire miséricorde aux pécheurs. L’Eglise ne peut disposer à sa guise des préceptes et des sacrements du Seigneur. Et cela n’est pas du fondamentalisme ni de l’intolérance mais l’humble reconnaissance de la place de l’Eglise et de ses pasteurs dans l’œuvre du salut.

8. Si nous croyons vraiment que Dieu est plus grand que notre cœur qui nous condamne justement, n’ayons pas peur de reconnaître que Dieu veut autre chose pour nous que la situation dans laquelle nous ont mis nos péchés. Nous n’allons pas diluer la loi de Dieu ou la réécrire pour apaiser notre conscience malheureuse. Cette falsification de la vérité ne changera rien à notre situation et ne nous justifiera pas devant Dieu. Laisser l’évangile être l’évangile avec ses exigences de conversion, c’est reconnaître qu’il est vraiment bonne nouvelle pour nous.

9. Si l’Eglise devrait procéder autrement, il ne lui suffira pas de reconnaître des « valeurs positives » dans les unions homosexuelles, chez les divorcés remariés, chez les chrétiens polygames, etc. Il lui faudra aussi réviser sa notion de péché, enlever de son enseignement la notion du purgatoire et pourquoi pas celle de l’enfer puisque de telles notions ne correspondraient à rien, à aucun état de l’âme après la mort. Continuer à parler de péché et de purgatoire, ce serait du « conservatisme moyenâgeux » et de « l’intolérance moderne ». Il lui faudra  rendre son discours plus audible pour l’homme contemporain ! Voilà à quoi nous nous exposons.

10. Ecouter ce que l’Esprit dit aux Eglises, c’est se refuser à confondre « l’air du temps » et « les signes du temps ». Ce à quoi le monde provoque l’Eglise, c’est à être elle-même, non une copie du monde. Dans un monde où la dictature du relativisme se fait de plus en plus implacable et où montent en face du christianisme certaines formes de fanatisme religieux qui confondent le christianisme avec la culture en décadence du postmodernisme occidental, les fidèles du Christ en Afrique sont préoccupés par l’image que l’Eglise donne d’elle-même. Leur plus profonde prière est que les Pasteurs de l’Eglise aient le courage de faire des choix pastoraux qui aident l’Eglise à rester elle-même, non une pâle caricature d’un monde en décadence. Rester elle-même, oui, mais sans non plus se murer dans la peur, être une Eglise d’espérance pour tous."

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