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Histoire du christianisme

La Sainte-Baume et Marie-Madeleine

De Cotignac 500 :

Marie-Madeleine ! Figure de sainteté bien connue et aimée des chrétiens, l’Apôtre des Apôtres ! L’une des personnalités les plus riches de la tradition chrétienne.

Éléments bibliques

La réflexion exégétique, grâce notamment au labeur de saint Grégoire le Grand, réunit sous le nom de Marie-Madeleine plusieurs figures évoquées en divers récits de l’Évangile.
Elle apparaît sous plusieurs vocables :

  • Marie de Magdala, la démoniaque devenue disciple (Lc 8,1-3), présente au pied de la croix (Mt 27,55-56 ; Mc 15,40-41 ; Jn 19,25) et à l’ensevelissement de Jésus (Mt 27,61 ; Mc 15,47 ; Lc 23,55-56), premier témoin de la résurrection (Mt 28,1-8 ; Mc 16,1-8 ; Lc 24,1-11; Jn 20,1.11b.12.13.17.18), que Jésus envoie en mission auprès de ses frères (Mc 16,9-11 ; Jn 20,11-18).
  • Marie de Béthanie, la sœur de Marthe (Lc 10,38-42) lors de la résurrection de Lazare (Jn 11,1-46). La femme qui fit l’onction de Jésus à Béthanie précisément (Mt 26,6-13 ; Mc 14,3-9 ; Jn 12,1-8) (onction sur la tête en signe de la royauté de Jésus).
  • La pécheresse pardonnée et aimante (Lc 7,36-50) qui apporte le parfum pour en oindre les pieds de Jésus et qui les essuie avec ses cheveux (onction sur les pieds en signe de sa mort et de sa sépulture).

Même si l’exégèse donne lieu à des débats, nous pensons, à titre personnel et à la suite d’une longue tradition d’exégèse, que ces trois récits désignent une même personne. Sur quelle base ? Nous nous fondons sur celle de leurs ressemblances spirituelle et psychologique (même zèle, même amour ardent, même expérience du pardon, même liberté dans l’expression de la foi et de l’amour à chaque fois : au pied de la Croix, à l’ensevelissement, à la résurrection, à l’écoute de Jésus ou en essuyant ses pieds avec ses cheveux). Des articles de fond spécialisés pourront apporter des éclairages plus précis (voir bibliographie), notamment sur l’apport décisif de l’Évangile de Jean à ce sujet.

La vénérable tradition

Concernant Marie-Madeleine et la Sainte-Baume, l’historien doit faire acte d’humilité, surtout l’historien amoureux de la Sainte-Baume ! Nous n’avons pas de documents écrits sur le culte de sainte Marie-Madeleine avant le haut Moyen-âge mais il y a par contre une tradition bien jalonnée que nous appelons la « vénérable tradition » et que l’on doit en grande partie d’ailleurs à saint Grégoire le Grand dont nous parlions plus haut. 

Selon donc la vénérable tradition, sainte Marie-Madeleine débarque avec sa sœur Marthe et leur frère Lazare ainsi que d’autres disciples de Jésus sur les côtes provençales. Nous sommes aux alentours du milieu du premier siècle (faute d’informations précises, nous retenons arbitrairement l’an 50, qui n’est pas invraisemblable, pour donner une date à ce récit). Ils ont certainement été chassés de Palestine lors des premières persécutions contre les chrétiens à Jérusalem, violences dont les Actes des Apôtres et les épîtres pauliniennes se font largement l’écho. 

Selon toujours la vénérable tradition, après avoir évangélisé Marseille, Sainte Marie-Madeleine se retire dans le massif de la Sainte-Baume en longeant l’Huveaune, petite rivière qui se jette dans la cité phocéenne. Elle passe alors trente années de prière et de pénitence dans la grotte bien connue, jusqu’à sa mort. On n’en sait pas plus.

Éléments historiques

Esc1-2La présence de religieux dans le massif remonte au début du Ve siècle avec les Cassianites (disciples de saint Jean Cassien, célèbre pour sa règle monastique « les institutions cénobitiques ») venus de l’abbaye Saint-Victor à Marseille. Ils s’installent dans le massif vers 415. On ne garde pas trace aujourd’hui de leur passage. Il semble que des vestiges de cette époque aient été perdus à la Révolution (cf. Chanoine Joseph Escudier, La Sainte-Baume, p. 70, Imprimerie du Sud-Est, Toulon, 1942) mais il est difficile d’en savoir plus. Après les Cassianites, les Bénédictins s’installent, peut-être vers le VIIIe siècle avant de céder la place aux Dominicains en 1295 date officielle de leur arrivée. 

