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L'Eglise : Foi

La radicalité de l’Evangile

Le livre du cardinal Robert Sarah, Dieu ou rien. Entretien sur la foi (Fayard), a été traduit en allemand avec une préface de Mgr Georg Gänswein, préfet de la Maison pontifical et secrétaire personnel de Benoît XVI. La Nef a traduit cette préface. Extrait :

N"Ce livre est un livre radical. Bien sûr, pas dans le sens où nous utilisons souvent ce mot aujourd’hui, en référence aux contestations ou aux opinions politiques extrémistes. Non, c’est la radicalité de l’Évangile qui inspire ce livre, la radicalité qui a animé et anime encore tant de témoins de la foi, la radicalité d’une décision inéluctable que chacun doit prendre, tôt ou tard, lorsqu’il entend l’appel du Christ, le prend au sérieux, ne veut plus s’en détourner et doit finalement y répondre. C’est là que chaque personne peut comprendre que toute son existence d’homme le mène à cette question : Dieu ou rien !

Le cardinal Robert Sarah ne craint pas de parler de la radicalité de l’Évangile pour la confronter sans concession à l’examen du temps. Il démontre de manière convaincante que les nouvelles formes d’athéisme et d’agnosticisme ne sont pas simplement des impasses intellectuelles concernant les individus. Pour lui, les profondes transformations morales que connaissent nos sociétés sont davantage une menace existentielle et ce, non seulement pour le christianisme, mais surtout pour la civilisation humaine.

D’abord, c’est Dieu qui disparaît, puis c’est au tour de l’homme de se faire dieu : « Aujourd’hui, dans des pays riches et puissants, l’éclipse de Dieu conduit l’homme vers un matérialisme pratique, une consommation désordonnée ou abusive, et la création de fausses normes morales. Le bien matériel et la satisfaction immédiate deviennent l’unique raison de vivre. Au bout de ce processus, il ne s’agit même plus de combattre Dieu ; le Christ et le Père sont ignorés. La cause est entendue : Dieu n’intéresse plus personne. Il est mort et son départ nous laisse indifférents. […] La nouvelle règle consiste à oublier le Ciel pour que l’homme soit pleinement libre et autonome. »

Dans cette situation précaire, pour le cardinal Robert Sarah, il va sans dire que la mission d’annoncer l’Évangile avec crédibilité est une urgence. Le voilà qui veut réveiller le monde fatigué des croyants en expliquant sans détours le véritable état de l’Église dans ce contexte dramatique : « Pour engager un changement radical de la vie concrète, l’enseignement de Jésus et de l’Église doit atteindre le cœur de l’homme. »

Si l'Église ne parvient pas à son but, elle ne doit pas pour autant s’adapter à l’ici et maintenant, mais mener une réflexion critique sur les défauts de la prédication : « Il ne s’agit pas d’amollir les exigences de l’Évangile ou de changer la doctrine de Jésus et des apôtres pour s’adapter aux modes évanescentes, mais de nous remettre radicalement en cause sur la manière dont nous-mêmes vivons l’Évangile de Jésus et présentons le dogme. » […]

Je dois avouer qu’à la lecture de ce long entretien de Nicolas Diat avec le cardinal Robert Sarah, j’ai plusieurs fois pensé à cette lettre dans laquelle le pape africain Gélase Ier, en 494, à Rome, s’est opposé à la soif de pouvoir de l’empereur byzantin Anastase Ier. Dix-huit ans plus tôt, des tribus germaniques avaient pris d’assaut la ville. La vieille capitale de l’Empire d’Occident était tombée. Seule l’Église catholique avait survécu, dont le chef dénia avec bravoure au plus puissant seigneur de la terre le droit de régner sur les âmes de ses sujets. On ne peut pas comprendre l’histoire admirable de l’Europe, ni l’histoire de l’Église catholique comme moteur de la civilisation, sans prendre en compte l’opposition résolue dont a fait preuve Gélase Ier.

Depuis, la tentation totalitaire fait partie intégrante de notre histoire. Chaque génération la connaît, même si elle adopte d'autres formes et d’autres discours selon les époques. Aujourd’hui, au fond, c’est la même tentation totalisante à laquelle le cardinal Sarah s’oppose seul, sans fard et sans crainte, à l’instar du pape Gélase Ier plus de 1500 ans avant lui.

Ce livre est un livre radical, au sens étymologique. Le mot latin radix a donné « racine ». C’est là que nous conduit le livre du cardinal Robert Sarah, aux racines de notre foi, aux racines de l’Évangile. Cheminer avec lui par la lecture, par la pensée, par la prière est un grand encouragement pour qui accepte de le faire avec la raison en éveil et le cœur ouvert."

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