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Culture / Histoire du christianisme

Le comte de Chambord face à l’idéologie de la République

Le comte de Chambord face à l’idéologie de la République

Les éditions Via Romana viennent de publier les actes des colloques tenus à l’occasion du bicentenaire de la naissance du Comte de Chambord (1820-2020). Personnalité emblématique d’un XIXe siècle tourmenté, le comte de Chambord, « Enfant du miracle », n’a jamais régné mais son magistère intellectuel demeure bien réel et son combat social toujours d’actualité. Il fut un repère moral pour ses partisans, autant que pour ses adversaires républicains et orléanistes, se heurtant sans cesse au principe qu’il s’efforça d’incarner : « Ma personne n’est rien ; mon principe est tout ». Et s’il est vrai que l’essence doit s’actualiser dans l’existence, le prince de Bourbon parvint à maintenir la royauté traditionnelle présente à l’esprit de tous, en particulier parmi les couches populaires, renouant ainsi avec la vieille alliance de la royauté et du tiers-état, du trône et du peuple.

« Sachons reconnaître que l’abandon des principes est la vraie cause de nos désastres. Une nation chrétienne ne peut impunément déchirer les pages séculaires de son histoire, rompre la chaîne de ses traditions, inscrire en tête de sa constitution la négation des droits de Dieu, bannir toute pensée religieuse de ses codes et de son enseignement public. Dans ces conditions, elle ne fera jamais qu’une halte dans le désordre, elle oscillera perpétuellement entre le césarisme et l’anarchie, ces deux formes également honteuses des décadences païennes. » Déclaration du 7 mai 1871

Seize auteurs présentent le fruit de leurs travaux dont plusieurs inédits menés autour de la personnalité, de la pensée et de l’action du Prince. Entre le bicentenaire de sa naissance (29 septembre 1820) et le 140e anniversaire de sa mort (24 août 1883), ce livre qui puise aux sources les plus récentes de la recherche fixe pour plusieurs décennies une étape décisive dans l’historiographie du comte de Chambord.

Philippe Montillet, juriste et historien, administrateur de l’Institut de la Maison de Bourbon, et Benoît Courtin, diplômé de Sciences Po, président de l’association culturelle bretonne Cercle Jean-Pierre Calloc’h, ont dirigé ces riches contributions de Mgr Louis de Bourbon, duc d’Anjou ;  Michel David ; Patrick Guibal ; Antonin Macé de Lépinay ; Korantin Denis ; Jean-Paul Clément ; Rémy Hême de Lacotte ; Père Augustin Pic ; Philippe Pichot-Bravard ; Franck Bouscau ; Mathias Martin ; Patrick Delon ; Benoît d’Audiffret ; Yves Tillard ; Marie-Pauline Deswarte ; Guillaume Bernard .

Philippe Pichot-Bravard montre notamment que les réactions engendrées par la publication du Syllabus le 8 décembre 1864 par le pape Pie IX mirent en lumière l’affaiblissement de la catholicité, révélant la soumission de la grande majorité de l’épiscopat concordataire  à l’égard du pouvoir politique, et trahissaient  la conversion d’une large partie des élites catholiques aux principes de la modernité philosophique :

Ce sont ceux qui n’ont pas reçu le Syllabus en 1865 qui ont, entre 1871 et 1873, empêché la restauration d’Henri V. Les catholiques libéraux, tant du côté orléaniste que du côté légitimiste, ont voulu se prémunir contre la restauration d’un roi du Syllabus, d’un roi traditionnel, en lui imposant comme condition de sa reconnaissance par eux de l’acceptation, par lui, de ce que l’on appelait alors les “principes de 89”, expression aussi vague et mouvante que l’est aujourd’hui la notions de “valeurs de la République”. […]

Le prince n’a jamais eu l’intention d’imposer sa volonté au peuple français, de le contraindre à la légitimité en usant de moyens contraires à l’esprit de la légitimité. La Contre-révolution n’est pas une révolution blanche mais le contraire de la Révolution.  Elle ne peut pas s’opérer avec les moyens de la Révolution que sont la révolte, le mensonge, le coup d’Etat et le crime. Elle exige de s’opérer avec les moyens qu’enseigne la morale chrétienne. A l’instar du Christ qui offre son amour aux hommes mais se refuse à les contraindre à l’aimer, parce que cette contrainte annihilerait cet amour qui exige un engagement libre, le comte de Chambord offrait aux Français de se rallier à lui, refusant non seulement le marchandage, mais aussi la contrainte, parce que la restauration de la royauté traditionnelle devait reposer sur l’amitié entre le prince et son peuple, engagement réciproque qui exige la liberté. Cet antilibéral qu’était le comte de Chambord était bien plus respectueux de la liberté d’autrui que ne l’étaient les libéraux.

Dans sa contribution, Marie-Pauline Deswarte souligne le caractère irrécupérable de la République issue de la Révolution :

Pour contrer la République idéologique beaucoup croient à une République modérée conservatrice de l’ordre social : c’est le cas de Thiers. Voyant la faiblesse originelle d’une République sombrant dans l’anarchie, il pense corriger ce défaut en accroissant les pouvoirs du Président de la République ; pour lui, la monarchie orléaniste serait en fait une République orléaniste. La gauche évolue ainsi. Le comte de Chambord a compris le danger. Le 6 octobre 1873 il écrit : “En France Thiers se met décidément à la tête de toutes les gauches contre la monarchie”. Il comprend que la République est une idéologie, celle des droits de l’homme axée sur l’individualisme, qui a rejeté l’homme social.

La déroute actuelle de nos partis de droite témoigne de la pertinence de cette analyse qui n’a pas prise un ride. Depuis le début de la Vème République qui voulait restaurer l’ordre social en donnant un pouvoir effectif au Président de la République, leur conservatisme n’a jamais su s’opposer efficacement à la Révolution triomphante […].

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