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France : Politique en France

La décomposition politique est quasi-terminée, mais la recomposition pas encore

Jérôme Fourquet, de l'Ifop, est interrogé par Eugénie Bastié dans Le Figaro sur la recomposition politique tant annoncée. Extraits :

"Pour qu'il y ait recomposition, il faut qu'il y ait eu décomposition. Je dirais que la décomposition est quasi-terminée, mais que la recomposition, elle, n'est pas encore arrivée complètement à son terme. L'ancien monde n'a pas totalement été renversé.

Pour faire une analyse globale de la situation politique de notre pays, il faut repartir du premier tour de l'élection présidentielle, qui est le plus pertinent et le plus révélateur de l'état du rapport de forces réel, car le second tour n'a été qu'un plébiscite contre Marine Le Pen, et les législatives ont été marquées par une très forte abstention. La réalité du paysage électoral français, ce sont quatre grands blocs qui se tiennent à quelques points d'écart. D'un côté, les deux tenants de l'ancien monde, Fillon et Mélenchon, incarnations chimiquement pures du clivage droite/gauche traditionnel. De l'autre, les deux représentants du clivage entre «patriotes et mondialistes» ou «nationalistes et progressistes» que sont Emmanuel Macron et Marine Le Pen. Ce dernier clivage n'est pas nouveau: il s'exprime depuis 25 ans dans des scrutins de mode binaire comme les référendums sur l'Union européenne, où pouvaient s'amalgamer le «non» de droite et le «non» de gauche. Mais c'est la première fois dans une présidentielle qu'il trouve une incarnation dans un duo s'opposant terme à terme car jusqu'à présent seul le camp du «non» était représenté avec Marine Le Pen. Or dans cette campagne, la France du «oui» a trouvé en Emmanuel Macron son champion.

Le clivage droite-gauche a-t-il complètement disparu?

Non, mais il s'est fait (temporairement? l'avenir nous le dira) supplanter par ce nouveau clivage, qui s'est imposé de justesse (21,5% pour Marine Le Pen qui se qualifie ainsi de justesse en finale devant François Fillon à 20%) mais qui a des ressorts profonds. Cette fracture entre deux France, celle des «gagnants» et celle des «perdants» de la mondialisation s'observe dans de nombreux pays occidentaux. On la retrouve aux États-Unis dans le duel Trump/Clinton, en Autriche lors de l'élection présidentielle ou bien encore à l'occasion du Brexit en Grande-Bretagne. C'est donc un phénomène majeur et puissant. Tout se passe comme si cet affrontement était la traduction électorale d'un nouveau clivage sociologique, culturel et ethnique dans les sociétés occidentales confrontées à trente années de globalisation, globalisation qui s'est matérialisée par une désindustrialisation accélérée, une aggravation de la fracture territoriale entre métropoles et «territoires périphériques» pour reprendre l'expression de Christophe Guilluy et le développement d'une immigration importante.

Après la piètre performance de Marine Le Pen dans l'entre-deux tours, peut-on considérer que le FN sort affaibli de cette présidentielle?

Même si Marine Le Pen a été sévèrement battue, le Front national a atteint un niveau inégalé. Il bénéficie d'un ancrage profond qui se sédimente dans certains territoires, notamment ceux où le chômage est très fort et où une majorité de la population ne paye pas d'impôt sur le revenu. Les causes de fond qui ont nourri la dynamique frontiste dans ces territoires et dans les milieux populaires ne vont pas disparaître d'un coup de baguette magique, le terreau reste très fécond. Pour autant, la présidentielle a abîmé la crédibilité personnelle de Marine le Pen.

À ce propos, il est intéressant de faire un petit retour en arrière. On ne comprend pas le succès de Sarkozy en 2007 si on ne revient pas à 2002. La «divine surprise» de la qualification de Jean-Marie Le Pen au nez et à la barbe de Lionel Jospin s'est transformée au second tour en cauchemar avec un candidat FN littéralement écrasé et ne progressant quasiment pas par rapport au 1er tour. Les électeurs frontistes comprennent alors que la marche est vraiment trop haute et que beaucoup d'eau passera sous les ponts avant que Jean-Marie Le Pen accède un jour au pouvoir. C'est alors que Nicolas Sarkozy leur tend la main en leur offrant la possibilité de miser sur un candidat pouvant devenir Président et mettre ainsi en œuvre certaines de leurs idées à condition de mettre un peu d'eau dans leur vin. C'est une possibilité toujours ouverte pour la droite. Même si aujourd'hui la force électorale du FN est plus importante qu'à l'époque, la déception vis-à-vis de la performance de Marine Le Pen est grande dans son électorat.

La droite est en ordre dispersé à la rentrée. Peut-elle selon vous se relever du «choc» Macron, Y a-t-il selon vous un espace politique pour un bloc conservateur à droite?

