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Pays : International / Pays : Russie

Sans la Russie, Damas serait tombée en septembre 2015 aux mains des djihadistes

De Renaud Girard dans le Figaro :

"A l’ordre du jour du Conseil européen qui se tiendra les 20 et 21 octobre 2016, figure un « débat d’orientation sur les relations avec la Russie ». Angela Merkel a déjà préconisé, par voie de presse, le durcissement des sanctions de l’Union européenne à l’égard de la Russie. Faut-il que la France suive l’Allemagne sur cette ligne ou plutôt qu’elle invente une politique différente ?

Les manœuvres de l’opération Spring Storm de l’OTAN, qui déployèrent, en mai 2016, quelque 6000 soldats à la frontière nord de l’UE avec la Russie, avaient leur raison d’être : il s’agissait de rassurer les trois pays baltes sur la solidité de l’alliance stratégique qui nous unit à eux depuis 2004. Quand, dans les airs ou sur les mers qui entourent le continent européen, les forces russes se montrent, il faut aller à leur rencontre, avec un sourire poli, mais ferme.

En revanche, la politique européenne de sanctions anti-Moscou est contre-productive. On n’infléchit pas la politique d’une nation aussi résiliente et orgueilleuse que la Russie par des embargos. Les sanctions commerciales européennes ont pénalisé nos propres producteurs industriels et agricoles. Elles ont envenimé nos relations avec la Russie, sans faire fléchir le Kremlin le moins du monde sur le dossier ukrainien.

Ces relations n’ont jamais été aussi mauvaises depuis la chute de l’URSS en 1991 et les médias russes parlent de la possibilité d’une troisième guerre mondiale, où la Russie serait l’agressée. Moscou a rompu un accord de coopération avec Washington sur la gestion du plutonium militaire et organisé, du 4 au 7 octobre, un grand exercice simulant une attaque nucléaire contre la Russie, impliquant 40 millions de citoyens. En raison des invasions napoléonienne et hitlérienne passées, la Russie souffre d’une fièvre obsidionale qui lui fait toujours penser qu’elle est assiégée et que des complots et des préparatifs d’invasion se trament contre elle. Or, involontairement et par méconnaissance de la mentalité russe, la politique de l’OTAN alimente cette paranoïa. La stratégie de l’Occident vise à exercer un effet dissuasif, mais elle produit sur la Russie un résultat inverse. Nous sommes tombés dans un cercle vicieux : par son ingérence au-delà de ses frontières, la Russie poursuit en fait des buts défensifs, parce qu’elle s’estime menacée. Face à cette ingérence, nous prenons des sanctions et déployons des moyens militaires, mais cela ne fait que renforcer la peur qu’éprouve la Russie et dope son agressivité dans un engrenage infernal.

La Russie est un pays occidental. Dostoïevski, Tolstoï et Tourgueniev irriguent la culture occidentale. Mais notre intransigeance la pousse dans les bras de la Chine, qui est notre rivale, à tel point que les deux pays ont effectué des manœuvres communes d’entraînement dans les eaux de la Mer de Chine méridionale, du 12 au 19 septembre 2016. Face à la Chine, la Russie devrait être avec nous, pas contre nous.

La Russie est tout sauf un agneau, mais on ne fait de la politique que sur des réalités. Pays le plus vaste pays du monde, cette puissance nucléaire, membre permanent du Conseil de sécurité de l’ONU, est aussi le fournisseur énergétique de l’Europe. Politiquement, Poutine n’est pas un démocrate, mais il est le dirigeant le plus libéral de toute l’histoire de la Russie. Son régime est préférable à la terreur rouge stalinienne et au chaos des années Eltsine. Diplomatiquement, la Russie est incontournable au Moyen-Orient. Elle y combat le djihadisme sunnite, qui se trouve être notre plus mortel ennemi. Nous blâmons la Russie pour son intervention en Syrie. Mais, sans elle, Damas serait tombée en septembre 2015 aux mains des djihadistes, il y aurait eu un génocide des alaouites et, au mieux, une expulsion générale des chrétiens. Nous ne mettrons pas fin à la guerre en Syrie sans dialoguer avec les Russes.

