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Valeurs chrétiennes : Culture

Théorie de la connaissance et joie

Théorie de la connaissance et joie

De Bernard Mitjavile pour les lecteurs du Salon beige :

Selon Descartes, les idées et la raison sont du côté de l’homme, la matière du côté de la nature et des animaux. Un peu après lui, Locke suivi par les empiristes anglais prend un point de vue très différent selon lequel à l’origine, l’esprit humain est vierge de toute idée, une table rase (tabula rasa), la pensée et les idées découlant des sensations transmises par les sens au cerveau, Kant avec sa « révolution copernicienne » épistémologique par rapport aux empiristes, va un peu plus tard combiner les deux points de vue avec d’un côté les à prioris de la connaissance comme l’espace et le temps et de l’autre le monde que l’on découvre avec ces aprioris sans pouvoir atteindre la chose en elle-même (la « Ding in sich ») au-delà de ce que nous connaissons par nos sens, notre raison et les a prioris de la connaissance. De là, on passe à la dialectique d’Hegel puis à Marx développant à son tour l’idée d’une connaissance progressive par la praxis ou la pratique qui fait que nous découvrons progressivement le monde qui nous entoure.

Toutes ces gens, prétendant à chaque fois nous donner la clé de la connaissance en prenant plus ou moins le contre-pied de leurs prédécesseurs, ont développé des théories qui ne sont pas dénuées d’intérêt mais qui ne prennent pas en compte un aspect important de la connaissance : la joie et même l’émerveillement qui accompagnent et motivent la découverte du monde qui nous entoure alors qu’il faudrait commencer par là.

Récemment, passait sur Internet une vidéo d’un bébé et un agneau côte à côte, chacun tenu par une femme, le bébé et l’agneau se mettant à crier alternativement avec des cris semblables, de plus en plus fort, chacun répondant à l’autre, le bébé étant de plus en plus excité par la réponse de l’agneau jusqu’à atteindre une certaine exultation.

Si l’on regarde le bébé qui essaie d’attraper un objet ou même un papillon volant autour de son berceau, l’enfant qui cherche à attraper des sauterelles, parfois leur arrache les jambes très intéressé par la similitude avec les cuisses et les jambes des humains, le gamin courant dans une prairie fleurie, s’émerveillant de la beauté qui l’entoure, enfant jouant avec un chien, un chat ou autre animal, on voit dans toutes ces expériences que la découverte de la nature s’accompagne d’un sentiment de ressemblance ou d’appartenance et de joie.

On voit que l’esprit du bébé ou du petit enfant est bien actif et ne correspond pas à une « table rase » passive qui attend d’être imprégné par les sensations du dehors. Contrairement à Kant, s’il joue avec un chat, il aura un sentiment de proximité, de sympathie et ne pensera pas que la « Ding in sich » du chat, le chat en lui-même est inconnaissable à travers son corps et ses réactions. A la différence de l’évêque et philosophe Berkeley et les tenants de l’idéalisme subjectif, il ne mettra pas en doute la réalité objective et matériel du chat ni du monde qui l’entoure. S’il joue avec d’autres enfants, il ne se prendra pas pour un membre de la classe exploitée vérifiant sa connaissance du monde et de la société par la praxis, révolutionnaire ou pas.

Un enfant rencontrant un chien ou un chat pour la première fois exprime d’abord de la surprise, une certaine inquiétude puis un sentiment d’excitation et de joie à voir que cet animal a quelque chose en commun avec lui, des membres, des yeux, un nez, des oreilles, la joie de voir un objet ou plutôt un être animé qui lui répond.

Dans ces différents cas, il s’agit d’un être humain qui découvre avec joie que l’univers est compréhensible. Cela n’est pas évident et aurait pu être autrement. Ainsi pour Einstein « Ce qui est incompréhensible, c’est que le monde soit compréhensible ». Cet univers est comme fait pour lui avec un « principe anthropique » guidant l’évolution de l’univers. Cette correspondance entre la capacité de compréhension de l’homme et la réalité de l’univers est source de joie.

Henri Bergson voyait dans la joie le sentiment qui accompagnait la création écrivant que « plus riche est la création, plus grande est la joie », joie produite quand un acte créatif permet à un être humain de manifester extérieurement quelque chose qu’il porte en lui-même. La joie accompagne également la découverte, quand l’homme découvre quelque chose dans le monde extérieur qui entre en résonnance avec les valeurs de bon, de beau, de vrai qu’il porte en lui comme l’harmonie, la grandeur ou la beauté de la nature, la bonté manifestée par un autre homme. Ainsi la joie se retrouve aussi bien chez la mère face à son enfant, chez l’enfant qui découvre le monde comme chez l’artiste ou le scientifique.

Le sentiment de joie lié à l’exploration de l’univers qui nous environne, s’explique si l’on fait appel à un vieux concept remontant à l’antiquité puis à la Renaissance avec en particulier le médecin suisse Paracelse, celui de la relation entre le microcosme et macrocosme. Selon cette vision, l’homme est le microcosme, le centre du macrocosme ou de l’univers, résumant en lui toutes les formes minérales, végétales, animales, un être qui comprend en lui les éléments chimique et a la capacité de comprendre avec sa raison les lois de cet univers. Les tenants de cette théorie font remarquer que même au niveau physique, sa voix a la capacité d’imiter celles des animaux, sa main avec le pouce s’opposant aux autres doigts en fait autre chose qu’un instrument spécialisé pour certaines tâches mais un organe capable de créer toutes sortes d’objets et de faire toutes sortes d’activités, la position debout est différente de celle des grands singes etc. Plus l’homme réalise sa place centrale par rapport au monde qui l’entoure, plus cette découverte s’accompagne de joie.

On retrouve là l’idée d’un principe anthropique guidant l’origine et l’évolution de l’univers pour aboutir à un cosmos fait pour l’homme et à un homme fait pour le cosmos, l’un correspondant à l’autre, la découverte de cette correspondance étant source de joie. Ce principe, proposé par l’astrophysicien Brandon Carter en 1974, est accepté par différents scientifiques américains comme celui permettant d’expliquer le mieux l’histoire de l’univers, bien qu’il aille à l’encontre une certaine approche matérialiste de la science plaçant l’homme à côté de l’univers, étranger l’un à l’autre et non fait l’un pour l’autre, qui a dominé les derniers siècles.

Mais il y a une cause à ce principe anthropique de correspondance entre l’homme et l’univers. C’est selon la Bible le Dieu créateur, Dieu d’amour qui, à propos de la création de l’homme et du cosmos, « vit que cela était très bon » et a donné comme commandement à l’homme de remplir la terre de la soumettre (Genèse 1-28) même si le pape François donne une version plus douce et plus écologique de ce commandement de « soumettre » la création dans son encyclique écologique « Laudato si’) ».

Partir du point de vue biblique que Dieu a fait le cosmos pour l’homme, pour qu’il le découvre et le « soumette » permet d’éviter les errements des différentes théories de la connaissance et permet en tout cas de mieux expliquer la curiosité, la joie et l’émerveillement du scientifique ou de l’artiste face à l’univers, sentiments sur lesquels les différentes épistémologies, particulièrement les approches matérialistes gardent un certain silence.

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