Il va être très difficile pour LR d'articuler un discours libéral qui ne soit pas uniquement dans la surenchère. En effet, sur la plupart des réformes économiques proposées par Macron (réforme du marché du travail, réduction des dépenses publiques), il n'y a pas l'épaisseur d'une feuille de papier à cigarette entre l'électorat LR et l'électorat En Marche. Sur le plan économique, les leaders de la droite ont donc le choix entre conspuer le manque d'audace du président et se constituer en bloc de «vrais libéraux» (mais cette ligne est sociologiquement très minoritaire dans le pays), ou bien tenter d'adopter une ligne conservatrice et sociale, s'adressant à la classe moyenne et à la «France qui se lève tôt» qui s'est totalement détournée de François Fillon lors de la présidentielle. Puisqu'il leur est très difficile en ce début de quinquennat d'avoir une marge de manœuvre pour se distinguer de Macron sur le plan économique (hormis en adoptant sur une posture politicienne et en jouant sur le mécontentement des retraités sur la CSG), ils ne pourront jouer que sur l'axe régalien-identitaire ou l'axe sociétal (famille, éducation). […]"

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4 commentaires

  1. La décomposition politique, en réalité nous ne pouvons que nous en réjouir. Ces guignols sont à vomir et de toute façon, sont illégitimes. Donc basta !!
    Par contre ce qui est réellement remarquable et qui doit nous interpeler, c’est l’état de l’Eglise temporelle de France = désastreuse !!
    Environ 80 Ordinations cette année (Moins UNE pour le moins invalide), c’est pire que la débâcle.
    C’est le néant, tout simplement. Quand au nombre de séminaristes, le séminaire Français de Rome ne compterait plus que 25 postulants, c’est à dire presque zéro !!!
    Plus de 95% des Diocèses de France n’ont pas vus plus de 2 ordinations sur un laps de temps de 5 années.
    Le Pape voulait une Eglise pauvre, parlait-il alors de cette pauvreté là ?
    L’ultra-libéralisme de la CEF bien trop bercée par ces appointantes maçonniques, aura tentée et presque réussi de tout détruire, jusqu’à la Foi chez certains fidèles, qui aujourd’hui peurs et désorientés préfèrent se tourner vers toutes les hérésies anti-chrétiennes, ces pauvres idéologies empreintes d’un pauvre, triste et unique humanisme, coupé de toute transcendance.
    Ah oui !!! J’allais oublier les Ordinations issues de ce que les méchants appellent la Tradition représentent presque 25% du total général. Ce qui pourrait ALORS porter à environ 100 ordinations en 2017.
    Mais il est vrai que ces prêtres là sont des ” demis-portions ” et qu’ils ne font pas partie de cette Eglise Française temporelle qui au demeurant comme la politique et la gouvernance de ce pays s’effondre inexorablement, sous les assauts répétés et incontrôlés du GOF.
    Analogie amusante non ?

  2. Je ne suis pas d’accord avec G Fourquet.
    Les Républicains ou l’UMP, réunion de l’UDF et du RPR, ont été créés par Juppé même pour “ratisser large” lors d’élections mais en réalité on y a réuni “la carpe et le lapin”.
    Il vaut mieux définir les valeurs et les convictions et ensuite élire le président de ce parti. Les juppéistes n’ont rien à voir avec les fillonistes ou encore les mondialistes avec les souverainistes et conservateurs. Les juppéistes peuvent rejoindre “en marche”, c’est déjà fait pour certains dont E Philippe, on ne les retient pas et comme cela ce sera plus clair.
    Il suffit de lire le dernier livre de C Guilluy, “le crépuscule de la France d’en haut” pour voir le clivage. Macron est le candidat de la France d’en haut qui représente tout juste 40% de la population française.
    Pourquoi parler de clivage gauche droite? Le clivage est entre :
    – mondialistes multiculturalistes à l’intérieur desquels il y a libéraux (Macron, Juppé, Raffarin, etc. ) et étatistes (Mélenchon)
    – et conservateurs à l’intérieur desquels il y a libéraux (Fillon, Wauquiez, Ciotti, etc.) et étatistes (Marine Le Pen ou FN).
    Il y a bien 4 courants politiques et non plus 2. Macron surfe sur l’ambigüité et les politologues journalistes aussi.
    Wauquiez est un homme de convictions ayant fait l’unanimité chez les habitants du Puy en Velay dont il a été maire et ce même chez les gens de gauche.
    V Pecresse est bien décevante, se montrant opportuniste et cela les Français n’en veulent plus!!!
    Oui, la droite peut être conservatrice et libérale. Il suffit de lire le livre “qu’est ce que le conservatisme” de jean Philippe Vincent pour en être convaincu. Extraits : “Il manque deux choses au libéralisme, une âme et une stabilité historique…. Le conservatisme est l’âme et la conscience du libéralisme…. Même l’utilitarisme n’est pas capable de produire du lien social (paix, justice, amitié). qui fait qu’il est encore possible de vivre ensemble. L’éthique incorporée au conservatisme a permis ce miracle…. Le conservatisme libéral tel qu’il a été défendu par Guizot et Renan est une formule qui a été déjà expérimentée idéologiquement et historiquement…..D J. Mahoney a une très belle formule pour définir le conservatisme libéral : “l’art d’aimer la démocratie avec modération””.
    Juppé utilise la méthode minable d’insultes sans justifications objectives pour critiquer les conservateurs, il est lamentable. C Guilluy parle de cette méthode dans son dernier livre, méthode utilisée par la France d’en haut à l’égard de la France d’en bas. Pourquoi parler de droitisation et pas de mondialisation, de multiculturalisme et de conservatisme, Juppé est dans le mensonge en ne nommant pas les choses. Les mondialistes et multiculturalistes avancent masqués car ils savent que les peuples n’en veulent surtout pas!!!
    Que Juppé parte, et que les Républicains éclaircissent leur ligne politique. Aux primaires de la droite et du centre, la ligne Fillon a clairement été choisie et ce sans ambigüité.

  3. Juppé, ce pitoyable pitre serait décoré par une institution vaticane en septembre, en grande pompe . . .
    Pour services non rendus ?

  4. Soyons brefs, on reconnait dans le titre un des outils maçonniques, une ” devise ” : ORDO AB CHAO, et sa suite, par une autre ” devise ” aussi charmante :: SOLVE ET COAGULA.
    Tout est dit en peu de mots, pas la peine de phraser dans le vide.

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