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France : Politique en France

Le président doit d’abord être un chef avant d’être un communicant

François Bert a regardé le débat des candidats à la présidentielle en décryptant leur personnalité, estimant que l'on ne doit pas voter d'abord pour le programme du candidat mais en fonction de sa personnalité. Il explique dans Valeurs Actuelles :

VALEURS4191_001"[…] 80 % de l’activité qui attend le postulant à la mandature suprême ne vient pas du programme mais des contextes non écrits. Aussi sûrement qu’on n’envoie pas à la guerre des vendeurs d’armes ou des docteurs en Histoire militaire mais bien des guerriers entraînés dont le métier est le danger, on doit impérativement choisir pour nous diriger un homme d’État capable de transformer les chamboulements futurs en décision et, derrière, en action coordonnée. Cela ne se lit pas dans les programmes mais dans les personnalités.

J’ai pu écrire dans mon ouvrage comment la Ve République, associée depuis le départ au règne médiatique, avait favorisé l’avènement d’experts et de vendeurs à la Présidence au détriment des chefs. Voyons quelle personnalité s’exprime dans les candidats qui s’offrent à nos suffrages.

Prêtre, prophète ou roi ?

Je distingue deux dimensions-clés dans la compréhension des personnalités : ce que j’appelle le moteur (ou intelligence fondamentale) et l’énergie (ou position dans l’action). Il y a trois moteurs que l’image biblique nous résume bien : les « prêtres » (intelligence dominante de la relation), les « prophètes » (intelligence dominante des idées) et les « rois » (intelligence dominante de la décision). Il y a aussi deux énergies : l’impulsion (vision à l’initiative et auto-générée) et la réaction (vision construite au contact et en complément de celle d’un chef ou d’un groupe).

Une gauche en incubation de l’impossible

La gauche nous offre cette année trois « prophètes » : avec des différences notables ils ont tous trois le goût prioritaire des idées sur celui de l’action et fonctionnent tous en réaction/animation du groupe qui les entoure.

Emmanuel Macron est le prototype de l’animateur de brainstorming qui cherche à produire des propositions fourre-tout capables de faire signer n’importe quel acheteur. C’est un consultant de palais, un entrepreneur par ennui qui vit l’aventure en changeant seulement de décor et de bande sonore : il est la démonstration de ce qu’un programme peut, à partir du moment où il est bien récité, rassembler des propositions opposées sans jamais être inquiété.

Benoît Hamon  verse quant à lui dans une créativité débridée dont seule la gauche a le secret : son vocabulaire est opaque, ses propositions irréalisables, sa bonne volonté traduite par une surenchère de novlangue ou de lyrisme exacerbé. C’est Assurancetourix, le barde d’Astérix : sa musique est originale mais le bon sens a du mal à l’écouter.

Derrière la posture goguenarde, la révolte du cœur et le verbe fécond, Jean-Luc Mélenchon est d’abord un passionné d’idées. C’est un conseiller, pas un chef. Il y a de la culture, de l’audace et de l’originalité dans ses points de vue et ses saillies. La quête néanmoins reste celle, nostalgique et verrouillée, d’une gauche française communiste qui n’a jamais fait le deuil de ses leurres. Dès que le tribun descend de sa tribune, il ne sait plus où aller.

Une droite entre exécution prospère et tempête affective

A droite, François Fillon fait, de prime apparence, figure d’exception : c’est un « roi », davantage soucieux d’action que de débats d’opinion. Son calme froid dans les primaires, son obstination payante au Trocadéro en a fait une meilleure démonstration que toute forme de discours. Mais il y a un hic : François Fillon est un chef en second, plus à l’aise dans la conduite des opérations que dans l’élaboration intime et continue une vision. Il serait plus judicieux de dire qu’il est par nature davantage ministre d’État que roi. S’il a su construire en collaboration une vision aboutie, il est vite mal à l’aise quand il s’agit la faire évoluer au gré des circonstances et en opposition aux luttes d’influence.

Marine Le Pen représente pour sa part la figure relationnelle que nous avions davantage vue aux précédentes élections. C’est un « prêtre » qui se veut porte-parole de la masse des français oubliés. En cette posture d’avocate, elle trouve la force et le timbre de voix qui lui correspondent. Plus difficile est la construction autour d’elle d’une équipe durable et complémentaire, tant l’allégeance affective est prioritaire dans ses choix. L’enjeu est enfin et surtout sa capacité de discernement dans la gestion des événements futurs : la fulgurance de la réplique n’est pas l’équilibre de la décision qui doit inclure, bien mieux que la radicalité du principe, la possibilité de l’action.

Au-delà des notables différences de nos cinq candidats principaux, il est patent de constater qu’aucun ne possède une énergie d’impulsion. Tous dépendent de l’activité de l’équipe rapprochée pour générer une vision. En ce sens ceux qui vont devoir les accompagner aux commandes ont plus que jamais un rôle déterminant. Et parce que c’est de réalisations qu’il s’agit et non de discours, il faut que ce soit des chefs plutôt que des communicants."

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