Partager cet article

Liberté d'expression

Ce qu’on inculque aujourd’hui aux jeunes en école de journalisme n’a rien à voir avec la définition simple du journalisme

Ce qu’on inculque aujourd’hui aux jeunes en école de journalisme n’a rien à voir avec la définition simple du journalisme

Christine Kelly, ancienne membre du CSA, animatrice de l’émission phare de CNews Face à l’info, publie Libertés sans expression (Le Cherche-Midi), un témoignage inquiet et lucide sur l’état du débat public en France. Menacée, des des gardes du corps ont été mis à sa disposition. Elle explique dans Valeurs Actuelles :

[…] Cette protection m’a poussée à écrire ce livre et à me demander ce que j’ai fait pour la mériter. Qu’ai-je fait de mal ? Y a-t-il une personne qui peut me dire à quel moment j’ai insulté quelqu’un, défendu une position dangereuse ou une opinion qui pourrait heurter ? Quand bien même, on est dans le cadre de la liberté d’expression. Emmanuel Macron m’a envoyé un SMS m’informant qu’il était à ma disposition. Il n’acceptait pas qu’un journaliste puisse être menacé de mort pour l’exercice de son métier. Je n’ai pas accepté la protection tout de suite. Il a fallu attendre que les menaces augmentent pour que je me décide. Cette histoire est le miroir de l’inversion de valeurs qui frappe notre société. Plus on veut bien faire son métier, plus on est critiqué. Ça me révolte. Ce qu’on inculque aujourd’hui aux jeunes en école de journalisme n’a rien à voir avec la définition simple du journalisme. Avec ces menaces, on se réveille et on se dit qu’on ne peut pas se taire.

Votre livre est courageux car il parle des écoles du journalisme, du CSA et des autres vaches sacrées qu’on n’a pas le droit de critiquer dans le monde journalistique. Quand vous racontez votre collaboration avec Éric Zemmour, vous rappelez que vous n’étiez pas là pour dire s’il avait tort ou raison, mais pour lui demander une précision et le modérer. Contrairement à ce que les gens prévoyaient, cette relation professionnelle a duré deux ans. Cela s’est-il fait naturellement ?

Ce paradoxe est très intéressant. Certains, des mauvaises langues, veulent me faire un procès en illégitimité. Les autres voient la réalité en constatant qu’Éric Zemmour sait qu’il n’est pas en roue libre. Bien qu’il soit là pour s’exprimer, il y a des barrières à ne pas franchir. J’ai essayé de le modérer. Pour cela, j’ai découvert son caractère, vu ses gestes. Tous ces détails m’ont permis de percevoir à quel moment il s’énerve et à quel moment il ne s’énerve pas.

Cette démarche était importante car le but de l’émission n’est pas d’éructer et de dire : “Je ne suis pas d’accord avec lui alors je vais quitter le plateau.” La finalité est plutôt celle-ci : “Qu’est-ce qu’on donne à penser aux téléspectateurs et leur donne-t-on à réfléchir ?” Je me suis placée dans la droite ligne de mon métier précédent, membre du Conseil supérieur de l’audiovisuel, qui a pour mission première de préserver et de réguler au quotidien la liberté d’expression. J’ai souhaité être dans la continuité de mon métier. Là où j’arrête la balle, c’est uniquement à la limite de la loi. […]

Vous écrivez : « Les exemples du recul des libertés d’expression sont légion et leur nombre s’accélère de façon exponentielle, que ce soit à l’Université, dans le monde du spectacle, à la télévision ou à la radio. À qui la faute ? À la peur de la controverse, du dérapage, de l’infantilisation, de la victimisation, la prédominance d’un consensus mou qui craint les débats et les échangesvraiment contradictoires. Un manque de réflexion, de patience, de culture politique et historique de notre société. Serait-ce l’émergence tant louée de nouvelles idées, de nouveaux dogmes ? » Quel regard portez-vous sur notre débat public ?

Aujourd’hui, je constate une inversion de valeurs. Au nom de la liberté d’expression, on vous dit de vous taire. Je l’ai bien vu avec Face à l’info. J’ai été choquée quand certains voulaient faire taire Éric Zemmour. Je voulais leur répondre qu’ils pouvaient zapper, changer de chaîne ou alors regarder, écouter, juger. Le fait de vouloir faire taire l’autre est devenu totalement banal. Quelqu’un vous appelle et vous énerve, vous bloquez. Il n’y a plus de débat, de discussion, d’argument.

Pendant des mois, j’ai cherché en vain des gens qui acceptaient de venir débattre avec Éric Zemmour. Des ministres ont bien joué le jeu. D’autres, craignant de ne pas avoir le niveau, ont refusé. Argumenter, donner son avis, se confronter aux autres sont devenus des barrières. Alors, on reste enfermé dans ses propres a priori. Quand on constate ça, on voit que la démocratie est en danger et commence à mourir à petit feu. J’avais postulé pour être présidente de La Chaîne parlementaire. Mes premiers mots, en janvier 2015, étaient de dire que la démocratie était en danger car j’avais vu que les fausses informations mettaient la démocratie en danger.

Ce livre est un cri du cœur, un cri d’un membre du CSA, un cri d’une journaliste qui dit : “Attention, ce que vous voyez n’est pas la réalité, les valeurs que vous défendez ne sont pas forcément les bonnes valeurs à défendre. ” La facilité est de ne pas écouter, d’éteindre sa télé et faire taire celui avec qui vous n’êtes pas d’accord. La liberté d’expression, c’est accepter d’être choqué, même parfois violemment. Mais on peut se dire à la fin : “Il m’a fait réfléchir.” […]

Partager cet article

5 commentaires

  1. “Au nom de la liberté d’expression, on vous dit de vous taire.”
    Christine Kelly

    Rien à ajouter !

  2. Membre est un nom masculin !

  3. Il y a plusieurs années, un sondage anonyme dans une école de journalistes dont j’ai oublié le nom avait été effectué par sa direction: “De quelle sensibilité politique vous sentez vous le plus proche?”
    100% on répondu : “De gauche”.
    Pour réussir dans la carrière cinématographique ou journalistique, être de gauche, ça aide énormément.

  4. Invitée dans une église évangélique avec Samuel Pruvot, rédacteur en chef à Famille Chrétienne, Christine Kelly témoigne de sa foi :

    https://www.youtube.com/watch?v=6PLoTiq8PQ8&t=816s

    A la fin, Pruvot mentionne la sincère curiosité de Zemmour quant à la divinité du Christ.

Publier une réponse

Nous utilisons des cookies pour vous offrir la meilleure expérience en ligne. En acceptant, vous acceptez l'utilisation de cookies conformément à notre politique de confidentialité des cookies.

Paramètres de confidentialité sauvegardés !
Paramètres de confidentialité

Lorsque vous visitez un site Web, il peut stocker ou récupérer des informations sur votre navigateur, principalement sous la forme de cookies. Contrôlez vos services de cookies personnels ici.


Le Salon Beige a choisi de n'afficher uniquement de la publicité à des sites partenaires !

Refuser tous les services
Accepter tous les services