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Liberté d'expression / Médias : Désinformation

La presse non subventionnée, c’est possible

H16 règle son compte à la presse sclérosée :

"cette presse française, aux abois, d’une médiocrité si bruyante et si visible qu’elle n’attire plus guère que la moquerie, n’a jamais réussi à comprendre que son business model n’était pas et n’a jamais été basé sur la remise en forme de dépêches AFP dans un cadre numérique sympathique à regarder. Ce qui pouvait encore fonctionner il y a vingt ans alors que la plupart des gens n’avaient pas d’autres sources d’information ne peut plus continuer alors que tout le monde peut se faire une idée, quasi-instantanément de ce qui se passe à l’autre bout du monde sans passer par tous les intermédiaires qui furent jadis indispensables. Et en refusant de s’adapter, cette presse s’est, littéralement, suicidée.

Dans un pays sclérosé comme la France, la mort de tout un secteur économique prend du temps et nécessite, pour une agonie vraiment lente mais vraiment terminale, l’intervention d’un maximum de personnages de l’Etat. Et cette intervention passe par le lobbyisme et le corporatisme, avatars institutionnalisés d’un capitalisme de connivence parfaitement assumé par des journaliste de gauche mais pas suffisamment fous pour croire à leurs opinions politiques : le marxisme, le socialisme, l’anticapitalisme plus ou moins revendiqué, c’est très bien pour le contenu des papiers, mais dès qu’il s’agit de bouffer, on oublie. Le moindre petit tintement de la grosse louche à subvention sur les grandes marmites cuivrées remplies de fond public attirent immanquablement tous les ténors de la presse, jamais en retard à la gamelle.

Et lorsque cette corporation lutte pour un pouvoir d’achat, sachez que c’est le sien, et certainement pas le vôtre : aider la veuve, l’orphelin, le précaire et le smicard, c’est très bien sur le papier. En pratique, s’il faut proposer d’augmenter les tarifs des FAI en faisant payer leurs clients plus cher, qu’à cela ne tienne : « proposons rapidement une bonne taxe qui claque et récupérons ainsi l’argent des autres dans nos popoches pour continuer à produire la même soupe insipide qui a fait notre renommée ! » […] Comme le dit l’un des véhéments instigateurs de cette nouvelle taxe :

« Nous représentons un secteur qui contribue fortement à l’émergence de l’économie numérique, et nous sommes peut-être celui qui en bénéficie le moins. Il existe des mécanismes de redistribution pour le cinéma et la musique, mais rien pour la presse. Or, nous sommes un secteur qui relève de l’intérêt général de la démocratie ! »

Et pan dans les dents ! Le petit Pascal Nègre, lui, ne pouvait même pas faire valoir la carte bonus « Démocratie » et « Intérêt Général » dans son argumentaire (ce qui l’a peut-être conduit à s’habiller comme un proxénète lillois, mais c’est un autre sujet). Sans rire donc, nos frémissants entaxeurs estiment que leur métier doit bénéficier des mêmes mécanismes iniques que le Cinéma ou la Musique ! « Puisqu’eux y ont droit, nous aussi », en somme.

Sauf que… Sauf que dans plein de pays, la presse ne bénéficie pas de subventions (en tout cas, pas à hauteur des montants scandaleux que l’Etat français distribue) et produit pourtant des articles papiers et en ligne de bien meilleure qualité. Ou, dans d’autres cas, reste rentable sans réclamer de taxes, et attire malgré tout des millions de lecteurs à elle (chose qui ne s’est plus vue en France depuis au moins vingt ans). Ce qui veut donc dire que la presse non ou peu subventionnée, c’est possible, qu’avoir un lectorat papier et online, c’est possible, que ne pas piquer dans la poches des autres, c’est possible même si c’est contraire aux habitudes des socialistes en place.

