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L'Eglise : Foi

Il n’y a pas de communion sans unité dans la vérité

Il n’y a pas de communion sans unité dans la vérité

Suite de la série de Claves sur la communion dans l’Eglise :

Comment entre-t-on dans la koinonia (voir l’article précédent), dans cette amitié divine qu’est l’Église ? Par la Grâce, la Charité et la Vérité : voilà les trois coeurs qui unissent les chrétiens entre eux et avec Dieu[1]

1 – Communion de vie ou de grâce

Il est dommage que les dérives autour du thème de la communion aient rendu certains catholiques frileux dans l’emploi de ce terme : car la communion est sans aucun doute au cœur du dessein de Dieu sur les hommes. Nous en avions trouvé la source et l’origine dans la communion trinitaire des personnes divines (voir l’article précédent); mais voilà qu’à présent, elle se propose à nous : Dieu a pour projet de communiquer sa vie aux hommes « pour nous faire communier à la nature divine (theias koinônoi phuseôs / divinae consortes naturae)[2] » comme le dit saint Pierre.  Cette expression pétrinienne, qui fonde toute la théologie traditionnelle de la grâce comme participation à la nature divine, manifeste au plus haut point que la communion ne jaillit pas d’un effort humain, mais est le fruit d’un don de Dieu : « solus Deus deificet, seul Dieu “déifie”, nous communiquant en partage la nature divine selon une certaine participation[3] », écrira saint Thomas en des termes aussi précis que fidèles à l’Écriture.

La communion de l’Église est une communion dans la grâce, prémisse de la communion de gloire. Par la grâce nous sommes enfants de Dieu, héritiers et cohéritiers du Christ ; par elle les hommes partagent une même « nature » surnaturelle, et communient dans le don de Dieu. Voilà un premier aspect de la communion ecclésiale, le plus « ontologique », le plus riche en contemplation également, qui malheureusement est peu expliqué aux fidèles, au profit parfois de considérations beaucoup plus humaines et horizontales de la communion comme bonne entente mutuelle, ou comme « faire ensemble ».

2 – Communion de cœur ou de charité

L’aspect suivant est tout aussi fondamental : la koinonia de l’Église est la communion dans la charité. Avec une audace sans pareille, saint Thomas d’Aquin est le premier théologien à affirmer que « la charité n’est rien d’autre qu’une amitié[4] », c’est-à-dire un amour réciproque de bienveillance entre l’âme et Dieu, fondé comme toute amitié sur le partage (koinonia chez Aristote) d’un bien commun, ce bien n’étant autre que Dieu lui-même. Et cette amitié de l’âme avec Dieu se prolonge et s’étend à tous les amis de Dieu, et plus encore à tous ceux que Dieu aime.

La charité est une amitié surnaturelle de l’âme avec Dieu : elle est aussi une amitié surnaturelle des chrétiens entre eux. Ainsi, il est impensable de dire que nous sommes en communion avec Dieu si nous ne sommes pas en communion avec nos frères, selon le mot de saint Jean : « Celui qui dit qu’il aime Dieu et qui n’aime pas son frère est un menteur[5] » : la charité fraternelle, avec tout ce qu’elle comporte de relations « horizontales » réelles, sincères, entre nous n’est pas accessoire, elle est indispensable à l’amour de Dieu. Mais inversement, nous l’avons déjà dit, une communion des hommes qui ne passe pas par Dieu, une communion qui ne serait que horizontale n’est pas une communion de charité, et n’est donc pas une communion ecclésiale.

Ainsi, au sens le plus profond, le plus invisible et intérieur, la communion dans l’Église est la communion des amis de Dieu « par la grâce et la charité[6]. » Le Concile Vatican II désigne cette communion par la charité comme étant une incorporation « de cœur » dans l’Église, nécessaire pour le salut (LG II, 13, §2).

