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L'Eglise : Foi

La place de Dieu et de l’argent chez les « ministres » et le peuple

Homélie du père Madros :

Saint Paul écrit aux Corinthiens (1 Cor 4, 1 s) : « Qu’on nous regarde comme serviteurs du Christ et intendants des mystères de Dieu ». Il s’agit des apôtres, de leurs disciples actifs dans l’évangélisation ; bref « des ministres de l’autel et de la chaire". “Ministres” ici signifie les serviteurs de l’Evangile, consacrés à cette mission. Serviteurs en principe et parfois, souvent, en fait, grâce à Dieu. Les  ministres dans la vie politique nationale sont, eux aussi, en principe serviteurs, mais la réalité nous indique que souvent ils se font servir et servent très mal leurs nations. Saint Paul utilise ici le mot « hyperétas υπηρέτας » : il dénote dans la particule « hypo » « en dessous » une certaine infériorité. Or, nous appelons nos responsables religieux « les supérieurs » ! L’autre vocable pour « intendants » : « oikonomous οικονόμους » signifie étymologiquement « économes ». Nous pouvons entrevoir la triple fonction apostolique, épiscopale et sacerdotale : la sanctification, l’enseignement et l’administration. « Or, ce qu’en fin de compte on demande à des intendants, c’est que chacun soit trouvé fidèle » ! Ah ça ! Là, nous le clergé, nous nous trouvons parfois dans de mauvais draps, précisément quand notre « fidélité », loyauté, allégeance ou honnêteté laissent beaucoup à désirer !

Tentation immédiate : de nous jeter la pierre, tout en cachant ou justifiant la négligence et les trahisons de certains laïcs, surtout les politiciens ! Le pape François ne cesse de nous fustiger. Et il a raison ! Un évêque, un prêtre pas fidèle, cela ne vaut pas la chandelle ! Nous critiquer peut être parfaitement « juste et bon », mais il y a pire : sous prétexte de notre « corruption », laisser l’Eglise et le Christianisme ! Là, ça ne va plus ! Là, la logique et une certaine honnêteté manquent dramatiquement. Ces « apostats », que nous traitons toujours gentiment, auraient raison de quitter l’Eglise et l’Evangile si ceux-ci incitaient à la malhonnêteté, à la cupidité effrénée, à la sensualité déchaînée, au terrorisme coupeur de gorges. Et ces personnes qui laissent l’Eglise rejoignent des religions ou des dénominations fondées exactement par des personnages de conduite peu reluisante qu’on se garde bien de leur faire connaître (et qu’il est « catholique » de taire, par amour du prochain !). Nous, les membres du clergé, nous portons, au moins partiellement, la responsabilité de l’ignorance de notre peuple. Mais, parfois celui-ci paralyse notre kérygme, en nous permettant à peine d’annoncer, et jamais de « dénoncer » l’erreur ! Pas étonnant que des personnes y tombent. Notre « charité mal ordonnée » aura ainsi contribué à cacher l’erreur, sous prétexte de respect et de tolérance.

Plus grave que le problème du comportement négatif de certains « ministres » de Dieu, il faut soulever la question de leur existence même ! Si vous voulez (et même si vous ne voulez pas), c’est quelque part, avec tout le respect dû à Notre-Seigneur, Maître et Sauveur, c’est sa faute à lui (!) d’avoir placé des ministres humains peccables, au lieu de continuer personnellement, du haut du ciel, à nous enseigner, sanctifier et diriger. Le premier, il avait pris le risque avec ses fameux Douze apôtres qu’on pourrait « cataloguer » ainsi (toujours avec révérence et non sans humour) : un traître et dix lâches ! Si cela vous scandalise, pensons ensemble au gros risque, le plus gros, que le bon Dieu a pris dans cette histoire de la procréation ! Le Créateur aurait pu créer directement l’humanité, comme il l’avait fait au premier « coup », avec au moins Adam ! Eh bien, il a opté pour la procréation ! Vous voyez ça d’ici ? Confier à des hommes, au masculin, plus ou moins vertueux et intelligents, et à des femmes, plus ou moins belles et vertueuses, intelligentes aussi) la transmission de la vie à des milliards de petits humains ! Pas évident que tous ces pères et ces mères (pas encore question d’éprouvette ou d’insémination) sont tous bons, beaux, saints…loin de là ! Vous n’avez qu’à voir la généalogie du Christ chez saint Matthieu : trois pécheresses de gros calibre et quelques étrangères parmi ces aïeules ! Et les aïeux (David, Salomon), ce n’est pas la fine fleur de l’ascétisme !