[…] Vous estimez que vous apportez un vrai contenu sur le web, et que ce simple fait vous octroie le droit d’aller piocher de l’argent dans nos poches ? Lorsque vous constaterez qu’on se passe toujours plus de vos resucées de l’AFP, de vos analyses crypto-marxistes, de vos chroniques collectivistes pathétiques, de vos reportages bidonnés et de vos scoops truqués, que ferez-vous ? […] Quand tout un peuple s’enfonce dans la dette et le collectivisme, qu’aucun des candidats à une présidentielle ne sait faire le moindre budget à l’équilibre et ne propose qu’un champ de taxes ruineuses et d’impôts florissants, vous n’avez ainsi à cœur que de dénoncer bruyamment les banalités d’un Vanneste désigné cible du jour. Où étiez-vous, pénibles imposteurs, lorsqu’il s’agissait de raconter les dérives sexuelles condamnables de votre poulain présidentiel et dont le Tout Paris était au courant ? Qui, chez vous, diligente les enquêtes sur Karachi, sur les empilements effarants de détournements de fonds et d’affaires mafieuses dans le Nord et les Bouches-du-Rhône ?

Ah, ça, pour nous rapporter que Mamie Jolie « emmerde » Corinne Lepage, vous êtes sur le pont ! Pour réclamer de la taxe bien fraîche pour faire perdurer la Rédac à Papa sans y changer quoi que ce soit, là, vous criez présent ! Mais pour rapporter l’ignoble tentative d’étouffement par les parlementaires du rapport Perruchot, on n’a guère entendue de bronca de votre côté. Il aura fallu la force d’une mobilisation et les questions répétées de certains députés pour faire sortir le rapport au grand jour. Et pour nous parler du Mécanisme Européen de Stabilité, lamentablement voté dans l’indifférence de vos salles de rédactions, qui fut là ? Qui expliqua ce qu’il allait en coûter au contribuable et au citoyen européen ? Encore une fois, bernique ! […]"

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8 commentaires

  1. La presse quotidienne est malade, Paris-Normandie est en faillite.
    La presse quotidienne libre de tout financement extérieur (subventions, déficit comblé par les propriétaires, rachat par des banques, etc…..) existe t elle vraiment ?
    Même PRESENT reçoit une subvention annuelle, depuis l’élection de N. SARKOZY.
    La presse papier quotidienne ne peut fonctionner que selon le modèle étranger : la distribution dans les boîtes aux lettres avant 6-7 h. du matin. Ouest France le fait et tient le choc, hélas …….

  2. Je rappelle qu’il y a encore des journaux qui font du bénéfice et qui ont un lectorat en hausse (exemple Valeurs Actuelles, Diplomatie)

  3. @ Johnny
    Ce ne sont pas des quotidiens. La plupart rencontrent de grosses difficultés. Leur diffusion diminue et la publicité qui les fait vivre également.

  4. La presse quotidienne souffre de charges très lourdes (la France est une économie championne du socialisme pour ce qui est des prélèvements obligatoires), des prix de distribution induits par le monopole historique des nouvelles messageries de presse parisienne (NMPP) acquis à la Libération, d’une distribution postale aléatoire…
    Oui, “Présent” a une subvention, rétablie en 2009 en même temps qu’elle était octroyée à “Libération” pour la première fois, en tant que presse qui n’a pas accès à la publicité (même les entrepreneurs les plus proches ne veulent pas faire de la pub chez nous, en raison du poids du politiquement correct).
    J’aimerais mille fois mieux le fabriquer, sans subvention, dans un pays où les charges et la paperasserie administrative n’auraient pas ce poids et où les gamins du collège ou du lycée auraient le droit de se faire de l’argent de poche en distribuant les quotidiens du matin.
    Je sais que nos articles ne sont pas nuls parce qu’ils sont volontiers copiés-collés sur internet pour une distribution “gratuite” qui joue en notre faveur par l’effet publicitaire, mais aussi en notre défaveur parce que les internautes ne conçoivent quasiment plus de payer l’info.
    La presse en souffre dans son ensemble, alors qu’une bonne partie des “contenus” sur Internet viennent précisément de la presse écrite.
    JS

