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Culture de mort : Avortement

Avortement : les femmes sont rarement libres

Sophie Heine, politologue et auteur, publie une tribune dans Le Soir, sur L’avortement: liberté ou vulnérabilité? suite à l'exclusion du professeur Mercier pour ses propos à l'UCL. Extraits:

"[…] La récente controverse autour des propos anti-avortement tenus par un professeur de l’UCL n’est, à cet égard, qu’un symptôme de la réactivation plus large d’une polémique que beaucoup pensaient close. Si le ton et les arguments adoptés dans ces controverses peuvent faire frissonner, remettre cette question en débat n’est pas forcément un mal. […]

Néanmoins, les réponses apportées par les mouvements dits « progressistes » – la sacralisation du « droit à l’IVG » comme victoire féministe supposée garantir aux femmes la « libre disposition de leur corps » – sont loin d’être convaincantes. De fait, nombre de femmes « ordinaires » et peu politisées observent ces débats avec une distance teintée de scepticisme. Si beaucoup s’opposent à la qualification des femmes qui avortent comme « criminelles » ou renégates, elles rechignent malgré tout à rejoindre les rangs des défenseurs du droit à l’avortement et des mouvements féministes en général. Et, en effet, le discours porté par ces courants est tout à la fois simplificateur et éloigné de la réalité concrète des femmes concernées.

Tout d’abord, il est essentiel de rappeler que les femmes sont vulnérables : elles occupent des positions socio-économiques moins valorisées et moins rémunératrices, sont plus nombreuses à élever leurs enfants seules et subissent davantage de violences dans la sphère privée. Cette condition accroît leur vulnérabilité aux autres formes de domination et réduit leur potentiel de révolte et d’engagement. […] En moyenne plus petites, plus légères et dotées d’une moins grande masse musculaire, les femmes sont aussi vulnérables physiquement. Elles sont davantage susceptibles de subir des violences ou de faire évoluer leurs comportements sous l’impact de menaces, d’intimidation ou de contraintes physiques. Le risque de tomber enceinte accroît évidemment cette vulnérabilité car l’état de grossesse constitue une source de fragilité. Et dans l’éventualité où une femme enceinte choisit de mettre fin à une grossesse, les séquelles – en tout cas psychologiques – sont rarement nulles.

A cause de cette vulnérabilité et des discours qui la légitiment, les femmes sortent souvent perdantes des rapports de force imprégnant la sphère professionnelle et publique autant que le domaine privé. […] Dans un tel contexte, que peut bien signifier la liberté individuelle si souvent postulée dans la décision d’avorter – et confirmée par le terme officiel d’« interruption volontaire de grossesse » ? Comment les femmes peuvent-elles être effectivement libres dans de telles circonstances si elles sont structurellement soumises à des dominations ? N’est-il pas absurde de considérer que, face à la question cornélienne de prolonger ou non une grossesse, les contraintes s’imposant habituellement à elles soudain s’évaporent ? […] Qu’il s’agisse des pressions exercées par les hommes concernés, de la réalité sociale recouverte par le statut de mère et des attentes sociales afférentes, les femmes prenant une telle décision sont rarement libres. […]"

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