Morale : le Christ a voulu donner à des hommes faibles la continuation de son message de salut, de sainteté et d’annonce de la Bonne Nouvelle. Dieu continue toujours à confier à des hommes et des femmes la transmission de la vie. Et vous savez quoi : malgré tous les défauts, les vices et les péchés des parents (papa et maman bien entendu), leur union qui nous donne la vie nous fournit aussi l’équilibre et la tendresse dont nous avons besoin, ce qu’aucune éprouvette ne peut assurer, et encore moins l’union stérile entre deux personnes de même sexe (Voir le Catéchisme de l’Eglise Catholique, n. 2357).

Dieu ou « Mammon », l’Argent divinisé ! (Mt 6, 24- 34)

Jésus nous déclare : « Vous ne pouvez pas servir (ou : adorer) Dieu et Mammon. D’abord, le verbe « douleuein δουλεύειν », d’où « doulos » serviteur, esclave. Puisque seuls les esclaves travaillaient, le grec moderne appelle le travail « douleia δουλειά », esclavage.  Mais Jésus semble bien aller plus loin en utilisant probablement, en araméen, soit le verbe « ‘bad עבד » qui veut dire « faire, agir en esclave », ou, plus explicitement, comme le fait la Peshitta, « lemafleh », למפלח, « adorer, rendre un culte ». Probablement il faut prendre le mot فلاح « falah » dans l’appel du muezzin d’après l’araméen « le culte », non d’après l’arabe : « le fait de cultiver ou le succès » qui ne cadrent pas avec le contexte.

Mettant Mammon comme émule ou alternative de choix avec Dieu, Jésus nous en signale la gravité. Il est la seule chose à être dotée, même injustement et fallacieusement, de caractère divin, dans la prédication de Jésus. Il ne s’agit pas là de sa pensée, mais d’une critique implacable qu’il fait de trop d’hommes et de femmes au cours des siècles ! Et les choses ne semblent pas du tout s’arranger de nos jours, pas même dans certains cercles cléricaux, parfois haut placés! Et ce n’est pas le pape François qui va se gêner pour les dénoncer, les admonester, les surveiller et les corriger, autant que faire se peut. 

Que signifie « Mammon » ? De l’araméen « aman אמן », confier, déposer (comme l’arabe dialectal amaanah أمانة). D’autres savants rattachent le mot au verbe « taman טמן », « enfouir pour cacher », d’où la forme passive originale « matmoun », ce qui est enfoui. Toujours « l’avoir », l’argent, l’or, le « fric » (à ne pas confondre avec le froc !), le poignant. Et, avec Jean Gabin, « ne touchez pas au grisbi ! »

Dans le Siracide 31, 8, nous lisons : « Bienheureux le riche qui se garde sans tache et ne court pas après l’or ». Le substrat sémitique, hébreu et araméen, du mot « or » serait « mammon », mot indéfini. Jésus a eu l’initiative de le définir et de l’enfler (même dans un sens négatif). Rien de plus réaliste : les nations, les personnes, en général adorent l’or, l’argent, « nerf de la guerre ». Pourtant, la cupidité « racine de tous les maux » (d’après 1 Tim 6, 10), n’explique pas à elle seule le terrorisme pseudo-théocratique fondé directement sur des textes « sacrés » qui commandent de combattre et de tuer les infidèles au nom d’Allah, par exemple. Inutile de dire que de tels textes n’existent absolument pas dans le Nouveau Testament. Donc, personne n’est autorisé de parler de « terrorisme chrétien » même si des « chrétiens » ont utilisé la violence et pratiqué le terrorisme.

Conclusion

Que de « ministres » et de chefs d’Etats vendent leurs pays !

Quant à nous, ne nous attachons pas à l’argent : ni le clergé ni les laïcs. Et quand, par malheur, les ministres de Jésus crucifié comptent trop sur « l’or et l’argent », ils ne peuvent plus dire au monde paralysé : «  Lève-toi et marche ! » (Actes 3, 6).

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