  5. @ Jeanne Smits
    Il est exact que chaque journal français, quel qu’il soit, est lesté de surcoûts particulièrement, par les NMPP et le statut privilégié socialement des personnels de presse, qui étouffent la presse et particulièrement en ces temps de crise.
    En effet, la distribution à domicile aux abonnés tôt le matin serait la solution : certains quotidiens régionaux ont ainsi enrayé leur chute (Ouest France par exemple, y compris en zone rurale, par des personnes relais), mais en l’organisant eux-mêmes…… les entreprises de distribution en étant incapables, puisqu’elles ont supprimé des milliers de points de vente pour ”rationaliser” LEURS coûts, tuant ainsi la presse écrite quotidienne.
    Il devrait être possible que tous les journaux soient distribués aux abonnés chaque matin : il est évident que lire son journal quotidien le soir, ou le lendemain avec les délais postaux fantaisistes, incite peu à s’abonner.
    Quand on regarde le prix de DIE WELT en Allemagne et celui du MONDE on se dit que la presse française n’est pas concurrentielle, alors que les NTIC court-circuitent déjà l’info brute.
    En ce sens PRESENT demeure un miracle permanent. Mais ne faudrait-il pas que la presse écrite ouvrent davantage de palce aux débats, afin qu’elle ”colle” ainsi mieux à ce qui fait l’intérêt des blogs ?

  6. Pour H16 que je ne connaissais pas jusqu’à ce jour, c’est vraiment bien envoyé.
    A Jeanne Smits : Rien ne remplace le petit journal papier qui ne pèse pas, qu’on peut emmener partout, qui n’a pas besoin d’un écran. Sur les tablettes on lit les titres certes, mais c’est impossible de lire un article de fond comme il y en a sur Présent.

  7. Merci pour vos réponses. De fait internet a apporté beaucoup, tant sur le plan des débats que sur celui – des sources d’information, et je ne dis pas que la presse écrite – y compris “Présent” – ne peut pas s’améliorer.
    Ce qui nous manque, ce sont les moyens – bien des journalistes sont à bout de nerfs et de fatigue – et ce qui nous plombe, c’est souvent l’exploitation de notre travail sur les blogs, rendu gratuitement accessible sans contrepartie. (Nous, nous payons une jolie somme à l’AFP tous les mois pour avoir le droit de citer leurs dépêches, par exemple.)
    Les sources des dernières infos publiées par “Le Salon beige” aujourd’hui ? Dans l’ordre, depuis le dernier mis en ligne : “Die Welt”, via Yves Daoudal. “APIC”, via Dici. “Le Monde”. “Le Point”. “L’express”. “NouvelObs”. “Nouvelles de France”, citant un communiqué. “Zenit”, cité par Yves Daoudal. “Ouest-France” sur les masques vaudou (il y avait un article beaucoup plus complet dans “Présent” mis en ligne à midi, mais il est vrai qu’il n’était pas en libre accès).
    Je ne veux pas ici dénoncer de mauvaises pratiques, mais simplement souligner que sans la presse écrite et sans le travail de journalistes écrivant des contenus originaux il n’y aurait pas eu une seule info sur le Salon beige depuis la mise en ligne du “règlement de compte” de HI6.
    Amitiés
    JS

  8. Ce débat m’amène à poser une question totalement hors norme et j’imagine qu’elle va faire hurler….allez ! je me lance !!!!
    “”””A quoi çà sert un quotidien, en fait ?””””
    Sous son aspect apparemment théorique, elle me vient à l’esprit à la suite de ce que dit H16, car depuis l’assassinat de Ceausescu et du monstre qu’il avait épousé, nous avons supprimé chez nous la télévision.
    Et nous n’avons jamais été abonnés à un quotidien….
    Ceci n’a donc rien de théorique pour nous !
    Et force est de constater que depuis toutes ces années, il nous est souvent apparu, et nous en sommes à chaque fois consternés, que la capacité d’analyse de beaucoup de nos amis nous semblait entachée par une empreinte subtile mais indéniable du “médiatiquement correct”.
    Les deux derniers exemples,par exemple, ce serait les hurlements avec les loups lors de la secousse DSK (qui était l’agressée dont on n’a rien su pendant un certain temps, osions-nous demander ?)
    et les agences de notations, ces foutriquets qui seraient, paraît-il, sérieux et utiles, qui, en Septembre, annonçaient une possible dégradation de la note française et dont nous osions dire que le seul vrai danger, c’était la manipulation politique induite par les conclusions de ces minables qui s’étaient plantés magistralement pour l’entrée de la Grèce en Europe.
    Un tri-hebdo, çà suffirait, non ?

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