Il faut ramener la Russie dans la famille européenne. Pour cela, il faut engager un vrai dialogue avec Poutine. Que les Occidentaux et les Russes aient le courage de proclamer clairement leurs intérêts vitaux, pour qu’on puisse ensuite trouver un terrain d’entente.


Pour les Européens, il s’agit du respect absolu de l’intégrité territoriale des Etats d’Europe centrale et orientale (y compris baltes). Pour les Russes, il s’agit de conserver les ex-Républiques soviétiques d’Ukraine, de Biélorussie, de Moldavie, de Géorgie, comme autant d’Etats-tampons neutres, tels la Finlande des années 1945-1990, et d’y protéger les droits des minorités russes qui y vivent. Ce n’est pas une prétention aberrante. Si nous garantissons à la Russie la neutralité de l’Ukraine, elle rendra à son voisin les 420 kilomètres de frontières qu’elle occupe actuellement.

Ignorer, dans notre diplomatie, la paranoïa russe, constitue une erreur cardinale. Nous devons être les intermédiaires de la réconciliation entre Russie et UE, ce qui conférera à la France un nouveau leadership européen."

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8 commentaires

  1. Mme Merkel ne commet que des erreurs historiques!

  2. Quoique cette Union Socialiste Européenne, décide, quoique Mama Merckel l’infiltrée de la RDA veuille…. IL faudra qu’ils se mettent une chose dans le crane : la Russie préfèrera envahir l’Europe (et sauver la France par la même occasion) que de laisser la puissance nucléaire Française tomber dans des mains muahométanes !!
    Ne pas avoir compris ça depuis le départ est sidérant !

  3. Slava Rossya ! Vive la Russie !

  4. “Moscou a rompu un accord de coopération avec Washington sur la gestion du plutonium militaire” Pas tout à fait exact car les russes ont pris cette décision après la rupture brutale de l’accord par les américains sur les traités de désarmement. Il s’agit donc d’une mesure de rétorsion tout à fait compréhensible.
    N’oubliez pas que la Russie est totalement enserrée par les bases de l’OTAN qui désormais sont à leur frontière au mépris des promesses jamais tenues par les occidentaux.
    “La fièvre obsidionale qui lui fait toujours penser qu’elle est assiégée et que des complots et des préparatifs d’invasion se trament contre elle” ne viennent pas du néant mais bien d’une réalité concrète.
    L’homme fort de l’Europe c’est la Russie, l’Europe est une larve soumise aux intérêts américains et les larves on les écrase.
    Il est dit que le secours de l’Occident européen viendra de la Russie et pas des USA, empire déliquescent.
    Quant à Makrel et ses soutiens européens, un jugement exemplaire pour haute trahison est indispensable.
    En ce qui concerne la France contemporaine, état de second ordre, elle ne mérite pas de leadership qu’elle est incapable d’assumer.

  5. Les sanctions ont au moins eu cet effet benefique d’inciter la Russie à remettre en culture des millions d’hectares de terres de la fameuse “ceinture noire”, ce qui a eu pour consequence, associé à la baisse du rouble, de propulser la Russie au rang de premier exportateur mondial de cereales.

  6. La Russie est notre alliée face aux prétentions djihadistes des pays du Golfe persique, qui eux veulent contrôler en Syrie la production de gaz (d’où la guerre civile).
    Les Saoudiens voulaient avec leur allié qatari et celui de la Turquie faire passer les oléoducs en Syrie, ce que Bachar al Assad a refusé. Résultat : les pays du Golfe ont déclenché une guerre civile en Syrie et elle n’est pas prête de se terminer, sauf si Moscou anéantissait nucléairement les djihadistes et leurs alliés.

  7. La Russie, une nation orgueilleuse ? Peut-être, mais déceler l’orgueil chez les autres est la première marque du sien propre.

  8. Intéressante analyse se celle de Renaud Girard: ni angélisme ni poutinophobie primaire.
    Je suis moi aussi intimement persuadée que la Russie doit être/ redevenir un allié pour nous, politiquement, culturellement, économiquement et spirituellement.

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