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Marche pour la Vie

Réponse à Alain Escada à propos de la Marche pour la Vie du 21 janvier

De Jean-Pierre Maugendre, président de Renaissance catholique :

Sous le titre « La Marche pour la Vie impose une réflexion stratégique » et le sous-titre « Prier comme si l’action était inutile. Agir comme si la prière était insuffisante », le président de l’Institut Civitas dénonce ce qu’il estime être « les erreurs stratégiques » de la Marche pour la Vie.

Les « erreurs » de la Marche pour la Vie

26908033_1604989956274834_1655605721134502999_nAlain Escada affirme que « cette Marche pour la Vie n’a guère pu enrayer le processus mortifère, encore moins faire entamer au législateur machine arrière ». Les raisons en sont, selon lui, simples :

  • l’ambiance festive, sans rapport avec le drame des 220 000 avortements annuels qui serait responsable d’« anesthésier la potentielle vertu de force (des jeunes) qui pourrait les conduire à de grandes choses ».
  • aucune pancarte n’employant le mot avortement, le combat serait perdu d’avance car la Marche pour la Vie (LMPV) se laisserait imposer son vocabulaire.
  • faire référence aux droits de l’homme serait utiliser les références de l’adversaire et en accepter les faux principes, dont l’avortement ne serait qu’une conséquence ultime
  • L’erreur stratégique essentielle serait de faire « le silence total sur Dieu».

Enfin, selon notre stratège d’outre-Quiévrain, l’exemple à suivre serait celui de l’Amérique latine, de l’Europe centrale, en particulier la Pologne où le combat mené pour la défense de la vie est ouvertement catholique. Oportet hareses esse, disaient nos anciens. Il convient qu’il y ait des hérésies afin de permettre de préciser les vérités de la foi. Nous ne sommes pas, bien sûr, dans ce domaine mais l’occasion nous est ainsi donnée de préciser quelques points.

Ce témoignage est-il crédible ?

Notons, tout d’abord, que les réflexions d’Alain Escada gagneraient en crédibilité s’il avait été présent à la Marche du 21 janvier 2018. Il aurait, dès la veille au soir, pu s’associer à la jeunesse catholique en prière dans l’église Saint-François-Xavier comble, pour un chapelet et un salut du saint-Sacrement. Il aurait entendu l’abbé Lelièvre en appeler à l’héroïsme, à la sainteté et au sacrifice pour défendre la vie. Le dimanche, il aurait pu prier avec les manifestants rassemblés à l’appel de SOS Tout-Petits pour réciter le rosaire ou vibrer à l’envoi en mission au service de la vie de Frédéric Espieux, appelant à voir le visage du Christ dans celui de chacun de ces enfants tués.

Cette crédibilité eut encore été accrue si Alain Escada avait participé, ce qui ne semble pas être le cas, au moins une fois à la « Marche pour la Vie », dénommée les dernières années « Marche de prière pour la Vie et la famille », organisée pendant plus de 20 ans (de 1991 à 2012) par l’association Renaissance Catholique, en pleine conformité avec les préconisations du président de Civitas : marche confessionnelle de prière et de protestation affirmant clairement « l’avortement tue des enfants ». Malheureusement, les faits sont là : cette Marche ne rassemblait plus, les dernières années, que 1000 personnes tout au plus ce qui est très sensiblement moins que les foules rassemblées par la Marche pour la Vie.

Rappelons que l’intuition fondatrice de LMPV, en 2005, à l’occasion des 30 ans de la promulgation de la loi Veil dépénalisant l’avortement, était de manifester publiquement une opposition permanente à cette loi et une volonté d’interpeller les pouvoirs publics à ce sujet.

Quelques éléments de réponse

La Marche pour la Vie est accusée de commettre une « faute grave » en entraînant des « jeunes gens généreux à faire la fête ». Il est clair que tel n’est pas l’objectif de cette Marche. La volonté est de manifester dans une ambiance familiale. Qu’un effort soit à faire, pour que les messages diffusés par les musiques et les chars ne soient pas en décalage avec le fond des discours de la journée, est certainement un axe de progrès pour l’organisation. Patrice Martineau est plus en phase avec le thème de la journée que Johnny Hallyday. On ne peut pas à la fois protester contre l’avortement et diffuser des musiques qui prôneraient la licence morale, l’amour libre, etc. Dont acte ! Il ne semble pas que les jeunes, qui ont assisté à la première messe le matin à 7 h et ont passé 12 h ensuite sous le crachin, soient particulièrement anesthésiés.

Concernant le choix des mots, il ne trompe personne, toutes les recensions de presse en font foi. De la chronique de Raphaël Enthoven sur Europe 1, au titre de LCI : « Elles ont 20 ans et défilent contre le droit à l’avortement ». À l’école de saint François de Sales, la Marche pour la Vie essaye de faire avec la réalité qui est qu’une femme sur trois en France aujourd’hui a avorté. Des « écoutantes », qui animent des cellules d’accueil des femmes qui souhaitent avorter afin de les en dissuader, participent à l’élaboration des slogans et mots d’ordre. « L’avortement tue. 30% des femmes de ce pays sont des assassins » n’est peut-être pas le message le plus audible. Il n’est pas interdit, en toutes circonstances, d’être habile et délicat tout en faisant œuvre de pédagogie. Nous invitons, à ce propos, Alain Escada à visionner la vidéo de présentation de la Marche disponible sur le site [voir ci-dessous, NDMJ]. C’est délicat, habile et clair.

Enfin, il faut faire avec la société française telle qu’elle est. À cet égard, la comparaison avec la Pologne ou l’Amérique latine ne vaut pas. En Pologne, les baptisés représentent 90% de la population avec un taux de pratique de 40%. Alors qu’en France, les baptisés sont 60% de la population avec un taux de pratique de 4%. De plus, il est conforme à l’ordre des choses que la mobilisation des catholiques, en tant que tels, se fasse derrière leurs évêques. Les évêques de France ne semblent guère s’engager sur cette voie. Deux seulement étaient présents. Citons, pour mémoire la déclaration de Mgr Brunin, président du Conseil Famille et société de la Conférence des évêques de France : « L’Église doit éviter le défaitisme et la croisade ». Un exégète serait le bienvenu.

Enfin, il est incontestable que la permanence de cette opposition à la culture de mort, jeune et déterminée, plonge dans un abîme de perplexité les dirigeants politiques qui ne comprennent rien à ce phénomène mais sont obligés de le prendre en compte dans leurs analyses et leurs projets.

La nature et la grâce

Enfin, et surtout, c’est une grave confusion que de confondre les plans naturels et surnaturels. La défense de la vie humaine innocente, de la conception à la mort naturelle, peut être appréhendée par la raison. C’est la raison, et la science, qui nous enseignent qu’il existe un être humain dès la conception. Tuer, ou non, un être humain parce qu’il est faible et dérangeant est, effectivement, ensuite un choix philosophique et religieux. Peu ont le courage de l’assumer. Les États-généraux de la bioéthique, dont il a été abondamment question durant cette Marche, sont l’occasion d’éclairer nombre de nos concitoyens, trompés et victimes de la désinformation ambiante.

Comme toute œuvre humaine, LMPV est imparfaite. Donnons-lui acte, qu’à sa manière, elle s’efforce d’actualiser le propos de Pascal « On se fait une idole de la vérité car la vérité hors de la charité n’est pas Dieu ».    

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