Une telle approche entraîne certainement des difficultés théologiques, et demanderait beaucoup de précisions, notamment pour réfléchir au statut de ceux qui, unis « de corps » à l’Église, ne sont pas dans la charité (c’est à dire des baptisés qui sont en état de péché mortel) ; mais ces difficultés ne doivent pas nous faire « revoir à la baisse » la noble idée de la communion comme « société divine », consortes naturae divinae ; la communion que Dieu veut pour nous est une communion d’amour et de vie : et c’est cela que procure, normalement, la communion à l’Église visible[7].

3. Communion de vérité ou de Foi

« Si nous marchons dans la lumière, comme Dieu est lui-même dans la lumière, nous sommes en communion les uns avec les autres[8] », écrit saint Jean. Voilà une dimension essentielle, malheureusement mise à mal dans la crise de la foi que nous traversons. Si la communion ecclésiale est une communion de charité, alors nécessairement elle passe par l’espérance et, surtout par la foi commune[9]. Car le Christ est la Vérité, et ce n’est qu’en restant uni à la Vérité, en conservant intégralement la foi transmise par les apôtres, que nous resterons unis au Christ, et donc à nos frères

Il n’y a pas de charité sans foi, parce qu’il n’y a pas d’amour sans connaissance. Ainsi il n’y a pas de véritable communion sans foi commune : le Christ est la vérité et l’unique chemin du salut. Il importe de rappeler ces vérités fondamentales à l’heure où certains, au nom même de la communion ou de l’amitié inter-religieuse, estompent terriblement la place du témoignage de la foi. On aura beau multiplier à l’infini les gestes extérieurs de communion, les « partages », les activités communes, les temps forts : si on n’a pas la même foi, il n’y a pas de communion ecclésiale. Cela ne veut pas dire qu’il ne faut pas essayer de se parler entre nous, d’être bon et ouvert à tous ! Mais il faut affirmer que jamais on ne pourra prétendre à une communion spirituelle véritable si l’on met de côté le désir de nous retrouver autour de la foi commune dans le Christ, mort et ressuscité, et dans les dogmes de l’Église catholique. Le plus bel acte de charité que je peux faire à autrui, c’est de lui parler du Christ, de l’aider à le découvrir : ne perdons jamais cela comme objectif !

Cette foi commune n’est pas toujours visible, tout comme la charité et la grâce, et personne à part Dieu ne peut connaître les contours précis de son Église et discerner absolument si tel homme est ou non en communion intérieure de foi avec elle[10] : mais cette foi est requise, absolument.

Cette communion dans la vérité qu’est le Christ, c’est l’Écriture elle-même qui nous la présente comme un don de Dieu fait aux Hommes, une révélation, la « dispensation (koinonia, à nouveau !) du mystère caché de tout temps en Dieu qui a créé toutes choses[11] ». Le pape Benoît XVI a beaucoup insisté sur ce point fondamental :

« la cohésion des croyants était fondée sur l’intégrité totale de leur confession doctrinale […] Cette proclamation devait être garantie par la pureté de la doctrine exprimée dans les formules du credo, les symbola, qui articulaient l’essence de la foi chrétienne et constituaient la fondation pour l’unité des baptisés ». Il continuait en dénonçant le danger de ceux qui « minimisent l’importance du contenu doctrinal pour la vie chrétienne[12] ».

À ce niveau tout particulièrement, il apparaît que l’Église n’unit pas seulement les chrétiens d’une époque donnée entre eux, sur toute la planète, mais qu’elle unit les chrétiens de tous les âges autour d’une foi commune transmise fidèlement. Et c’est pourquoi le premier signe extérieur de la communion sera : la profession commune de la foi.

C’est ce que nous verrons la prochaine fois en abordant le premier des « signes » extérieurs requis pour la communion ecclésiale : la confession intégrale de la foi. Il sera suivi de l’étude des deux autres signes extérieurs : la soumission visible à la hiérarchie de l’Église ; et la communion dans les mêmes sacrements.

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