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Europe : politique

Robert Badinter sur la Turquie

L’ancien Garde des Sceaux socialiste, en fédéraliste cohérent, a signé dans le Monde de vendredi une tribune réitérant son opposition à l’entrée de la Turquie dans l’UE – ou, plus que son opposition, son regret, car il considère que la conclusion est acquise :

Car il ne faut pas se leurrer. Depuis trente ans, aucun Etat candidat à l’adhésion n’a été refusé par l’Union européenne. Parler de "négociations d’adhésion" est trompeur : il s’agit plutôt d’une longue mise en conformité de la législation du pays candidat avec les règles et exigences communautaires. Une fois la décision de principe prise, en l’occurrence le 3 octobre, le processus, laborieux, se déroule et, tôt ou tard, le candidat finit par satisfaire aux conditions fixées.

Pourquoi la Turquie manquerait-elle à cette obligation, elle qui a un tel intérêt économique, social, culturel à intégrer l’Union européenne, et espère que les fonds européens l’aideront substantiellement à transformer ses régions les moins favorisées et à moderniser ses infrastructures ? Le processus d’intégration prendra dix ou douze années. Au terme de ce délai, si court au regard de l’Histoire, sauf bouleversement politique en Turquie ­ – que nul ne doit souhaiter ­-, celle-ci deviendra membre de l’Union.

Après avoir passé en revue les faux arguments et les vraies raisons pour l’intégration de la Turquie, Badinter se résigne à la fin de son rêve européen :

[C]e qui s’inscrit dans la perspective de l’entrée de la Turquie, c’est une Europe indéfinie, aux limites incertaines, vouée à n’être qu’un espace marchand toujours plus étendu.

Ce n’est pas l’Europe puissance, apte à jouer un grand rôle sur la scène du monde, rêvée par les pères fondateurs et les grands hommes d’Etat européens d’hier. Dans le choix du président Chirac se mêlent la mélancolie du renoncement et la fin d’une grande espérance.

Certains souverainistes trouveront peut-être de la consolation dans le découragement de fédéralistes comme Badinter ou Giscard, pensant que l’extension à la Turquie aura pour contrepartie positive un détricotage du centralisme européen : ce serait compter sans la dynamique propre qui est maintenant à l’oeuvre dans l’UE, et qui échappe tant aux peuples qu’aux gouvernements.

Henri Védas

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