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France : Politique en France

La prohibition de la prostitution est-elle une solution politique ?

De Rémi Fontaine dans Présent à propos du texte de loi pénalisant les clients de prostituées :

"De nombreux députés UMP ont voté contre, du fait de la possibilité offerte aux étrangères engagées dans un « parcours de sortie » d’obtenir un titre de séjour de six mois, y voyant un « appel d’air » pour l’immigration clandestine. Durant toute la discussion parlementaire, les écologistes ont été les opposants les plus virulents au texte. Mais ne sont-ils pas aussi, paradoxalement, pour la libéralisation des stupéfiants, contre la pénalisation des usagers ? Entre les abolitionnistes et les anti-prohibitionnistes, existe-t-il un juste milieu ?

De saint Louis à Christine Boutin (dont on connaît les variations sur le sujet) la question n’est pas simple. Le mieux étant l’ennemi du bien, il faut se garder ici d’un mauvais moralisme politique plein de ces bonnes intentions dont l’enfer de gauche est généralement pavé. Tout le monde est, bien sûr, d’accord pour réprouver cette forme d’asservissement sexuel, de traite des êtres humains, par laquelle on paie pour disposer du corps de l’autre, le client portant une certaine responsabilité dans cette « violence faite aux femmes ». En réglementant les maisons closes qu’il avait commencé par interdire avec des résultats désastreux, saint Louis agissait selon la vertu de prudence politique, compte tenu des implications du péché originel sur telle matière sociale. Il limitait en somme les dégâts et l’anarchie de la prostitution incontrôlée.

Quand on ne peut moralement empêcher tout le mal, on choisit délibérément de laisser durer politiquement le moindre mal (la débauche dissimulée mais circonscrite) pour concentrer ses efforts sur le mal qui paraît le plus grave (l’extension anarchique de la débauche publique sans contrôle possible). La tolérance ? Il y a des « maisons » pour cela, selon la boutade attribuée à Claudel. Sous prétexte qu’elle serait « le plus vieux métier du monde », la prostitution n’est certes pas une fatalité mais un fléau que, faute de pouvoir éradiquer complètement, on peut et on doit vouloir circonscrire en politique. Mais dans le contexte de démoralisation généralisée qui touche aujourd’hui notre société, avec une pornographie triomphante, de multiples incitations publiques à la débauche et des filières du vice autrement plus nocives, il n’est pas sûr qu’on ait choisi le meilleur moyen ni ciblé la délinquance la plus grave. En matière de causes de décadence (plutôt que d’un de ses effets, comme l’est le racolage), il existe d’autres formes de prostitution, notamment sur les ondes, contre lesquelles il est sans doute plus urgent d’agir.

Alors que la brigade de répression du proxénétisme se démène pour lutter contre les réseaux étrangers de prostitution qui envahissent nos villes, les syndicats de police ajoutent, pour leur part, qu’ils n’auront ni le temps ni les moyens de courir après les clients. La prohibition pourra-t-elle être appliquée ? Est-elle la solution politique ?"

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