En effet, en ce XIIIe siècle finissant, précisément en 1279, le roi de Salerne, Charles II d’Anjou, était l’initiateur de « l’invention » (au sens originel de « redécouverte ») des reliques de la Madeleine. Après enquête, le Pape Boniface VIII reconnu ces reliques en 1295. Il institua notamment une fête pour commémorer leur translation et octroya des indulgences pour tous ceux « qui viendront en ces jours et en la fête du 22 juillet « visiter l'église de Saint-Maximin », où, dit-il « repose le corps de sainte Marie-Madeleine». Dans une crypte, actuellement sous la basilique de saint Maximin, des tombeaux antiques avaient en effet été mis à jour. Quand ils furent ouverts, « il se répandit une odeur de parfum comme si on eut ouvert un magasin d’essences les plus aromatiques » disent les chroniques de l’époque, et c’est en eux qu’on découvrit des ossements explicitement attribués à la sainte. À partir de ce moment l’histoire de la Sainte-Baume et de saint Maximin nous est bien connue. La Sainte-Baume devient un sanctuaire réputé et fort fréquenté jusqu’au XVIIIe siècle, date à laquelle s’amorce un certain déclin. Nombre de rois, de papes et de saints se pressent auprès de la Madeleine, à tel point qu’au couvent des Frères, niché dans la roche tout contre la grotte, est installée une chambre royale. En vis-à-vis du couvent se trouve une grande hôtellerie dont on peut voir les traces de la construction encore dans la roche aujourd’hui. Tout sera rasé à la Révolution. Chaque souverain qui passe honore le sanctuaire de ses libéralités. Nous pouvons admirer encore aujourd’hui la porte qu’offrit François Ier lors de sa venue. Elle encadrait l’entrée de la grotte et est placée actuellement à l’hôtellerie. 

De grands saints et personnalités se succèdent également. Sainte Catherine de Sienne, saint Vincent Ferrier, saint Jean-Baptiste de la Salle et plus récemment le bienheureux Charles de Foucault. Pétrarque, le grand poète italien vient en pèlerinage (son frère était moine à la chartreuse de Montrieux non loin de là) et laisse, en l’honneur de la sainte, un poème que l’on peut lire encore aujourd’hui (en entrant dans la grotte au fond à droite, près de la porte qui communique avec le couvent).
Ces passages sont bien vivants dans la mémoire du sanctuaire ! Ils témoignent de sa vitalité et des grâces que l’on y reçoit. On peut dire sans rougir que la Sainte-Baume a tenu une place relativement importante dans l’histoire politico-religieuse de la France.

Après la Révolution française, les différents évêques et certains prêtres des diocèses alentours ont à cœur de faire revivre le sanctuaire. On reconstruit un abri du pèlerin et le couvent tels que nous les connaissons aujourd’hui. Les Dominicains sont de nouveaux appelés par l’évêque de Fréjus-Toulon, Mgr Jordany au milieu du XIXe siècle et le père Lacordaire y installe des Frères en 1859. On reconstruit une hôtellerie, cette fois au pied de la forêt. Le 22 juillet retrouve son pèlerinage de la Sainte Marie-Madeleine avec procession des reliques jusqu’à la grotte et grand-messe. Les chroniques parlent d’environ 45.000 personnes lors de la fête de sainte Marie-Madeleine après la réinstallation des Frères. Chiffre impossible à vérifier mais qui dit bien la ferveur et l’importance de ce pèlerinage.

On peut se demander ce qui à tant attiré les pèlerins illustres ou modestes à la Sainte-Baume et ce qui les attire encore ?

Marie-Madeleine bien-sûr ! Mais Marie-Madeleine liée à la Sainte-Baume. Qu’est ce que cela signifie ? Le message évangélique transcende les lieux et les histoires mais il est des lieux qui le rendent plus vivant, plus palpable. Il est des lieux (comme de certaines personnes d’ailleurs !) qui contribuent à habiller de neuf des vérités anciennes. La Sainte-Baume dispose le corps et le cœur à être saisis par la miséricorde et le pardon dont Marie-Madeleine témoigne. Tout d’un coup l’appel intérieur un peu confus du Beau, du Vrai, du Pardon, est rejoint par l’expérience des sens et nous rappelle de manière parfois un peu brutale (les larmes !) que nous sommes faits pour cela. La beauté de la création qui apaise, la rudesse de la montée qui invite au travail sur soi, la présence de la vie consacrée qui se dresse comme un signe. Marie-Madeleine nous invite dans ce sanctuaire à faire l’expérience qu’elle fit au pied de la croix et qu’elle fit aussi à la résurrection et après : la rencontre décisive avec le Dieu fait homme.

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